"Le virage stratégique d'Eiffage est plus spectaculaire que celui de Vinci"

latribune.fr- Avec les rachats respectifs d'ASF et d'APRR, qui de Vinci ou d'Eiffage opère le plus grand virage stratégique ?Charles-Edouard Boissy- Dans les deux cas, ces opérations sont très importantes. Mais celle d'Eiffage est plus spectaculaire. Jusqu'à maintenant, l'activité de concession d'Eiffage était quasi inexistante puisqu'elle se résumait au viaduc de Millau depuis un an. Avec le rachat d'APRR, Eiffage va passer du statut de groupe de BTP à celui de concessionnaire. De son côté, Vinci était déjà très actif puisqu'il détenait 23% d'ASF et 65% de Cofiroute. Son profil de groupe peu endetté lui a permis de racheter seul la totalité du capital d'ASF. A la différence d'Eiffage qui, vu sa petite taille, a dû partager APRR en faisant appel à la banque australienne Macquarie.Quelle va être l'évolution de la part des concessions autoroutières dans leurs activités ?En 2005, la contribution des concessions d'Eiffage est seulement de 30 millions d'euros sur 400 millions d'euros d'opérationnel. L'année prochaine, grâce à l'acquisition d'APRR, l'activité concession représentera 700 millions d'euros sur 1,1 milliard d'euros d'opérationnel. APRR va ainsi représenter 70% du résultat opérationnel d'Eiffage. Pour Vinci, l'évolution sera moins importante. En 2006, les autoroutes représenteront 1,8 milliard d'euros sur 2,7 milliards d'euros d'opérationnel. Elles passeront ainsi de 40% à 70% de l'opérationnel grâce au rachat de la part de l'Etat dans ASF.Pourquoi Vinci et Eiffage ont-ils souhaité se diversifier dans les autoroutes ?Ces deux groupes veulent sécuriser leurs cash-flows à moyen terme. De cette manière, ils veulent réduire l'impact des récessions économiques sur leurs métiers de la construction. Dans les années 90, le secteur du BTP a régulièrement subi des variations de cycles. Les autoroutes permettent de générer des revenus réguliers et surtout une forte rentabilité. La marge opérationnelle varie entre 30% et 40% contre des marges de 4% à 5% dans la construction. Par ailleurs, les autoroutes vont permettre à Vinci et Eiffage de maîtriser totalement la chaîne de valeur entre la construction et l'exploitation.Les participations de l'Etat dans ASF et APRR ont-elles été payées trop cher ?Oui, les prix sont élevés mais en ligne avec ceux du secteur si nous les comparons avec l'Italien Autostrade, l'Espagnol Abertis ou encore le Portugais Brisa. Ces prix ne sont toutefois pas scandaleux. Si on prend en compte l'importante génération de cash-flow à venir, ces prix se justifient. L'apport de cash sera supérieur à la dette contractée. Ces acquisitions sont de toute façon de bonnes opérations, et la Bourse va dans le même sens.A ce titre, comment vont évoluer les cours de Bourse de Vinci et d'Eiffage ?A long terme, ils vont augmenter d'autant plus que leurs primes de risque vont diminuer. Surtout celle d'Eiffage puisque le groupe se lance dans le métier plus sûr des concessions. En outre, le cours d'Eiffage va s'apprécier et suivra une phase de rattrapage par rapport à Vinci. A court terme, nous visons un objectif de cours de 80 euros pour Vinci (aujourd'hui 72 euros) et de 95 euros pour Eiffage (contre 85 euros).A terme, peut-on imaginer un rapprochement entre ASF et Cofiroute, les deux filiales autoroutières de Vinci ?Les contrats de concessions sont signés séparément. Une fusion au niveau juridique est donc difficile. Par ailleurs, les coûts de développement et de pilotage seront remontés dans la structure de Vinci Concessions. Par conséquent, un rapprochement n'aurait pas beaucoup de sens et ne serait pas fondamental. De toute façon, il n'y aura pas d'accord quelconque entre Cofiroute et ASF avant 2007 pour des raisons fiscales. Il faudrait également que Vinci rachète les minoritaires de Cofiroute qui sont détenus par Eiffage...
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