La BCE réfute tout risque d'éclatement de l'union monétaire

Il est "complètement absurde, totalement insensé" de parler de risque d'éclatement de l'Union monétaire, suite aux rejets de la Constitution européenne par la France et les Pays-Bas: c'est le message sans ambiguïté qu'a lancé aujourd'hui Jean-Claude Trichet, le président de la Banque centrale européenne.Celui-ci s'exprimait lors d'une conférence de presse à Francfort, au lendemain du référendum néerlandais qui a rejeté la Constitution européenne, et trois jours après le référendum français qui a tranché dans le même sens.Ce coup d'arrêt à la construction européenne donné par deux des pays fondateurs de l'Union a semé le doute sur la solidité de l'édifice et, entre autres, sur celle de la monnaie unique. Le vote des Pays-Bas a fait tomber hier soir l'euro à son plus bas de huit mois, à 1,2158 dollar. Depuis le début de l'année, et le plus haut historique de l'euro à 1,3660 dollar, la chute est donc brutale: plus de 11% en cinq mois. Et cela même si la monnaie unique se reprend quelque peu aujourd'hui, cotant 1,2279 dollar en fin d'après-midi.Pas question pour autant de laisser croire que la monnaie unique a été affaiblie par ces événements. "L'euro est un succès", a affirmé Jean-Claude Trichet lors de son intervention. Répondant aux critiques qui ont été formulées pendant les campagnes des référendums sur le rôle de la Banque centrale européenne, accusée en France de ne pas favoriser la croissance et aux Pays-Bas d'avoir suscité une hausse des prix avec l'introduction de l'euro, le président de l'institut d'émission a répondu que la BCE serait "fidèle à son mandat" qui consiste à contenir l'inflation. "Nous ferons tout ce qui est nécessaire pour améliorer la confiance, une chose essentielle dans les circonstances actuelles", a-t-il ajouté. Un peu plus tôt dans l'après-midi, c'est sans surprise que la Banque centrale européenne avait maintenu ses taux inchangés. Le taux d'intérêt directeur demeure donc à 2%, c'est-à-dire un niveau identique depuis deux ans. Une telle décision était unanimement attendue par les économistes.Pour les responsables de l'institut d'émission, il n'est donc pas question de céder aux nombreux appels à la baisse des taux qui leur sont lancés au nom du soutien de l'activité économique européenne.Les derniers indicateurs de conjoncture ont certes de quoi inquiéter. Dans les principaux pays de la zone euro - Allemagne, France, Italie - l'activité subit un sérieux coup de frein. Inquiets du chômage persistant, les ménages perdent le moral, ce qui met en danger leur propension à consommer, alors même que leur consommation demeure le principal soutien de l'activité économique. En outre, les capacités exportatrices des entreprises de la zone sont handicapées par la force de l'euro vis-à-vis du dollar, ce qui freine également la croissance, qui n'est pas aidée non plus par l'envolée des prix pétroliers.Du coup, les perspectives de la zone euro ne cessent de se dégrader. La Commission européenne vient d'ailleurs de réviser en baisse ses prévisions de croissance pour le deuxième trimestre en zone euro. Elle attend désormais une progression du PIB des plus modestes, comprise entre 0,1% et 0,5%. La BCE elle-même partage ce diagnostic. Jean-Claude Trichet a annoncé aujourd'hui qu'elle avait ramené ses prévisions de croissance 2005 pour la zone euro de 1,6% en mars dernier à 1,4% aujourd'hui. Pour l'année prochaine, la prévision de la BCE passe de 2,1% à 2%.Dans ces conditions, les appels à la baisse des taux de la BCE se sont multipliés ces derniers temps, émanant entre autres de l'OCDE et des gouvernements allemand et italien. Mais la banque centrale ne veut rien savoir. Sa crainte d'une résurgence des tensions inflationnistes demeure en effet. La BCE vient d'ailleurs de modifier également ses attentes en la matière, relevant légèrement sa prévision d'inflation 2005, de 1,9 à 2%. Même si elle a en parallèle diminué du même montant sa prévision 2006, ramenée de 1,6% à 1,5%. Pour les banquiers centraux de la Francfort, en fait, les taux sont actuellement exactement au bon niveau. C'est ce qu'a confirmé Jean-Claude Trichet dans sa conférence de presse, durant laquelle il a affirmé qu'une baisse ou une hausse du taux directeur de la Banque centrale européenne en l'état actuel risquerait de faire remonter les taux d'intérêt du marché. Dans la première hypothèse, a-t-il analysé, les investisseurs s'inquièteraient d'une poussée d'inflation; dans la deuxième, ils craindraient qu'une hausse des taux court entraîne mécaniquement dans son sillage celle des taux longs. Et pour le président de la BCE, une réduction des taux serait d'autant moins justifiée que, à leurs niveaux actuels - historiquement faibles, et inférieurs aux taux américains - , ils apportent "un soutien considérable à la croissance économique". Autant dire que le statu quo actuel sur les taux européens pourrait durer encore longtemps... Seule lueur d'espoir pour les partisans d'une baisse des taux: si le président de la BCE a clairement indiqué qu'il ne préparait pas une évolution vers une réduction des taux, il n'a pas exclu expressément une telle évolution à l'avenir, contrairement à ce qu'il avait fait les mois précédents.
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