Prudential peut-il réussir son pari fou ?

Les actionnaires de Prudential trainent les pieds pour approuver son acquisition d'AIA. Le pari fou de Tidjane Thiam, son charismatique patron, peut-il réussir?

La machine à rumeurs est lancée. Le Times et la BBC ont ce mardi tous les deux la même information sur Prudential, qui s'est lancé voilà deux mois dans la folle acquisition d'AIA (pour 35,5 milliards de dollars!), la branche asiatique de l'assureur américain AIG. Selon eux, Capital Group, le principal actionnaire du "Pru", voudrait que le groupe britannique soit séparé en deux, entre ses activités britanniques et asiatiques. Le fonds d'investissement aurait tenu des discussions informelles avec Resolution, un autre fonds, et Aviva, le principal concurrent de Pru.

La rumeur est importante. Pru doit recevoir l'approbation de 75% de ses actionnaires pour réussir son augmentation de capital géante finançant l'acquisition. Or, Capital Group possède 12% de l'assureur. Pourquoi ce seuil de 75%, au lieu des 50% habituels? Parce que Tidjane Thiam, le patron franco-ivoirien de l'assureur, a les yeux plus gros que le ventre: AIA est plus gros que Pru, et pour monter l'acquisition, il a dû créer une nouvelle coquille, "NewCo", qui englobera les deux entreprises fusionnées. Un tel montage nécessite une "résolution spéciale", au lieu d'une résolution normale, ce qui nécessite en droit britannique de recueillir l'accord de 75% des actionnaires.

A la rumeur du Times s'ajoute une information de Reuters, qui cite anonymement l'un des dix premiers actionnaires de Prudential, affirmant: "l'argument qui consiste à dire que plus de valeur peut être dégagée en divisant Pru est intéressant. Nous avons encouragé Pru à vendre son activité britannique et à se concentrer sur son activité asiatique."

Alors, qui bluffe? Aucun des participants ne commente officiellement. Un des fonds d'investissement m'affirme cependant, off the record, qu'il serait prématuré de parler d'une séparation de Pru, avant même la publication du prospectus, prévue le 5 mai. "On ne sait pas de quoi on parle tant qu'on n'a pas les détails de l'augmentation de capital." Et il souligne: "celui qui a vraiment intérêt à faire dérailler le deal est Aviva, le principal concurrent de Pru."

L'histoire vient-elle de l'autre grand assureur britannique? Peut-être. Ce qui est certain cependant est que les actionnaires ne se réjouissent pas vraiment de l'acquisition, au moins à court terme. "Il est très plausible que les actionnaires ne soient pas satisfais", explique Anthony Silverman, analyste actions à Standard and Poors Equity Research. Il souligne en particulier que les comptes d'AIA ne sont pas réalisés sur la même base comptable que ceux de Prudential, rendant la comparaison entre les deux pratiquement impossible. Autant dire, les actionnaires voteront dans le brouillard. Mais il ajoute: "il est probable que les actionnaires râlent, mais acceptent l'acquisition." Pourquoi? Tout simplement parce qu'un refus sans autre alternative serait un retour en arrière inutile, annulant deux mois d'efforts. De plus, AIA représente vraiment une proie alléchante sur le long terme.

Reste à attendre deux dates clés: le 5 mai, quand le prospectus sera publié; le 27 mai, date du vote des actionnaires. D'ici là, beaucoup d'autres rumeurs sont à attendre.

 

 

 

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