Pourquoi privatiser ?

La partie qui se livre entre les ports de Marseille et de Bastia n'a certes rien d'aisé. Dans un contexte où parler d'économie de marché relève de la grossièreté et où un transfert au secteur privé ne saurait être synonyme que de licenciements massifs et de précarité pour ceux qui restent, le retrait de l'Etat du capital de l'opérateur ne pouvait sans doute pas intervenir sans provoquer de conflit.Les propos successifs de Dominique de Villepin, Thierry Breton et Dominique Perben sur le sujet imposent toutefois deux remarques. Premièrement, la rapidité avec laquelle le gouvernement a battu en retraite, remballant son projet de privatisation à 100% pour s'engager à conserver un quart du capital, est venue accréditer la thèse selon laquelle l'arrivée d'investisseurs privés était synonyme de danger pour les salariés. Deuxièmement, à aucun moment n'ont été clairement exprimés les objectifs de la privatisation, au-delà de la nécessité de se mettre en conformité avec les exigences de Bruxelles - qui vient incidemment de souligner que la présence de l'Etat au capital ne serait acceptable qu'à condition d'être limitée et momentanée.Avant que le gouvernement d'un certain Jacques Chirac ne lance à partir de 1986 une première vague de privatisations, le secteur public comptait la bagatelle de 3.000 entreprises et 1,9 million de salariés, soit 9% de la population active. Dans la seule industrie, il représentait plus de 30% des salariés, 30% des exportations et 50% des investissements. Ces entreprises seraient-elles plus performantes aujourd'hui si elles étaient demeurées publiques? Quelle entreprise, au juste, a pâti de son passage au secteur privé: Renault? Air France? La Société Générale? Thomson? Usinor? Qu'en serait-il de leurs besoins de financements publics, et donc des impôts et des déficits?Sans être irréprochable (on pense par exemple au passage de Péchiney sous pavillon canadien), le bilan des privatisations est plus qu'honorable. Faut-il en conclure que toute entreprise publique doit être privatisée? Si elle remplit clairement une obligation de service public et qu'elle est bien gérée, la réponse n'est pas nécessairement positive. La SNCM n'est pas un modèle de bonne gestion: elle a perdu près de 30 millions d'euros en 2004, le trou sera plus important cette année. Cette mauvaise gestion n'est pas le fait des salariés. Peut-être seraient-ils bien avisés de réfléchir à la manière dont leur unique actionnaire public les a servi jusqu'ici.
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