Alitalia : Air France-KLM proche du rachat après le rejet par la justice italienne de la requête d'Air One

Par latribune.fr  |   |  774  mots
La justice italienne a rejeté mercredi soir une première requête de la compagnie Air One visant à obtenir la suspension des discussions exclusives de fusion entre le transporteur franco-néerlandais et Alitalia. Air One a l'intention de faire appel auprès du Conseil d'Etat.

L'horizon s'éclaircit pour Air France-KLM dans son projet de rachat de la compagnie aérienne italienne Alitalia. Mercredi soir, la troisième section du Tribunal administratif du Latium (Rome) a en effet rejeté, après plus de trois heures de délibéré, le recours de la compagnie concurrente Air One contre la décision du gouvernement italien d'engager des négociations exclusives avec la compagnie franco-néerlandaise pour lui céder 49 % d'Alitalia.

Les négociations entre Alitalia et Air France, en cours depuis la mi-janvier, peuvent donc se poursuivre, une offre ferme de rachat de la part de compagnie franco-néerlandaise étant attendue d'ici le 14 mars. L'avocat d'Air One, maître Clarinzi avait pourtant plaidé que les négociations exclusives accordées à Air France-KLM étaient une violation des principes régissant la cession de biens publics, en l'occurrence les parts de l'Etat dans la compagnie nationale aérienne Alitalia.

Dans son arrêt le tribunal administratif a notamment mis en avant "l'absence d'éléments signalant le caractère irréparable du dommage" causé par ces négociations exclusives. L'Etat italien, c'est-à-dire le nouveau gouvernement issu des élections des 13 et 14 avril prochains, doit encore prendre la décision formelle de vendre ses parts dans Alitalia. "Nous avons l'intention de faire de toute façon appel du jugement auprès du Conseil d'Etat pour faire valoir notre point de vue: notre projet pour Alitalia reste prêt, solide et à disposition de l'Italie" a réagi mercredi après le jugement Air One.

Mais cela ne semble pouvoir retarder la prochaine échéance d'une offre formelle d'Air France-KLM pour le rachat d'Alitalia. Air One est cependant aguerrie dans ces batailles juridiques contre des concurrents, son équipe d'avocats étant réputée pour ces recours. Pour Air One, deuxième compagnie aérienne italienne après Alitalia, ce recours contre les négociations exclusives octroyées à Air France était un baroud d'honneur pour bloquer, ou seulement retarder le rachat d'Alitalia par sa concurrente française.

Depuis l'annonce de la privatisation d'Alitalia en décembre 2006, le patron d'Air One, Carlo Toto échafaude des plans pour fusionner sa compagnie aérienne née en 1995 à la compagnie nationale. Mais après des mois de rebondissements, notamment le retrait d'Air One de l'appel d'offres pour la vente d'Alitalia en juillet dernier, le management d'Alitalia et l'Etat actionnaire avaient fini par prendre fait et cause pour une cession à Air France. Quitte à "encaisser" que la compagnie française renonce au hub de l'aéroport de Milan-Malpensa pour ne garder que la plate-forme de l'aéroport de Rome-Fiumicino. Depuis Carlo Toto n'a de cesse de battre l'estrade pour qu'Alitalia soit "confiée à une société italienne et gérée entièrement en Italie".

Son jeu sur la fibre patriotique n'a fonctionné que partiellement. Certes, soutenu activement par la première banque du pays, Intesa Sanpaolo, Carlo Toto a réussi à entretenir parmi les entrepreneurs du Nord de l'Italie l'idée d'une alternative à la cession d'Alitalia au géant franco-néerlandais. Mais en l'absence d'une offre formelle de reprise de sa concurrente italienne, Air One n'a pas obtenu un net soutien des dirigeants politiques soucieux de défendre l'aéroport de Malpensa. Ainsi la semaine dernière, la maire de Milan, Letizia Moratti, proche de Silvio Berlusconi, a savamment évité de soutenir Air One.

"Que le gouvernement fasse ce qu'il veut et vende Alitalia à Air France ou Air One, moi je ne m'immisce pas dans ce choix. Rome doit seulement séparer le destin d'Alitalia de celui de Malpensa, mais on ne peut décider à Paris comment se déplaceront les Italiens" avait-elle déclaré dans un entretien à La Repubblica. La rumeur court qu'Air France, maintenant que le recours d'Air One a échoué, ferait des concessions sur la présence d'Alitalia (en cas de rachat par le groupe franco-néerlandais) de Malpensa afin de s'assurer le feu vert d'un nouveau gouvernement de droite dirigé par Silvio Berlusconi, dont les partisans militent activement pour cet aéroport.

Le vice-président d'Air France-KLM, Leo Van Wijk a cependant déclaré, dans le Wall Street Journal, que "si le hub de Malpensa n'est pas réduit de façon significative, nous ne voyons pas de raison de racheter Alitalia". Il a aussi précisé qu'un accord pour la reprise d'Alitalia nécessitera de la part d'Air France "plusieurs milliards d'euros, environ trois milliards pour une période de cinq à six ans".

Dans l'immédiat, Air France devrait recapitaliser Alitalia d'ici l'été prochain à hauteur d'au moins 750 millions d'euros pour lui éviter la faillite. Alitalia perd en effet un million d'euros par jour en moyenne.