Le gouvernement met en place l'état d'urgence

Le gouvernement s'est mobilisé, aujourd'hui, autour de la mise en place des mesures de couvre-feu, annoncées lundi soir par le Premier ministre Dominique de Villepin. Approuvé dans son principe par un conseil des ministres exceptionnel mardi matin, ce dispositif faisait l'objet d'une réunion de mise en oeuvre mardi après-midi entre le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy et les préfets.Dominique de Villepin l'avait annoncé lundi soir à la télévision: la France réactive le dispositif de couvre-feu institué en 1955 dans le cadre de la guerre d'Algérie. Le conseil des ministres réuni ce matin a décrété l'état d'urgence, de façon à permettre la mise en oeuvre de cette disposition dans les banlieues et les villes touchées par les troubles de ces deux dernières semaines.Les détails d'application du dispositif - lieux, modalités - devaient être arrêtés dans l'après-midi de mardi, à l'occasion d'une réunion rassemblant les préfets des sept zones de défense autour de Nicolas Sarkozy. Le couvre-feu pourra ensuite entrer en vigueur à partir de minuit ce mardi soir. Intervenant dans l'après-midi à l'Assemblée nationale, Dominique de Villepin a donné quelques précisions sur les mesures qui pourront être prises sur le terrain. La circulation des véhicules et des personnes pourra être restreinte ou interdite dans certaines communes ou parties de communes, et cela sur la base d'arrêtés préfectoraux. Les contrevenants seront passibles de peines de prison ferme allant jusqu'à deux mois et d'amendes allant jusqu'à 3.750 euros. Pour les mineurs, la peine de prison maximale sera d'un mois. Assignations à résidenceLes "fauteurs de troubles" pourront être assignés à résidence ou interdits de séjour par les préfets. Ces derniers pourront également procéder à la fermeture de lieux "s'ils deviennent le point de rassemblement de bandes". En outre, il pourra être procédé à des perquisitions en dehors des procédures judiciaires normales, notamment afin de procéder à des recherches d'armes.La loi de 1955 prévoyant une durée de douze jours pour l'état d'urgence, le gouvernement va s'employer à adopter un projet de loi permettant d'en prolonger la durée. A cette fin, un nouveau conseil des ministres exceptionnel se tiendra d'ici la fin de la semaine.Le gouvernement tente ainsi de se donner les moyens d'enrayer la spirale de la violence qui secoue les banlieues depuis douze jours. Durant la nuit de lundi à mardi, ce sont 1.173 voitures qui ont été brûlées. Tout comme la nuit précédente, la province a été davantage touchée que la région parisienne, avec de graves incidents à Toulouse. Un peu partout en France, des écoles ont été l'objet de tentatives d'incendie, ainsi que plusieurs bibliothèques.Au total, selon un bilan dressé par l'AFP, les violences ont affecté en douze jours environ 300 communes. Plus de 6.000 véhicules ont été incendiés, ainsi que des dizaines d'édifices publics. Plus de 1.550 personnes ont été interpellées et environ 860 placées en garde à vue.Cent millions d'euros pour les associationsDans ces conditions, la priorité du gouvernement est donc au rétablissement de l'ordre. D'où l'instauration du couvre-feu mise en train aujourd'hui. Reste que les problèmes de fond qui expliquent cette flambée de violence dans les banlieues doivent aussi être traités. Dominique de Villepin a lancé plusieurs pistes lundi soir, avec notamment une ouverture de l'apprentissage aux enfants dès l'âge de 14 ans, et non plus 16 ans. Une initiative qui est d'ailleurs loin de faire l'unanimité dans les milieux de l'enseignement et de la formation. Le gouvernement entend également rétablir les subventions aux associations qui s'occupent des quartiers difficiles, après les restrictions budgétaires infligées ces dernières années. A cette fin, 100 millions d'euros seront débloqués en 2006. Le Premier ministre a également annoncé la création "dès janvier 2006 de 5.000 postes d'assistants pédagogiques pour les 1.200 collèges des quartiers sensibles".Autres innovations administratives, Dominique de Villepin a annoncé à l'Assemblée la création "d'une grande agence de la cohésion sociale et de l'égalité des chances", qui sera "l'interlocuteur des maires pour toutes les questions relatives aux quartiers sensibles". En outre seront mis en place des "préfets délégués à l'égalité des chances".Globalement, a déclaré ce matin le chef de l'Etat lors du conseil des ministres, il faut désormais "renforcer et accélérer l'ensemble des politiques engagées depuis trois ans pour l'éducation, la rénovation urbaine, l'emploi, la lutte contre les discriminations" afin d'offrir un avenir à tous ceux "qui ressentent que leur horizon est bouché par la relégation sociale, le racisme et les discriminations". Autant de mesures qui nécessiteront évidemment beaucoup plus de temps que l'instauration d'un état d'urgence...En attendant, l'inquiétude suscitée par ces événements s'étend jusqu'au marché des changes... Alors que l'euro est en baisse sensible aujourd'hui, perdant 0,24% à 1,1780 dollar, certains cambistes n'hésitent pas à établir un lien en cette faiblesse de la monnaie unique et la situation sociale en France. D'autant, affirment-ils, que ces troubles pourraient s'étendre à d'autres pays de la zone euro: quelques voitures ont été incendiées à Bruxelles. Il n'en demeure pas moins que le mouvement de remontée du dollar était très fortement engagé depuis plusieurs semaines, bien avant que n'éclatent les troubles dans les banlieues françaises...
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