Sir Ian Blair, un policier proche des communautés

Dans la lutte contre la terreur que les attentats de Londres rendent plus urgente, le Royaume-Uni peut compter non pas sur un, mais sur deux Blair. A côté du Premier ministre, une autre personnalité (sans aucun lien de parenté avec le célèbre Tony) occupe depuis quelques jours le devant de la scène: c'est sir Ian Blair, le chef de la police de Londres, à qui revient la responsabilité de l'enquête sur les quatre bombes qui ont causé plus de cinquante morts. A 51 ans (un de moins que le Premier ministre) cet homme de moyenne stature, à l'allure typiquement anglaise (cheveux et yeux clairs, nez mince, lèvres subtiles, sans oublier sang-froid et sens de l'humour) se retrouve à gérer, de son propre aveu, "la scène de crime la plus terrifiante de l'histoire de l'Angleterre". Il affronte la tâche sans renoncer à sa personnalité, gardant vis-à-vis du public cette allure qui pourrait très bien le faire passer pour un camarade de pub ou un voisin de bureau. Mais il reste pour autant fidèle à la doctrine churchillienne de ne pas susciter de faux espoirs.Dans ses points de presse, il ne manque pas de souligner la gravité du moment. Il déclarait ainsi, quelques heures seulement après les attentats, qu'une nouvelle attaque était "probable". Sollicité à ce sujet, il affirme sans ambages que la police a préparé des plans d'urgence pour la population en cas d'attaques plus graves encore, qu'elles soient chimiques, bactériologiques ou nucléaires. Mais sir Ian s'est aussi calé dans le rôle de celui qui a compris qu'une catastrophe est également une occasion de revoir en profondeur certains mécanismes défectueux. "Dans la tragédie, nous avons une immense opportunité: celle d'engager les communautés musulmanes dans le dialogue, dans l'intégration, afin qu'elles se sentent une composante à part entière de la société britannique", a-t-il affirmé jeudi au cours d'une rencontre avec la presse internationale à Londres. Sir Ian Blair (anobli pour ses services par la reine Elisabeth II en 2003) croit qu'un "changement d'époque" est potentiellement en vue, qui verrait les musulmans du Royaume-Uni, notamment les communautés qui sont ou se sentent marginalisées, participer à l'effort national de démantèlement du réseau terroriste. "Nous devons encourager et aider l'Islam britannique à passer du refus qui le caractérise parfois à l'engagement plein". Le refus a pu dans le passé prendre la forme de la négation de la présence de cellules terroristes ou d'idéologies incitant à la violence au sein même des communautés. En bon policier, Ian Blair est direct dans les questions qu'il pose: qui sont les complices des kamikazes, qui a planifié les attentats, qui a fourni les explosifs? Il croit qu'un élément clé de l'enquête passe par la participation des milieux d'où sont issus les terroristes. Il s'agit de comprendre à fond ce qui a pu "transformer un jeune musulman intégré dans la société et menant une vie apparemment normale en un kamikaze". Le chef de la police londonienne refuse par ailleurs l'équation entre fondamentalisme et terrorisme. "Je veux être clair: il n'y a aucun mal à être un fondamentaliste dans sa propre religion, qu'elle soit islamique, chrétienne ou juive. Ce qu'il faut stopper c'est l'extrémisme et le terrorisme". Stopper les bombes, non la foi. Au même titre que personne n'oserait établir un lien entre les fondamentalistes chrétiens et les bombes irlandaises de l'IRA. Une prise de position importante, qui n'est pas forcément, encore, celle de toute la société. L'arme maîtresse du premier policier de Londres sera ainsi le dialogue avec les leaders des communautés musulmanes. Pour qu'elles identifient et isolent en leur sein aussi bien les "prêtres de la haine" que les terroristes, et pour qu'elles interagissent activement avec le reste de la société dans la création d'un environnement plus sain. Sans surprise, le CV de sir Ian indique qu'il est depuis longtemps un avocat de la réforme de la police et un initiateur du projet qui a mené à la constitution d'un corps d'officiers issus des communautés locales. "Ce n'est jamais la police qui vainc le crime, c'est la société", ne se lasse-t-il pas de répéter.
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