Les épargnants italiens se mobilisent contre la restructuration de la dette argentine

"Escroquerie", "chantage", "arnaque": l'offre de restructuration de la dette argentine qui s'ouvre aujourd'hui suscite des jugements sévères mais unanimes auprès des 450.000 petits épargnants italiens ayant investi dans des obligations de cet Etat sud-américain. Pour ces investisseurs qui détiennent au total 14 milliards de dollars de la dette argentine, l'échange de titres proposé par Buenos Aires revient à choisir entre la peste et le choléra: s'ils acceptent l'offre, leurs titres seront très probablement échangés dans un rapport d'un titre reçu pour trois apportés, c'est-à-dire une perte sèche de 70% de leur capital initial. Mais les épargnants n'adhérant pas d'ici au 25 février à l'offre que le gouvernement argentin viendra justement défendre la semaine prochaine au cours d'un road-show à Rome et Milan risquent de rester assis sur du papier très difficilement négociable à l'avenir. La Task Force Argentina (TFA), représentant les particuliers italiens ayant souscrit ces emprunts argentins, conseille pourtant de ne pas adhérer à l'offre présentée par le ministre argentin de l'Economie, Roberto Lavagna. Considérant que "les obligations qui ne participeront pas à l'offre d'échange maintiendront intacts les droits à l'origine", Nicola Stock, président de la TFA et de la GCAB (Global Committee of Argentina Bondholders), estime en effet que "l'Argentine devra se remettre à la table des négociations, si l'adhésion, comme nous l'espérons, se révèle insuffisante". Un pari risqué au vu de l'intention de la plupart des investisseurs argentins et institutionnels, notamment américains, d'accepter l'offre. L'objectif de la TFA est "de réduire la période de remboursement des emprunts argentins de 35 ans à 10-15 ans et reconnaître des taux de marché autour de 2%". Buenos Aires propose en effet des emprunts au plus tôt à échéance en 2024 pour des taux bas. Dans l'immédiat, le gouvernement italien et des banques de la Péninsule sont aussi sur la sellette dans cette affaire des "tango-bond". "Le gouvernement ne peut rester spectateur sur les emprunts argentins comme il l'est resté jusqu'à aujourd'hui", tempête l'association de consommateurs Adiconsum, à l'instar de l'ensemble des représentants des détenteurs d'emprunts argentins. Hier, le ministre de l'Economie et des Finances italien, Domenico Siniscalco, était justement entendu sur ce dossier par la Commission des finances de la Chambre des députés. Le président de cette Commission, Giorgio La Malfa, compte bien que le gouvernement de Silvio Berlusconi exercera "toutes les pressions nécessaires" sur Buenos Aires pour modifier l'offre. Domenico Siniscalco a en tout cas vertement condamné les propositions argentines, affirmant qu'il est "évident qu'il n'y a pas eu de véritable négociation de bonne foi". Mais l'Italie à elle seule ne pourrait pas grand chose: "le G7 et le FMI sont en mesure d'exercer la pression nécessaire, que nous ne pouvons faire, nous, unilatéralement", a lancé le ministre.Entre-temps les banques italiennes qui ont placé ces emprunts argentins sont mises en cause, et pas seulement par Roberto Lavagna lui-même. Le gendarme boursier italien, la Consob, a en effet requis "un nombre conséquent de sanctions" contre une banque notamment pour des manquements "dans l'information fournie à la clientèle sur ces produits". D'après Il Sole 24 Ore, les deux banques visées par l'enquête de la Consob sont UniCredit et Banca Intesa. La controverse sur l'offre d'échange de Buenos Aires intervient alors que le Parlement italien examine de nouveau le projet de loi de protection de l'épargne, lancé après les retentissants scandales Cirio et Parmalat. Pour des affaires similaires, son article 27 prévoit d'indemniser automatiquement les petits épargnants via un fonds de garantie, s'il n'y a pas eu suffisamment d'information sur les risques encourus.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.