Marionnaud Parfumeries : jusqu'où ira la chute ?

Après la douche froide qu'a réservée Marionnaud aux marchés financiers, la dégringolade du titre est-elle terminée? Rien n'est moins sûr. Le groupe présidé par Marcel Frydman a en effet révélé de nombreuses "erreurs comptables" à l'occasion de la publication de ses résultats du premier semestre (publiés avec deux mois de retard, et sous la pression de l'Autorité des Marchés Financiers). Il assure que, désormais, "les comptes sont plus blancs que blancs", alors que la remise en ordre a fait plonger les comptes semestriels du groupe dans le rouge, à 78 millions d'euros, pour la première fois depuis son introduction en Bourse en 1998.Pourtant, pour le marché, il en faudra un peu plus pour convaincre que Marionnaud est revenu sur la bonne voie. Et la sanction de plus de 30% infligée à la reprise de cotation du titre, le 21 décembre, après dix jours de suspension, risque de ne pas suffire à remettre le cours de Marionnaud à un niveau de valorisation satisfaisant pour les investisseurs.Perte de confianceEt pour cause. Tout d'abord, le groupe a perdu la confiance du marché. Les investisseurs ont été d'une part échaudés par les retards dans les publications, mais surtout ils ont été surpris par l'ampleur des "corrections d'erreurs" faites par Marionnaud. Ces "corrections" pèsent ainsi à hauteur de 93 millions d'euros dans les comptes du groupe.Elles concernent, dans le détail, des erreurs dans le calcul des provisions au niveau des ristournes et participations publicitaires reversées par les fournisseurs (pour 54,8 millions d'euros) sur les exercices 2002 et 2003. Les erreurs concernent également, à hauteur de 17,8 millions d'euros, des dépréciations de stocks liées aux modifications de répartition des ristournes et des participations publicitaires. Par ailleurs, 9,5 millions d'euros sont relatifs aux corrections de la valorisation des stocks des filiales étrangères. Puis, les corrections touchent pour 5,1 millions d'euros la provision pour risque de non conversion des Océane. Et pour finir, 2,6 millions d'euros concernent une créance douteuse.Malgré cette remise à plat, le doute persiste. "Avec la mise en lumière de ces différentes erreurs passées, peut-on véritablement penser que les comptes sont totalement nettoyés? Ce n'est pas évident", s'inquiètent ainsi les analystes de CM CIC. D'autant que des risques pèsent encore sur une nouvelle modification des comptes: "il n'est pas exclu de penser que dans le cadre du passage aux normes IFRS (avec l'attention qui sera portée aux incorporels) les commissaires aux comptes ne soient de nouveau amenés à 'rectifier' des erreurs du passé, même si Marcel Frydman estime que ce passage ne devrait pas avoir de grosses conséquences", ajoutent les analystes de CM CIC.Risque sur le bilanLes révisions des comptes semestriels de Marionnaud laissent aussi planer un doute sur les relations qu'entretient le groupe avec ses banques. En effet, les corrections impactent la génération de liquidités du groupe et l'équilibre de son bilan financier. "D'après (le groupe), les corrections qui dégradent le résultat ne génèrent aucune sortie de trésorerie. Mais nous considérons au contraire que ces ajustements mettent la société dans une situation délicate vis-à-vis des banques (covenants bancaires) en dégradant fortement la capacité d'autofinancement de l'exercice et les capitaux propres ainsi que l'Ebitda (excédent brut d'exploitation). Nos gearing (rapport dettes sur fonds propres) 2004 et 2005 estimés sont de 117% et 103%", expliquent ainsi les analystes de Fideuram-Wargny.En effet, la situation financière de Marionnaud est d'autant plus alarmante que le groupe s'est engagé auprès de ses banques créancières à ce que sa dette financière ne dépasse pas le niveau de ses fonds propres. "L'entreprise devrait selon nous devoir trouver rapidement un accord avec ses banques afin d'assurer le maintien de son financement", ajoutent les analystes. La situation pourrait même contraindre Marionnaud à lancer une augmentation de capital, soulignent pour leur part les spécialistes de Dexia Securities. En tout état de cause, elle pourrait augmenter ses frais financiers.Marionnaud ne cache d'ailleurs pas ses inquiétudes, puisque le groupe a demandé à ce que des mandataires soient nommés par le Tribunal de Commerce pour mettre en place la restructuration de sa dette, selon les informations du Figaro.Valorisation revue à la baisseAinsi, avec autant d'éléments négatifs pesant sur le groupe, le marché aura encore bien du mal à évaluer la vraie valeur de l'action. Celle-ci, qui s'est effondrée de 46 % depuis un an, est revenue à ses niveaux d'il y a six ans. C'est que les analystes, plus méfiants que jamais, ont massivement revu à la baisse leurs estimations de bénéfice par action.Dexia, par exemple, a abaissé de 70% ses estimations de bénéfice par action pour l'exercice en cours et de 56,8% pour 2005. Société Générale a revu à la baisse ses prévisions de résultat net par action de 44% en moyenne pour 2004 à 2006, et ramené son objectif de cours à 10 euros, contre 29,50 précédemment. Pour sa part, le courtier KBC a ramené son objectif de cours à 10 euros contre 26 auparavant. Des révisions sévères qui laissent entendre que la baisse du titre, qui cotait encore plus de 15 euros au lendemain de sa dégringolade du 21 décembre, n'est peut-être pas terminée... A moins que l'aspect spéculatif ne prenne le dessus, tandis que le titre fait désormais figure de proie facile. Ainsi, l'action a progressé de près de 22%, le 27 décembre, alors que le groupe de distribution belge Distripar, détenu par l'homme d'affaires Albert Frère, a annoncé être entré à hauteur de 5% du capital du groupe familial. En outre, la présence d'Albert Frère pourrait aider Marionnaud, dont le capital reste assez difficile d'accès, à renégocier ses prêts avec les banques.
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