Antonio Fazio tente de se ménager les bonnes grâces de Berlusconi

Malgré le scandale le mettant en cause pour son rôle dans les Offres publiques d'achat (OPA) sur des banques italiennes, le gouverneur de la Banque d'Italie, Antonio Fazio, s'accroche à son poste. Mais il est désormais évident qu'il ne remplit plus son rôle de banquier central, chargé entre autres de décider avec ses 17 homologues du Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) de la politique monétaire de la zone euro dans son ensemble. Ainsi, mardi après-midi, Antonio Fazio a livré à la Commission parlementaire au budget la traditionnelle évaluation réalisée par la Banque d'Italie du projet de loi de finances concocté par le gouvernment pour l'an prochain. S'il a dressé un sombre tableau de la situation actuelle des comptes publics italiens, les conclusions qu'en tire Antonio Fazio sont loin d'être à la hauteur de son constat alarmant. Le rapport dette publique/Produit Intérieur Brut (PIB) "est destiné à augmenter, inversant ainsi la diminution en cours depuis une décennie", note le gouverneur. "Après dix ans de baisse progressive, le rapport dette/PIB repartirait à la hausse, atteignant 108,2% cette année contre 106,5% en 2004", décrit-il. Au mieux, la dette sera réduite l'an prochain à 107,4% si l'avalanche de privatisations prévue dans le projet de budget est réalisée. Parmi les douze pays de la zone euro, seule la Grèce fait pire que l'Italie, toutes deux dépassant allègrement l'objectif d'un rapport dette/PIB maximum de 60% indiqué dans la Pacte de stabilité européen. Et la dette publique italienne représente pas moins d'un quart de la dette publique totale de la zone euro... En d'autres temps, le même Fazio ou ses estimés prédécesseurs auraient en conséquence tiré le signal d'alarme et exhorté avec virulence le gouvernement à remédier à ce dérapage des comptes publics. Hier après-midi, il n'en a toutefois rien été. "Il est évident que les marchés ont confiance que l'inversion de tendance [c'est à dire la hausse du rapport dette/PIB] est temporaire", a contre toute attente rassuré Antonio Fazio, prenant soin de souligner que les marchés financiers ne s'inquiètent pas de ce dérapage budgétaire. L'agence de notation Standard & Poor's avait pourtant mis en août l'Italie sous "perspective négative", prélude à un déclassement de sa note... Le gouverneur se met ainsi en porte à faux avec la ligne de la BCE, énoncée par son président Jean-Claude Trichet il y a à peine dix jours. "Il est primordial que les budgets à venir traduisent la nécessité d'un assainissement budgétaire progressant à un rythme approprié et qui s'intègre dans une stratégie de réforme globale et bien définie", avait martelé le chef de la BCE, parlant également au nom d'Antonio Fazio. Or, on est bien en peine de trouver une telle stratégie dans la loi de finances 2006 du gouvernement Berlusconi. En fait, Fazio a pris soin mardi de ne pas froisser le chef du gouvernement italien afin d'éviter que Silvio Berlusconi soit tenté d'exiger à nouveau la démission du gouverneur en raison du scandale bancaire des OPA. "Fazio donnera son avis objectif, comme il l'a toujours fait", avait indiqué sans ciller auparavant Silvio Berlusconi, trop content de s'éviter toute remontrance de la Banque d'Italie à six mois des élections législatives. Le gouverneur tente ainsi de préserver son poste, fût-ce au risque de porter atteinte à la crédibilité de l'euro.
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