L'ordinateur "low cost" et le licencié d'IBM

L'ordinateur low cost est arrivé. Il est indien et a été dévoilé il y a quelques jours à New Dehli. A l'exception du quotidien Libération, la presse française n'a pas fait grand écho de l'événement. Et pourtant: cet ordinateur pourrait bien annoncer l'entrée de l'industrie informatique dans une ère nouvelle. Car, s'il a été conçu par et pour les Indiens, ses atouts - simplicité d'usage et petits prix - pourraient en faire un concurrent redoutable sur tous les marchés. Développés par l'entreprise de Bengalore Encore Software, avec l'aide de fonds publics indiens, le SofComp et sa version portable le Mobilis seront vendus dans quelques mois autour de 180 euros. La version portable est livrée dans un étui qui s'ouvre pour servir de pupitre et contient un clavier déroulant. Comme il se doit, les deux machines sont équipées de logiciels libres. Elles réunissent les fonctions de base d'un PC: traitement de texte, tableur, messagerie, navigation Internet, traitement de l'image et du son... Pour ce prix là, elles n'ont pas de disque dur mais une simple carte mémoire. On peut, le cas échéant, les relier à un disque dur externe... mais on change alors d'économie. Le SofComp-Mobilis a été pensé pour la réalité indienne. Par exemple, sa consommation d'énergie est très faible, et même un analphabète peut l'utiliser. Non seulement les fonctions sont activables via des touches bien identifiées mais il est doté d'un système de reconnaissance vocale et sait "lire" à haute voix un texte ou une page sélectionnée sur Internet. Il "parle" déjà quatre langues: l'anglais, l'hindi, l'ourdou et le tamoul! Pour tenir le prix annoncé, Encore estime qu'il lui faut produire au moins 50.000 unités pour le SofComp, et 100.000 pour le Mobilis. L'objectif semble raisonnable: le marché du PC indien a fait un bond de 29% en un an, mais n'atteint pas encore 5 millions d'unités. Dans un pays d'1 milliard d'habitants, il y de la marge... Et surtout, ce PC pour pays émergent a sans doute un avenir bien au delà des frontières indiennes. Des entreprises américaines s'y intéressent déjà pour en faire l'unité centrale contrôlant des systèmes d'alarme par exemple. Il semble aussi fait pour conquérir les foyers occidentaux qui n'ont pas encore de PC - près d'un foyer français sur deux tout de même. Avec lui, les handicapés du "mulot", les laissés-à-quai de la navigation Internet et les budgets serrés n'auront plus de raison de rester de l'autre côté de la frontière numérique. Il peut aussi être le deuxième ou le troisième poste qu'on destine aux enfants d'un foyer équipé. Voire, pour peu qu'on le gonfle avec un disque dur, le successeur du poste principal. Le consommateur lambda pourrait bien se lasser de changer de machine tous les quatre ans, pour cause d'obsolescence du système d'exploitation, et finir par réaliser qu'il utilise à peine le quart de la puissance et des fonctionnalités des machines qu'on lui vend. D'ailleurs, si le SofComp est issu d'un pays "pauvre", il s'inscrit dans une tendance de fond de l'industrie du PC. Hector Ruiz, le PDG du fabricant de puces AMD, estimait, il y a quelques jours, dans une interview en ligne sur ZDNet, qu'il "n'est pas du tout déraisonnable d'envisager un portable à 100 dollars" d'ici à trois ans. Indien ou pas, l'ordinateur low-cost est donc à nos portes. Et il sera vraisemblablement fabriqué en Asie. IBM, qui vient de céder sa division PC au chinois Lenovo, annonce 13.000 suppressions d'emplois, en Europe, Amérique du Nord et Japon. Mais les futurs licenciés de Big Blue n'ont pas à s'inquiéter, on ne les laissera pas tomber: dans la lignée du PC pour étudiant à 1 euro par jour, on pourra toujours instaurer le PC à 100 euros pour équiper les chômeurs en soutien de leur recherche d'emploi. Avec en prime, un transport en Logan s'ils décrochent un entretien d'embauche.
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