Mai, mois de la capitulation ou de l'armistice ?

"Sell in May and go away !" - vendez en mai et fuyez: l'adage a la vie dure à Wall Street. Tous les experts en stratégie des grandes banques tentent de décortiquer les statistiques boursières dans l'espoir d'y puiser un enseignement infaillible. Las ! Les chiffres peuvent mentir et chacun, de l'ours baissier ("bearish") au bouillant taureau haussier ("bullish"), en extrait une règle de conduite aux fondements prétendument mathématiques. Dès les premiers jours de mai, l'expert de JP Morgan a rendu les armes: "nous mettons un terme à notre histoire d'amour avec les actions". Résistant à tous les soubresauts du marché, la banque américaine avait conseillé à ses clients, sans faillir depuis août 2002, de donner un poids prépondérant aux actions dans leur portefeuille. Elle vient de changer son fusil d'épaule. Le stratège en chef a sonné la retraite et commandé de lever le camp des actions pour trouver refuge dans celui du cash. Un abandon destiné à limiter les pertes: l'expert croit que le niveau atteint par le S&P 500 début mars dernier, son plus-haut depuis juillet 2001, constitue le pic du marché haussier. Armé de tableaux et de graphiques, il déploie une démonstration implacable: d'ici à la fin de l'année, les bénéfices des entreprises américaines auront progressé à un rythme plus rapide que la moyenne depuis 40 mois, alors que les cycles durent en moyenne 19 mois, selon les statistiques des 70 dernières années! Ils ne devraient pas croître ou à peine l'an prochain. Alors, courage, fuyons! Avant que les investisseurs ne reportent tous leur attention sur ces perspectives 2006 maussades... Un ours mal léché? "Il est trop facile d'être baissier ("bearish") en ce moment, avec les indices proches de leurs plus-bas annuels, le ralentissement de l'activité économique et la remontée de l'inflation", lui rétorque son homologue de Lehman Brothers. Lui ne sonne pas le glas de la hausse mais le début d'une ère nouvelle. Les indices mondiaux reflètent des anticipations de moins de 14 fois les bénéfices de l'an prochain, le multiple le plus bas jamais vu depuis l'été 1990! Depuis 1988, le ratio moyen est de 17 fois les bénéfices. Conclusion limpide: le marché intègre déjà une baisse de 20% des profits. L'expert de Lehman s'en réjouit: "les investisseurs particuliers ont commencé à vendre les actions américaines - un signe avant-coureur de capitulation. Le marché est proche d'un plancher." Voici le temps de l'armistice: le rebond est au coin de la rue. Préparez-vous à foncer... Qui croire? Comment départager l'ours du taureau? L'équipe de Smith Barney nous apporte une réponse de Normand appuyée sur une autre batterie de statistiques dans son étude "Sell In May ? Pas si vite !" Certes, il est indéniable qu'en milieu d'année, de mai à septembre, les marchés se traînent. Bien souvent faute de combattants. Pour autant, impossible de dégager une ligne claire depuis 1950! Neuf fois sur 55, la baisse du S&P 500 au premier trimestre s'est poursuivie dans les mois d'été, mais elle a précédé un rebond à 12 reprises... Inversement, un démarrage en fanfare s'est émoussé dans 9 occurrences mais s'est au contraire intensifié 25 fois... Moralité, en mai, le stratège fait ce qu'il lui plaît avec les chiffres...
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