La revanche de la nouvelle économie

En 1999, un patron sans stratégie Internet était le dernier des ringards. Il n'avait rien compris à la révolution imminente; son entreprise courait à sa perte : son activité allait muter, inéluctablement, "online". On rachetait à prix d'or des starts up, on fusionnait en grande pompe (AOL-Time Warner, Vivendi Universal), sur la base de valorisations démesurées des activités en ligne. Quand la bulle a éclaté, le roi est apparu tout nu. Les starts-ups avaient vendu du vent, masquant derrière des promesses de croissance à 2 ou 3 chiffres des pertes abyssales et l'absence de chiffre d'affaires. Il fallait se rendre à l'évidence : les usages évoluaient bien plus lentement qu'annoncés... Les actions des jeunes pousses dévoreuses de cash brûlaient les doigts de leurs actionnaires, parfois des groupes centenaires, qui les cédaient ou les fermaient aussi vite qu'ils s'étaient précipités pour les acheter. Le jean-basket des jeunes patrons surdoués, symbole de la décontraction de la nouvelle économie, était remisé au vestiaire. Les vieux opérateurs télécoms reprenaient la main sur l'accès internet, les boutiques en ligne des commerçants traditionnels dépassaient les purs acteurs internet. La raison du "click & mortar", développement encadré des débouchés en ligne, s'appuyant sur le socle solide d'une activité dans un monde physique bien réel, l'emportait sur la folie passée. Bref, la "nouvelle économie" était ravalée au rang d'illusion collective; les entreprises traditionnelles et leur vieux modèles économiques, avaient encore de beaux jours devant eux. Pendant ce temps, la révolution s'est pourtant poursuivie, souterraine, à la vitesse de la pénétration du haut débit. L'industrie musicale a été la première touchée de plein fouet, par l'explosion des échanges gratuits. Elle n'a toujours pas fini de réinventer son modèle de distribution de la musique et se fait dicter la loi par les grands de l'informatique, Apple, avec son iPod, ou Microsoft, avec ses logiciels de gestion des droits numériques. Le cinéma est désormais visé. On ne sait pas encore si Hollywood sortira indemne de la montée du piratage et de nouveaux modes de consommation comme la vidéo à la demande. Skype, la téléphonie gratuite sur IP, a fait irruption dans un paysage des télécommunications où des opérateurs alternatifs commençaient tout juste à se faire une place aux côtés d'opérateurs historiques, ex-monopoles publics. La généralisation de l'usage de Skype dans le monde menace les recettes des uns et des autres. Courtisé par des groupes de la vieille économie comme News Corp ou Microsoft, il a préféré cédé aux sirènes d'eBay, "pur player" Internet. Dans leur alliance, se dessine de nouveaux modes de consommation et de communication. On n'est plus dans le simple e-commerce, forme électronique de l'ancienne Vente par correspondance. On se revend aux enchères en direct objets, vêtements, voitures... neufs ou d'occasion, entre particuliers, on s'appelle via IP, pour mettre au point les détails de l'échange...Seuls l'envoi ou le chargement du colis empruntent encore des routes réelles. Le renouvellement des modèles économiques a bien commencé.
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