De Maastricht à Lisbonne

Il aura fallu cinq mois de laborieuses négociations pour que les Vingt-Cinq parviennent enfin à s'entendre sur une liste de "facteurs pertinents" au titre desquels ils sont désormais libres de s'affranchir du plus contraignant des fameux "critères de Maastricht", celui qui limite à 3% du produit intérieur brut le plafond théoriquement autorisé du déficit public.Désormais, un déficit ne sera pas considéré comme excessif s'il franchit cette limite en raison d'un effort exceptionnel en matière de recherche, de "réforme structurelle" ou d'investissement public. Naturellement, la Commission se porte garante du fait que le dépassement toléré sera temporaire et modeste - un déficit à 3,2% ou 3,3%, mais en aucun cas à 4%, a expliqué le ministre belge des Finances Didier Reynders.Le tout sans la moindre trace d'ironie. Alors, qu'il soit permis de rappeler la réalité. Les deux premières économies de la zone euro, l'Allemagne et la France, affichent des déficits publics de plus de 3% de leur PIB depuis 2002. L'une et l'autre ont apporté la preuve qu'il était non seulement possible d'afficher un déficit de 4%, voire davantage, mais que de tels dépassements n'entraînaient aucune sanction. Pour faire bonne mesure, ni l'une ni l'autre ne se conforme à l'autre critère imposant une dette publique inférieure ou égale à 60% du PIB. A vrai dire, neuf des douze pays de la zone euro dépassent ce seuil.En quoi ont consisté les négociations qui viennent de s'achever à Bruxelles et que doivent approuver les chefs d'Etat et de gouvernement au sommet qui s'ouvre aujourd'hui? Elles ont avant tout permis de réécrire a posteriori les règles que l'Union Européenne s'était fixées à elle-même afin de fonder son union économique et monétaire sur des comptes publics sains.L'artifice ne trompe personne, surtout pas la Banque Centrale Européenne qui a manifesté dès hier sa "sérieuse préoccupation". Ce qui justifie cette préoccupation n'est pas le relâchement des règles en soi, mais l'absence d'un motif convaincant.Pourquoi ne pas avoir lié la réforme du Pacte et le fameux agenda de Lisbonne qui vise à faire de l'UE l'économie la plus compétitive au monde d'ici 2010? Pris séparément, aucun de ces deux objectifs n'est réellement crédible. Attaché à un investissement coordonné dans la croissance et l'emploi des Vingt-Cinq, la remise à plat du Pacte de Stabilité aurait pu être l'occasion d'un nouveau départ pour l'Union Européenne.
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