Accord à l'arraché sur Executive Life

Par latribune.fr  |   |  896  mots
Au terme d'une journée fertile en rebondissements, un accord final a bien été trouvé, mercredi soir, entre le CDR d'une part et la justice américaine d'autre part, permettant de solder définitivement l'affaire Executive Life en ce qui concerne l'Etat français et ses différentes entités. Arraché de haute lutte, cet accord amiable, qui porte sur un montant total de 600 millions de dollars, laisse la société Artémis de François Pinault et l'assureur Maaf seuls face à la justice californienne.Tenu pour probable mardi soir et pour certain mercredi matin, avant de se heurter à un blocage surprise hier dans la journée (lire ci-contre), l'accord mettant un terme au procès Executive Life en ce qui concerne l'Etat français a donc finalement été confirmé mercredi soir. "Au deuxième jour du procès, la justice américaine a accepté le projet de règlement à l'amiable", a annoncé Pierre Denizet, directeur général du Consortium de Réalisation (CDR), la structure publique qui gère les actifs repris au Crédit Lyonnais lors de la déconfiture de la banque publique. C'est la reprise considérée comme illégale de la compagnie d'assurance américaine Executive Life par le Lyonnais en 1991 qui est au coeur de l'affaire actuellement jugée en Californie."Le juge Howard Matz a validé l'accord", a précisé Pierre Denizet, ce qui "met fin à toutes les poursuites" contre le CDR qui "sort de la salle d'audience sans avoir à y revenir". Cette annonce a été confirmée à Paris dans la nuit par le ministère des Finances.Comme on s'y attendait depuis deux jours, le montant total de la transaction à l'amiable porte sur 600 millions de dollars. Lors de la procédure pénale de l'année dernière, le CDR avait déjà versé un acompte de 375 millions de dollars au titre de la procédure civile actuellement en cours. La France devra donc effectuer un versement complémentaire de 225 millions de dollars "pour clore définitivement ces poursuites", a précisé le ministère. L'accord obtenu à l'arraché permet en effet de refermer le dossier en ce qui concerne les pouvoirs publics et leurs différentes entités (Crédit Lyonnais, CDR), dans la mesure où il associe toutes les parties concernées: le Commissaire aux assurances de Californie, l'Attorney General (ministre de la Justice) de Californie et aussi la société Sierra National Insurance holdings Inc. La présence de cette dernière société, rivale malheureuse du Lyonnais lors du rachat d'Executive Life, est cruciale: c'est la perspective de son absence qui avait risqué de compromettre l'accord, hier dans la journée. Au bout du compte, les 600 millions de dollars versés par les Français iront à hauteur de 525 millions au Département aux assurances de Californie et de 75 millions à Sierra.Pour la France, cet accord apparaît comme une bonne solution. Même s'il amène à augmenter de nouveau la facture de l'affaire Executive Life, il permet surtout de limiter la casse. Car la procédure civile risquait potentiellement de déboucher sur une ardoise encore plus conséquente: le département aux Assurances réclamait jusqu'à 3,7 milliards de dollars de restitution des bénéfices et d'intérêts, ainsi que des dédommagements...Cet accord place cependant deux autres acteurs français dans uns situation bien inconfortable: il s'agit d'Artémis, la holding de François Pinault, et de la compagnie d'assurance Maaf. Cette dernière a servi d'intermédiaire lors du rachat d'Executive Life, tandis qu'Artémis a racheté au Lyonnais par la suite la compagnies californienne et son portefeuille de juke-bonds, ce qui lui a permis de réaliser de considérables plus-values. Dès jeudi après-midi, Artémis a fait part de son inquiétude. Dans une interview accordée au journal Le Monde, Patricia Barbizet, directrice générale d'Artémis, estime "extrêmement regrettable que l'Etat (français) ait fait cavalier seul" en signant cet accord amiable avec la justice californienne. "Hier encore, affirme-t-elle, nous avons tenté de joindre le médiateur désigné par le juge dans cette affaire. Mais on nous a opposé une fin de non-recevoir. L'Etat est tombé dans le piège, en considérant qu'il pouvait signer seul. Nous pensons, pour notre part, qu'en restant unis nous aurions été plus forts et que cela aurait sans doute réduit le montant de la facture finale", affirme Patricia Barbizet qui ajoute que la cause d'Artémis est "encore une fois, tout à fait défendable devant le tribunal: nous irons la défendre".Dans l'immédiat, le procès va donc se poursuivre, avec le processus de sélection du jury qui doit commencer aujourd'hui. Côté américain, l'annonce de l'accord amiable n'a pas suscité un enthousiasme général. Les représentants des assurés d'Executive Life, qui espéraient toucher des dommages considérables de la part de la France, sont particulièrement critiques. La présidente de leur association s'est déclarée choquée que "la plus importante fraude financière de l'histoire de la Californie se soit réglée pour si peu et sans même combattre". Les représentants des assurés prennent particulièrement mal le montant de la somme obtenue - 600 millions de dollars - comparé aux 3,7 milliards initialement réclamés.