Volkswagen met la pression sur PSA pour obtenir le départ du patron de Faurecia

L'affaire Faurecia risque d'avoir un effet boomerang sur l'équipementier français. Aujourd'hui, celui-ci réalise plus d'un quart de son chiffre d'affaires outre-Rhin. Le groupe Volkswagen à lui seul a totalisé 22,4% de ses ventes en 2005. "C'est une grosse tragédie pour la filiale allemande. Pour les prochains appels d'offre, les constructeurs vont être méfiants" estime Ferdinand Dudenhöffer, spécialiste du secteur auto et professeur de marketing à l'université de Gelsenkirchen. L'hebdomadaire Der Spiegel a révélé lundi que le parquet de Francfort soupçonnait des salariés du groupe Faurecia d'avoir versé pendant des années plusieurs millions d'euros au total en dessous de table à des responsables des achats de Audi et Volkswagen. Depuis la liste ne fait que s'allonger. Le Parquet de Munich a reconnu mardi qu'il enquêtait également contre des salariés de BMW. D'autres équipementiers automobiles sont aussi dans le collimateur de la justice allemande. Les sommes visiblement versées par le groupe français semblent toutefois dépasser les records. Faurecia, qui emploie plus de 10.000 salariés en Allemagne, soit un sixième de ses effectifs totaux, fournit également des pièces à Opel, Ford et DaimlerChrysler. Pour l'instant, 20 personnes sont déjà concernées par l'enquête, confirme t-on au Parquet de Francfort, dont quatre de chez Faurecia. Hier, le procureur a même reconnu indirectement qu'il enquêtait aussi contre Pierre Lévi, son PDG. Certains salariés soupçonnés d'avoir organisé les paiements auraient indiqué pour leur défense que les dirigeants français, et notamment son président, étaient au courant de l'affaire. Un fax rédigé à la main par un salarié de Faurecia en ferait témoignage. Les éléments sont visiblement suffisamment précis pour que Volkswagen ait décidé hier de porter plainte contre "tous ceux qui ont porté préjudice au groupe". Et de préciser dans son communiqué que la plainte visait des salariés à l'intérieur de l'entreprise mais également chez les partenaires commerciaux. Preuve de sa colère, le président de Volkswagen, Bernd Pischetsrieder a envoyé au président de PSA, Jean-Marie Folz, une lettre indiquant que dans une telle situation, "la coopération ne pouvait être que difficile". Autant dire qu'il ne veut plus travailler avec Pierre Lévi. L'affaire a été dévoilée par les services fiscaux qui ont noté des gros mouvements d'argent en espèces en contrôlant les comptes et en ont informé dès l'année dernière la justice qui a aussitôt ouvert une enquête. Les montants distribués ne sont pas anodins puisqu'il s'agirait de sommes allant jusqu'à 800.000 euros par an. Les versements ont visiblement démarré en 1998. Deux salariés de Volkswagen et Audi sont toujours en détention provisoire à Francfort, ceux de Faurecia ayant été relâchés, précise t-on à Francfort. Un ex-salarié de BMW qui aurait encaissé de plusieurs sous-traitants, est aussi en garde à vue depuis l'an passé. Le scandale en tout cas tombe mal pour Faurecia aujourd'hui pointée du doigt par tous les media allemands. Sa crédibilité auprès des constructeurs auto allemands et des autres équipementiers est en chute libre. Surtout depuis qu'il semble que Paris était au courant. "La crédibilité de Pierre Levi est en jeu. Si les soupçons sont confirmés, cela aura forcément des conséquences difficiles pour l'équipementier" estime un expert automobile. Les fabricants allemands sont de plus en plus déterminants pour la filiale de PSA. Avec les marques Audi, BMW, Mercedes et Volkswagen, le groupe, deuxième au classement européen et neuvième dans le monde, empoche au total plus de 30% de son chiffre d'affaires. En présentant les résultats 2005, Pierre Levi avait reconnu un fort recul de ses ventes avec les constructeurs français qui avait pu être compensé par une croissance hors Europe et de meilleures performances notamment avec Volkswagen (+ 6,6%), BMW (+ 5,3%) et DaimlerChrysler (+5,2%). L'enjeu est également important pour l'emploi. Faurecia, spécialisé sur les sièges, les cockpits, les portes, les modules acoustiques, les blocs avant et les échappements, compte en Allemagne 28 unités de production et huit centres de recherche. "Les constructeurs sont responsables de cette évolution" indique toutefois Wolfgang Meinig, un autre expert du secteur. "Ils ont pressé le citron des équipementiers ces dernières années, ce n'est pas étonnant qu'on en soit arrivé à de tels dérapages."
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