Banque et solidarité

L'idée est belle, généreuse et surtout utile. Désireux de faire feu de tout bois, le Premier ministre vient d'annoncer qu'il souhaitait voir instaurer en France un service bancaire universel, le fameux SBU, et ce dès l'an prochain. C'est peu de dire que les banques ont été surprises par cette annonce, faite en dehors de toute concertation. "Stupéfaites" d'être ainsi placées devant le fait accompli, il leur faut maintenant gérer au mieux une mesure à laquelle elles se sont jusqu'à présent opposées aussi discrètement qu'efficacement. Concrètement, de quoi s'agit-il ? Essentiellement de permettre à chaque Français de disposer d'un compte en banque et de pouvoir effectuer grâce à lui la plupart des opérations de la vie courante (paiements, prélèvements, virements du salaire ou des prestations sociales...). Un service de base donc, dont sont exclus plusieurs millions de nos concitoyens à en croire les associations de consommateurs. Cette population n'est pas homogène et regroupe à la fois les exclus bancaires car mauvais payeurs et les exclus au sens strict du terme, c'est à dire la population en voie de désocialisation, généralement faute d'emploi. Il convient ici de noter que si être privé de compte bancaire est un facteur aggravant de l'exclusion, jamais un chéquier n'a été un gage d'intégration ou d'insertion. La première cause d'exclusion est bien sûr le chômage, les difficultés de logement ou encore le fait d'être privé d'électricité faute tout simplement de pouvoir payer sa facture EDF. Mais bien sûr, rien ne dispense a priori les banques de l'effort indispensable à la lutte contre l'exclusion. Il existe déjà en France un service bancaire de base mais sa mise en oeuvre est suffisamment complexe pour décourager l'immense majorité de la population concernée. Un service bancaire universel doit donc être plus accessible. Doit-il aussi être gratuit? C'est sans aucun doute la principale difficulté à laquelle le gouvernement va se heurter. Les services bancaires sont de plus en plus souvent payants car les banques sont des sociétés commerciales privées et non pas des associations à but non lucratif. Elles sont même devenues expertes dans la tarification des services rendus à leur clientèle. Comme les compagnies pétrolières, elles sont aujourd'hui devenues des championnes de bénéfices. Ce qui accessoirement pourrait leur rendre la tâche un peu plus difficile face aux pouvoirs publics. En effet, comment refuser de fournir un petit effort financier pour lutter contre l'exclusion alors que l'on dégage des milliards de profits? D'ailleurs, depuis le début de la semaine, le discours du lobby bancaire s'est un peu adouci sur la question. Mais on peut s'attendre à des discussions serrées avec le gouvernement. La décision de ce dernier de créer une Banque postale n'a toujours pas été digérée par des banques, dont il ne faut pas sous estimer la capacité de résistance. On se souvient que, convoquées à Bercy par Nicolas Sarkozy pour faire baisser leurs tarifs, elles se sont simplement engagées à favoriser la mise en place de paiements alternatifs. Un engagement tenu et qui se traduit actuellement par la mise en place de nouveaux "packages"... payants. D'ici à ce que l'on invente en France le service bancaire universel payant, il n'y a peut-être qu'un tout petit pas.
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