"Fidelio" flirte avec Kafka à Strasbourg

L'opéra de Ludwig van Beethoven est ici pertinemment mis en scène. La distribution fait clairement entendre cette histoire de l'épouse travestie Leonore/Fidelio qui cherche à libérer homme de la prison.

Andreas Baesler, metteur en scène de Fidelio à Strasbourg, aurait pu situer l'action du seul opéra de Beethoven dans n'importe quel contexte historique ou social. Il pouvait piocher au hasard dans les deux siècles passés, où l'oppression politique créait des prisonniers arbitraires. Pour cette création à l'Opéra National du Rhin, il a choisi Kafka, sobrement, et c'est bien vu.

Les hautes armoires à documents, décor surprenant du premier acte, évoquent la bureaucratie qui maintient les prisonniers en prison, malgré les excès d'humanité du geôlier Rocco (Jyrki Korhonen). L'Orchestre philharmonique de Strasbourg, dirigé par Marc Albrecht, accompagne le drôle de flirt entre Marzelline (la soprano Cristina Landshamer, douce et sublime), fille du directeur de la prison, et son amoureux travesti Leonore/Fidelio (Anja Kampe). Pour tenter de délivrer son mari Florestan, injustement enfermé, Leonore s'est déguisée en jeune homme et se retrouve embauchée parmi le personnel de la prison.

Au second acte, le ténor Jorma Silvasti campe son personnage de Florestan, cassé en deux et menotté en fond de cale, avec une intensité vocale sans faille, et une présence scénique digne de John Malkovich dans ses plus beaux rôles historiques. Andreas Baesler n'a pas cherché à travestir outre mesure la soprano Anja Kampe. La révélation de la vraie identité de cette "épouse modèle", qui aura tout de même piégé la fragile Marzelline, s'opère au fil du récit de la libération des prisonniers.

Le décor finit renversé, au sens propre. Le choeur chante ce qui peut être entendu comme une répétition de l'Ode à la Joie, finale de la Neuvième Symphonie composée par Beethoven quelques années après Fidelio. Un violent contre-jour accompagne les dernières notes de l'orchestre, double métaphore sur le soleil et la liberté retrouvée des prisonniers. Le livret de Fidelio ne propose pas un récit trop complexe, on suit facilement l'intrigue même si on ne comprend pas l'allemand.

"Fidelio", nouvelle production à l'Opéra National du Rhin. A Strasbourg les 18, 21, 24 et 26 juin et à Mulhouse les 2 et 4 juillet. Renseignements: 03 88 75 48 00 ou www.operanationaldurhin.fr

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