Londres rend hommage à ses morts

Même les deux grandes fontaines de Trafalgar Square ont observé, jeudi 14 juillet à midi, les deux minutes de silence décrétées en mémoire des victimes des attentats du 7 juillet. L'eau a cessé de jaillir au moment même où Londres toute entière (et l'Europe des Vingt-Cinq avec elle) s'arrêtait pour l'occasion. Le recueillement a été général. Des foules se sont réunies notamment devant la station de King's Cross, ainsi qu'à Trafalgar Square, à la City, à Canary Wharf (l'autre grand quartier des affaires) et dans toutes les autres rues et les places qui forment le vaste tissu urbain de la ville. A Fleet Street, ancienne artère de la presse, les trottoirs, silencieux, étaient bondés de gens de toutes les couleurs, les bus et les "cabs" (les taxis londoniens) participant, moteur éteint, au rite de solidarité. Le Lloyd's, le grand marché de l'assurance et un des symboles de Londres, a sonné la Lutine Bell, la cloche qui résonne lors des grandes catastrophes. Toutes les Bourses, à l'image du London Stock Exchange, du London Metal Exchange et de l'International Petroleum Exchange, ont suspendu les transactions. Deux longues minutes chargées d'émotion, au terme desquelles la ville a repris son train-train, comme se réveillant d'une anesthésie. Entouré de leaders religieux et de représentants des services publics, le maire de Londres, Ken Livingstone, était présent à Trafalgar Square devant une grande bannière proclamant "One Nation, one World". Londres a voulu afficher son caractère multi-ethnique et pluri-religieux au cours de cette commémoration qui s'est poursuivie, le soir, par une veillée sur la même place. A partir de dix-huit heures, des milliers de personnes se sont rassemblées à Trafalgar Square pour écouter le témoignage des gens impliqués dans les secours et les appels à la résistance et à la tolérance des leaders religieux ou de personnes issues des différentes communautés de Londres. Pendant tout l'après-midi et jusqu'à neuf heures du soir, les Londoniens pouvaient aussi signer le cahier de condoléances inauguré par le maire. Pour Sakis, un jeune Grec habitant Londres depuis deux ans, cette participation était très importante. "En étant ici et en signant le livre, j'ai voulu établir un lien, une relation entre les victimes des attentats et les personnes vivantes, prouver que Londres se rassemble autour de ses morts et de leurs familles. Les terroristes détruisent la vie et les liens communautaires. Nous, nous en créons d'autres, nous rétablissons en quelque sorte l'ordre des choses". Le défi au terrorisme se poursuivra ce week-end par la musique. A l'initiative du maire Ken Livingstone, un grand concert gratuit - London United - se tiendra ce samedi à Burgess Park, dans le sud de la capitale. De midi au soir, plusieurs artistes, dont les noms doivent être encore dévoilés, se succéderont dans un festival qui ne sera pas sans rappeler, à des nuances près, le Live 8 pour l'Afrique organisé par Bob Geldof la semaine dernière à l'occasion du G8 en Ecosse. Encore une fois, la musique sera au rendez-vous pour une bonne cause. "Nous allons montrer que Londres reste fermement debout dans sa diversité après les événements terribles de la semaine dernière", a lancé Suggs, ancien chanteur de Madness et une figure très populaire du paysage londonien. Les Britanniques suivent par ailleurs de très près les détails d'une enquête - confiée à un policier d'exception, sir Ian Blair (voir portrait ci-contre) - qui semble avancer rapidement. La police a pu établir que les explosifs utilisés dans les quatre attentats (trois dans le métro et un dans un bus) ont été fabriqués au Royaume-Uni et qu'ils appartiennent à la même typologie (acétone peroxyde) que ceux dont s'est servi Al Qaida dans d'autres opérations. Alors que le nombre officiel de morts innocents est monté à 51 (à cause du décès d'un blessé), à quoi s'ajoutent les trois terroristes dont les restes de corps ont été retrouvés, les investigateurs se penchent de plus en plus sur l'environnement dont étaient issus les quatre kamikazes. Il s'agit maintenant de comprendre qui sont leurs complices, qui les a aidés à planifier les attentats et leur a fourni les explosifs. L'enquête se poursuit autant à Londres qu'à Leeds, la ville d'origine de ces poseurs de bombes, où la communauté musulmane locale est elle-même encore sous le choc d'événements que la plupart de ses membres n'auraient jamais imaginés.
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