Mort d'un banquier

Au delà des conditions dans lesquelles a été assassiné Edouard Stern, et sur lesquelles la police suisse essaie de faire la lumière, la disparition de ce banquier hors normes a suscité un réel émoi dans le monde feutré de la haute finance. Tout d'abord parce qu'Edouard Stern était l'héritier d'une prestigieuse famille de banquiers. Ensuite parce que son passage au sein de la banque Lazard a fait un temps de lui le successeur désigné de Michel David-Weill, ce qui marque forcément. Enfin parce que ses méthodes en affaires et le halo de mystère qui entourait ses derniers investissements ont forgé l'image d'un banquier hors normes. Direct, sinon brutal, Edouard Stern ne s'est jamais embarrassé de manières. Une fois disparu, les langues commencent à se délier et le portrait que les uns et les autres brossent à demi-mot n'est pas des plus engageants. Edouard Stern aimait le pouvoir, le luxe et l'argent. Et il semblait prêt à beaucoup de choses pour en gagner, la plus bénigne d'entre elles étant d'allonger un peu plus la longue liste des inimitiés que ses méthodes suscitaient. Cet homme pressé aimait le risque et le danger. "Mauvais garçon" d'un establishment dont il était issu, il n'a jamais hésité à bousculer ceux qui entravaient ce qu'il pensait être son irrésistible ascension. On ne reviendra pas sur les conditions dans lesquelles il a pris la tête de la banque familiale à seulement 22 ans, ni sur celles qui ont présidé à son départ de chez Lazard. Michel David-Weill, qui ne manque pas d'esprit, a résumé d'une formule acide ses relations avec Edouard Stern: "je l'ai traité comme un fils, il a voulu me traiter comme son père". Faute de s'installer dans le fauteuil de son beau-père, Edouard Stern a dû voler de ses propres ailes et s'est installé en Suisse pour réaliser des investissements de plus en plus mystérieux. La place genevoise est réputée pour sa discrétion et le banquier, habile dans ses montages, n'a jamais hésité à abriter ses opérations derrière le paravent de paradis fiscaux bien accommodants. Aussi Edouard Stern ne faisait-il plus depuis longtemps la Une de la presse économique. Parti de chez Lazard, il avait quitté la lumière mais l'ombre ne lui faisait pas peur. Il a emporté dans la tombe une partie de ses secrets.
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