La Russie décrète un blocus de la Géorgie

Lorsque Moscou avait très médiatiquement débusqué en janvier dernier un "réseau d'espion britanniques" oeuvrant dans la capitale russe, Tony Blair avait haussé les épaules. Mais lorsque c'est son tour d'être accusé, Moscou sort sa grosse artillerie économique: un blocus total de la Géorgie depuis hier matin. Tous les liens aériens, terrestres et maritimes sont suspendus jusqu'à nouvel ordre en dépit du geste de Tbilissi consistant à libérer les "espions" russes. Moscou cherche ainsi à frapper la chétive économie géorgienne, qui ne représente que 1% du PIB russe. Selon la Banque Mondiale, un quart des géorgiens vivraient en dessous du seuil de pauvreté fixé à deux dollars par jour. L'industrie ne représente que 20% du PIB tandis qu'une large partie de la population reste dépendante de l'agriculture.Visiblement, Tbilissi anticipait une telle tournure des évènements depuis l'interdiction russe en mars sur les vins et eaux minérales géorgiennes pour "motif sanitaire". Le boycott de ces deux produits - principales exportations géorgiennes vers la Russie - lui aurait fait perdre entre 0,5 et 1 points de croissance, selon la Banque Centrale Géorgienne. Depuis, Tbilissi se dépêche de diversifier ses partenaires économiques. D'après les statistiques géorgiennes, les exportations vers la Russie sont tombées de 43 millions à seulement 10 millions de dollars durant le 1er trimestre 2006 tandis que le volume total des exportations a lui augmenté de 221 à 249 millions de dollars, dont 119 en CEI. Le blocage des transferts financiers que souhaite mettre en place Moscou s'avère plus délicat pour la Géorgie. Les 300.000 membres de la diaspora géorgienne en Russie envoient chaque année à leurs parents des sommes qui représentent un montant considérable pour la petite économie. 1,24 milliard de dollars ont été transférés ainsi en 2005. Leur blocage pourrait entraîner des pertes représentant jusqu'à 5% du PIB géorgien. Dans l'autre sens, l'essentiel des 353 millions de dollars exportés de Russie vers la Géorgie concernent des livraisons d'énergie. En raison de l'interconnection des réseaux électriques, une coupure du courant à la Géorgie laisserait dans la nuit le principal (et l'unique) allié de Moscou dans le Caucase: l'Arménie. Moscou peut augmenter les tarifs du gaz jusqu'à des niveaux européens (c'est-à-dire multiplier par trois la facture) afin de grignoter 2% supplémentaire du PIB géorgien. Mais Tbilissi affirme avoir déjà trouvé la parade. Le pays a cessé complètement début août ses importations d'électricité russe et promet de n'acheter que du gaz en provenance d'Azerbaïdjan à partir de 2007, lorsque la branche gazière du pipeline BTC entrera en fonction. La main lourde de Moscou confortera certainement dans leur opinion ceux - de plus en plus nombreux en occident - qui estiment que Moscou utilise son énergie comme arme politique et risque de porter un coup supplémentaire à l'image internationale du pays, déjà médiocre. Pour l'heure la crise est suivie avec prudence par l'Union européenne mais une dégradation de la situation pourrait obliger les Européens à hausser le ton en faveur de la petite république.
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