Tidjane contre Sir Terry

Deux patrons sont dans les informations des ces derniers jours : Tidjane Thiam, à la tête de Prudential, qui a tenté -et échoué- une spectaculaire acquisition en Asie; Sir Terry Leahy, patron de Tesco pendant 14 ans, qui quitte son poste avec un très beau bilan. D'un côté, l'écume et l'égo surdimensionné; de l'autre, l'efficacité et l'attention aux détails.

Belle leçon que celle donnée cette semaine par Terry Leahy. Le patron de Tesco, après 14 ans à la tête du supermarché britannique, vient d'annoncer son départ. Il quitte le groupe avec un bilan spectaculaire. Quand il est arrivé à son poste en 1997, Tesco avait 20% de parts de marché en Grande-Bretagne; c'est maintenant 31%. Le nombre de magasins était de 758; il est désormais de 4811. Critiqué pour être trop gros, trop dominant, et mettre sous pression les petits fournisseurs, Tesco n'est certainement pas une entreprise au dessus des reproches. Mais l'efficacité avec laquelle Terry Leahy a grandi son empire force le respect. Marks & Spencer et Sainsbury's n'ont pas su faire face, et se sont laissés dépasser par Tesco. Même Asda, l'enseigne britannique qui appartient au tout puissant groupe américain Wal Mart, n'a pas réussi à tenir tête.

Son secret? Pas de grande acquisition. Pas de spectaculaire investissement. Mais une avancée, à petits pas, concentrée sur l'efficacité. En Grande-Bretagne, Tesco a su proposer des gammes de produits contentant à la fois les plus bas prix et les moyens prix. Il a su se développer dans le non-alimentaire. A l'international, il a donné des leçons à Carrefour dans des pays comme la Thaïlande, où il a été beaucoup plus en phase avec l'attente des clients.

Hasard du calendrier, cette annonce coïncide avec l'échec spectaculaire de Prudential d'acheter AIA. Les actionnaires n'ont pas voulu entendre parler de ce saut de géant à 35 milliards de dollars, avec une gigantesque augmentation de capital à la clé. Contrit, Tidjane Thiam, son patron, a présenté des demi-excuses lundi lors de l'assemblée générale du groupe. Mais le Franco-ivoirien continue à penser que l'acquisition était stratégiquement une bonne idée, rendue impossible par des marchés trop agités. De son point de vue, le problème n'était pas sa stratégie, mais les circonstances.

Derrière ces deux exemples se cachent deux façons diamétralement opposées de diriger une entreprise: l'efficacité opérationnelle face aux grandes idées stratégiques. Cette deuxième  vision est pourtant remplie d'échecs, Jean-Marie Messier en est un bel exemple français, Royal Bank of Scotland un magnifique exemple britannique. Rarement pourtant l'efficacité n'est soulignée, étant moins spectaculaire, moins facilement explicable, moins médiatique. Mais pour une fois cette semaine, c'est clairement elle qui a gagné.

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