Les rachats d'actions, crème de beauté de L'Oréal ?

L'Oréal rime avec croissance. Depuis vingt ans, le géant français des cosmétiques a enregistré chaque année une croissance à deux chiffres de son bénéfice net par action. En dix ans, son bénéfice net opérationnel a plus que triplé, pour atteindre 1,6 milliard d'euros en 2004. Preuve de son dynamisme, son chiffre d'affaires a aussi doublé sur la même période. En Bourse, ces performances se sont traduites, depuis dix ans, par une hausse de 300% du cours de la société.Sauf qu'en ce début d'année 2005, L'Oréal s'essouffle. "Nous pensons que l'action L'Oréal sera sous pression dans les semaines à venir, à la suite d'un très faible premier trimestre 2005", pronostiquaient ainsi les analystes de Lehman Brothers dans une note datée du 22 avril 2005. "L'action sera pénalisée par le manque de visibilité sur les ventes dans le marché européen", ajoutent les spécialistes.Ralentissement de la consommation en EuropeEt pour cause. L'Oréal, à la plus grande surprise du marché, a déçu au premier trimestre. Le groupe a enregistré une croissance (à périmètre comparable) de seulement 3,1% alors que les analystes tablaient sur une croissance organique de 6,1% sur les trois premiers mois de l'exercice.Au premier trimestre, la division professionnelle a ainsi progressé de 3,5%, tandis que la division grand public croissait de 3,4%. Les produits de luxe, quant à eux, ont reculé de 0,3% sur un an. L'Oréal a justifié cette déception par la morosité de la consommation, l'attentisme des distributeurs spécialisés et l'effet du décalage de lancements de produits, repoussés au deuxième trimestre. Mais le géant des cosmétiques a beau vouloir rassurer ses actionnaires, le doute persiste."Le groupe pense que l'attentisme des distributeurs va s'estomper sur l'année et que ses lancements apporteront une dynamique positive alors que la consommation des ménages pourrait demeurer médiocre dans plusieurs pays européens", rappellent dans une note les analystes de CIC Securities, qui affichent leur prudence pour l'avenir. "Pour 2005 et 2006, nous avons réduit nos prévisions de croissance du chiffre d'affaires organique à 5,5% et 6% respectivement, contre 7% initialement", affirment pour leur part les analystes de Lehman Brothers.DoutesLes analystes craignent que L'Oréal n'arrive pas à atteindre ses objectifs de croissance au vu des premiers chiffres de l'année. "Il y a un scepticisme croissant concernant la capacité de L'Oréal à accélérer la croissance durant le reste de l'année 2005 afin d'arriver à une croissance à périmètre constant (croissance organique) de 6,2% sur l'année", estiment les experts de Lehman Brothers."L'Oréal semble confiant dans le fait que la croissance sera similaire pour 2005 à celle enregistrée en 2004. C'est à dire 6,2%. Etant donné que cela impliquerait une croissance de 7,2% lors des trois autres trimestres, notre opinion diffère de celle de L'Oréal", ajoutent les analystes de Morgan Stanley, qui tablent sur une croissance organique de 5,3% sur l'ensemble de l'année. "La croissance des ventes a clairement connu une décélération tant dans les divisions que dans les zones géographiques. Un autre risque à venir sur les ventes de L'Oréal réside dans une plus grande détérioration des ventes liées au tourisme, qui pourrait affecter la division luxe du groupe", soulignent les analystes.Rachat d'actionsDu coup, les spécialistes de la banque d'affaires américaine estiment que "la combinaison de ces deux éléments aura pour effet de laisser inchangé le bénéfice net par action en 2005". Ils ont en conséquence abaissé de 4% leur estimation de bénéfice net par action pour l'année en cours, tablant sur un bénéfice net par action de 2,18 euros contre 2,26 euros initialement prévu. Les experts de Lehman Brothers en ont fait autant en baissant leurs estimations de bénéfice par action pour 2005. Faut-il pour autant redouter que la longue série de croissance à deux chiffres du bénéfice net par action prenne fin? Rien n'est moins sûr. Certes, L'Oréal n'est plus aussi à l'aise qu'avant pour annoncer ses objectifs de bénéfice net par action. Mais il garde dans ses caisses 266 millions d'euros dédiés à un programme de rachat de titres (représentant 0,7% du capital, avec 60 euros). "Il peut les utiliser d'ici juin 2005", expliquent les analystes de CIC dans une note."Le groupe peut mettre en oeuvre un deuxième plan de rachat de titres au deuxième semestre, portant sur 3% du capital, suivant nos calculs", ajoutent les spécialistes de CIC. De plus, il peut mettre en oeuvre un nouveau plan de contrôle des coûts si la conjoncture est plus difficile. "L'Oréal dispose d'un trésor de guerre de plus de 9 milliards d'euros, résultant de sa participation dans Sanofi. En outre, il pourrait utiliser cet argent pour faire des acquisitions pour renforcer son leadership mondial des cosmétiques, en Asie ou encore en Amérique d'ici mi-2006", concluent les analystes. De quoi relancer, à terme, la dynamique de croissance. En attendant, le titre, lui, risque de rester sous pression, dans un contexte incertain.
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