L'Amérique n'aime plus ses PDG

Quand Steve Case, alors PDG d'America Online, a inauguré l'an 2000 en s'offrant Time Warner pour créer le plus grand groupe mondial de communication, on a salué le coup de génie et l'avènement définitif de la nouvelle économie. Personne n'aurait pu imaginer que le même serait éjecté trois ans plus tard par son conseil d'administration et que Time Warner, une fois ses hommes réinstallés aux commandes, ôterait sans ménagement les trois lettres AOL de sa raison sociale.Quand Dick Grasso, patron du New York Stock Exchange, a fait redémarrer la Bourse de Wall Street moins d'une semaine après les attentats du 11 septembre, il semblait avoir définitivement conquis sa place au rang des héros de l'Amérique. Mais, pour s'être en même temps rempli les poches (rémunérations différées et pensions de retraite pour un total de 187,5 millions de dollars), il a été contraint à une démission honteuse trois ans presque jour pour jour après la réouverture historique du NYSE.Quand Martha Stewart, grande prêtresse du style de vie et des bonnes manières, est devenue milliardaire en introduisant en Bourse le groupe éponyme, elle semblait incarner le rêve américain. Elle est aujourd'hui devant les tribunaux, accusée de délit d'initié pour quelques dizaines de milliers de dollars.Et puis il y a bien sûr les cas extrêmes, les Kenneth Lay et Jeffrey Skilling, patrons d'Enron, ou encore Dennis Kozlowski, PDG de Tyco International, désormais célèbre pour avoir tout fait payer à son groupe, d'une grotesque fête costumée à un million de dollars pour son épouse jusqu'à... un rideau de douche facturé 6.000 dollars.Et la liste est encore longue.Amalgamer des personnalités et des actions aussi différentes est certainement injuste. Mais cela n'arrête pas les médias et l'opinion américaine pour autant. Une opinion d'autant plus prompte à vouer aujourd'hui ces grands patrons aux gémonies qu'elle ne semblait pas hier trouver de piédestal assez prestigieux pour les y installer.Mais les chiffres ont fini par avoir raison de cet enthousiasme. Depuis 1981, les PDG des grandes sociétés cotées américaines ont multiplié leur rémunération par vingt. Elle atteint en moyenne 10 millions de dollars par an, soit 500 fois le salaire moyen. Outre Atlantique, ces chiffres, jusqu'à une période récente, ne posaient aucun problème. Le système fonctionne tant que les richesses créées par les patrons pour leurs actionnaires petits et grands sont nettement supérieures à leur rémunération. Mais, dans le cas contraire, les dits actionnaires ne pardonnent plus.Tel est le message qu'un bonne partie d'entre eux délivrera demain à Michael Eisner. Il pourrait être contraint à en tirer des conclusions définitives.
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