Demain, la constitution doit prévoir que "la loi garantit la parité"

Le projet de loi pour l’égalité « réelle » entre les femmes et les hommes sera voté solennellement en première lecture, mardi matin, à l’Assemblée Nationale. Lors des discussions sur l’article 18, Najat Vallaud Belkacem, ministre des droits des femmes, a pris une position déterminante. « La Constitution prévoit aujourd’hui que « la loi favorise la parité » demain elle devra prévoir que "la loi garantit la parité". A quand une modification de la constitution ?
Najat Vallaud Belkacem, ministre des droits des femmes à l'Assemblée Nationale

C'est mardi 28 janvier, à l'Assemblée Nationale, à partir de 9 h 30, qu'interviendra le vote solennel de la loi cadre pour l'égalité entre les femmes et les hommes, rebaptisée sur proposition de son rapporteur Sébastien Denaja, loi pour l'égalité « réelle » entre les femmes et les hommes.

Après une semaine de débats et les premiers échanges musclés, autour de l'amendement proposé par les députés socialistes de supprimer la notion de détresse pour l'avortement, contrecarré par un amendement (rejeté) visant à ne plus rembourser l'IVG, défendu par les conservateurs, le projet de loi a été majoritairement plébiscité par les républicains en première lecture à l'Assemblée Nationale. Certes, bien sûr, des invectives lancées entre les opposants les plus réfractaires (minoritaires) et les députés de gauche ont donné lieu à des passes d'armes, dont certaines nous renvoyaient 40 ans en arrière, mais exception faite de quelques saillies d'une dizaine de députés les plus réactionnaires de l'hémicycle et de Marion Maréchal Le Pen, la concorde a régné sur les bancs du palais Bourbon. Le projet de loi a fait consensus.

Petit digest de ce qui devrait changer, dans l'attente d'une confirmation en deuxième lecture du texte au Sénat et à l'Assemblée.

  1. Avortement.  L'article "5 quinquies C" supprime du Code de la santé publique la notion de "détresse" pour une femme voulant demander une IVG et la remplace par les mots : "qui ne veut pas poursuivre une grossesse". Le projet de loi renforce le délit d'entrave à l'accès à l'avortement. En effet, l'article 5 considère également qu'empêcher l'accès d'une femme à l'information sur l'avortement constitue un délit d'entrave.
  2. Congé parental. Alors qu'actuellement, 97 % du demi-million de personnes qui prennent ce type de congé sont des femmes, le texte prévoit pour les parents d'un seul enfant, qui ont aujourd'hui droit à six mois de congé, qu'ils pourront prendre six mois de plus à condition que ce soit le second parent qui en soit bénéficiaire. À partir de deux enfants, la durée du congé restera de trois ans, à condition que six mois soient pris par le second parent, sinon elle sera raccourcie à deux ans et demi.
  3. Renforcement des droits et de la protection des pères et conjoints salariés. Une période de protection de la rupture du contrat de travail de 4 semaines suivant la naissance de l'enfant est prévue pour les contrats de travail concernant les hommes salariés. Une autorisation d'absence pour suivi des examens médicaux (trois) est également accordée au conjoint, concubin et partenaire lié par un PACS de la femme enceinte.
  4. Des commandes publiques exemplaires. Les entreprises de plus de 50 salariés ne pourront candidater à la commande publique que si elles sont en mesure d'attester qu'elles respectent leurs obligations légales en matière d'égalité professionnelle.
  5. Pensions alimentaires. La solidarité publique prendra le relais du parent défaillant mais les services publics se retourneront vers lui en faisant valoir des moyens de recouvrement renforcés. Mis en œuvre à partir de 2016, ce dispositif sera expérimenté dés cette année dans une vingtaine de caisses d'allocation familiales. Il est construit à partir de l'Allocation de Soutien Familial, en lien avec les juges aux affaires familiales.
  6. Renforcement de la protection des femmes victimes de violence quelle que soit leur situation administrative. La ligne d'écoute, Grand Danger 3919, sera dés ce mois-ci le numéro unique sur les violences conjugales, le viol, les mutilations sexuelles ou le mariage forcé. Un stage de responsabilisation aux frais des auteurs de violences sera créé, pour la prévention et la lutte contre les violences intra-familiales et sexistes. La ministre a assuré qu'elle soutiendrait une proposition de loi pour inscrire l'incrimination d'inceste dans le code pénal et l'absence présumée de consentement de l'enfant. Un amendement PS pour mieux protéger les enfants a également été adopté qui prévoit, que lorsqu'un parent est coupable de meurtre au sein du couple, la justice se pose systématiquement la question du retrait de l'autorité parentale.
  7. Harcèlement. L'article 12 franchit une étape supplémentaire dans la reconnaissance des violences psychologiques, puisqu'il harmonise les définitions des délits de harcèlement moral et de harcèlement au sein du couple avec celle du harcèlement sexuel. De l'avis d'Edith Gueugneau « Si les coups laissent des traces, il n'en va pas ainsi des violences psychologiques, qui sont plus difficiles à évaluer et qui posent la question de la preuve. Ainsi, un médecin peut constater par certificat médical un état de détresse psychologique, mais il n'est pas en mesure d'établir un lien avec d'éventuelles violences faites par écrit. Ces violences qui ne sont pas physiques, qu'elles soient psychologiques, symboliques ou économiques, font aussi des ravages et rendent de plus en plus difficile la parole de la victime, premier pas pour sortir de ce piège vicieux.  Ces violences doivent être appréhendées avec attention. C'est l'objectif de l'article 11 bis, lequel prévoit la prise en considération des SMS et des MMS, ce qui est loin d'être anecdotique pour les procédures à venir. » Le harcèlement sexuel sera mieux sanctionné, à l'université et dans l'entreprise. De nouvelles incriminations sont créées pour sanctionner d'autres formes de harcèlement comme l'envoi réitéré de messages électroniques malveillants.
  8. Hyper-sexualisation des enfants. Les députés ont approuvé sans réserve l'amendement présenté au Sénat par Chantal Jouanno, établissant l'interdiction des concours de mini-miss pour les moins de 13 ans, assortie d'une amende de 1.500 euros pour les contrevenants.
  9. Protection de l'image de la femme dans l'audiovisuel public et sur internet, le CSA veillera par exemple à la juste représentation des femmes, à la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes, à la lutte contre la diffusion de stéréotypes sexistes et d'images dégradantes. Les associations sportives comme les entreprises culturelles devront également veiller à la promotion de la parité dans leurs directions.
  10. Parité. Alors que l'Assemblée nationale ne compte à ce jour que 26,9 % de femmes députées, la France se trouvant au trente-sixième rang mondial, au dixième rang européen en matière de parité, les députés ont alourdi les sanctions financières pour les partis politiques ne respectant pas la parité dans les candidatures aux législatives : le texte porte à 200 %, à compter de 2017, le taux de modulation applicable. Par ailleurs, les députés ont souhaité que l'Institut de France s'ouvre aux femmes et fait obligation aux administrations de s'adresser aux femmes sous leurs noms de naissance, sauf si elles désirent être désignées par leurs noms de femmes mariées. La parité sera instaurée dans les conseils économiques et sociaux régionaux, les chambres d'agriculture, les chambres des métiers d'ici 10 ans ainsi que dans toutes les autorités administratives indépendantes collégiales et les commissions et instances consultatives et délibératives de l'état.

Par ailleurs, Najat Vallaud-Belkacem, Ministre des droits des femmes a pris une position déterminante qui conforte les associations féminines qui prônent un changement de constitution pour une parité irrévocable.

Extrait de la discussion en séance.

Catherine Coutelle, présidente de la délégation des droits aux femmes

« L'article 1er de la Constitution « favorise » l'accès des femmes aux postes de responsabilité. Cette terminologie remonte à la loi Jospin sur la parité et résulte d'un compromis. En période de cohabitation, et pour que le Sénat vote cette réforme, il a été jugé préférable d'écrire : la loi « favorise » l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, plutôt que la loi « garantit » l'égal accès. Mais dès qu'une réforme constitutionnelle se présentera, je peux vous assurer que la délégation aux droits des femmes a l'intention de présenter une nouvelle modification de cet article 1er allant dans ce sens. Pourquoi nous battons-nous pour la parité ? Parce qu'il s'agit d'un droit, alors que les femmes représentent la moitié de la sphère publique. Au nom de la parité, il faut partager le pouvoir en deux. Il n'y a aucune raison que les femmes soient écartées et privées de responsabilités dans des pans entiers de la vie économique et politique. »

(…) En réponse, Najat Vallaud Belkacem, ministre des droits des femmes

« À Mme la présidente de la délégation aux droits des femmes, je voudrais dire que j'ai bien entendu ses propositions en matière constitutionnelle : la Constitution prévoit aujourd'hui que « la loi favorise la parité » ; elle doit prévoir demain que « la loi garantit la parité ». Il serait en effet utile que votre délégation porte une telle proposition de réforme constitutionnelle. Cela nous facilitera sans doute la tâche pour aller encore plus loin, si besoin en était. »

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 19
à écrit le 29/01/2014 à 17:47
Signaler
La place des femmes est à la cuisine ou à s'occuper des enfants. Honte à ce gouvernement qui veut détruire les bases de la societe française !

le 02/02/2014 à 13:01
Signaler
...et surtout la place des femmes est dans un endroit sans accès Internet, hein ?

à écrit le 29/01/2014 à 11:02
Signaler
Grâce à la technique, on n'aura bientôt plus besoin d'hommes. Des spermatozoïdes ont été créés à partir de tissus de peau. Dans 5 ans, ce sera une technologie parfaitement courante. De plus, on pourra choisir le sexe de l'enfant dès la conception. Le...

à écrit le 28/01/2014 à 9:48
Signaler
Ainsi belkacine veut imposer la parité par la contrainte ? Faut-il lui rappeler que certains métiers attirent plus les femmes comme d'autres attirent plus les hommes ? Elle semble ne pas bien comprendre le principe de l'égalité de droit et le confon...

le 30/01/2014 à 9:26
Signaler
Il est facile d’évoquer la « nature féminine » pour refuser de voir les inégalités dont sont victimes les femmes. On ne peut espérer améliorer la situation des femmes sans poser la question des discriminations, de l’égalité des chances, en même temps...

à écrit le 27/01/2014 à 10:17
Signaler
Joli tir de barrage de tous les machos qui baignent dans la culture du viol et de la domination, de la prostitution à la pornographie qui nous réduit … Il reste encore du chemin pour arriver à la parité dans l’éducation et l’emploi .Le sexisme ce n’e...

à écrit le 27/01/2014 à 8:52
Signaler
Jamais un ministre n'a autant été anti homme. On connaissait à ces politicards leur absence de respect pour le droit à l'expression libre, à la circulation libre, à l'utilisation libre de son corps etc. Maintenant il faut casser les hommes, niveler e...

le 28/01/2014 à 10:04
Signaler
Les Droits de l’homme sont constamment bafoués de nos jours, et ceux de la femme depuis toujours niés, il n’est plus possible de croire qu’il suffit d’invoquer les Droits humains pour en établir l’exercice réel sur la terre. L’être humain universel e...

à écrit le 27/01/2014 à 7:24
Signaler
Mais oui. C'est bien de la peur qu'on peut sentir à travers vos commentaires de mâles qui tremblent de perdre la moindre miette de leur petite suprématie. Je conviens qu'imposer des quotas est complètement artificiel et je doute du résultat. Mais cel...

le 28/01/2014 à 9:32
Signaler
Il me tarde de voir les recrutements dans le BTP pour assurer la parité, ça va être sympa de trouver des candidates. Ca n'est venu à l'idée de personne qu'il y certains métiers que les femmes ne veulent pas exercer ?

le 29/01/2014 à 9:08
Signaler
Ne veulent pas ou ne peuvent pas ? Certains préjugés sociaux sont coriaces (il faudrait une force physique supérieure, donc masculine, pour survivre sur un chantier,...) et découragent les plus motivées. Connaissez-vous certains métiers que les homm...

à écrit le 27/01/2014 à 7:13
Signaler
Parité, Ok mais a t on renforcer le droit des pères? Donc pour ma part je parlerai parité quand les pères auront les mêmes droits que les mères concernant la garde des enfants.

le 27/01/2014 à 10:41
Signaler
Tant que les femmes n’ont pas les mêmes droits que les hommes et des salaires équivalents, on ne peut parler d’égalité en ce qui concerne les divorces/séparations et la garde des enfants. Une meilleure répartition de la parentalité va évidemment de ...

à écrit le 27/01/2014 à 4:51
Signaler
Garantir la parité ? Et pourquoi pas le beau temps ! J'ai travaillé près de 25 ans dans le secteur médico-social : deux tiers de femmes partout ! Nous aurions bien voulu la parité, pour l'éducation de jeunes très difficile, c'aurait été beaucoup ...

à écrit le 27/01/2014 à 3:47
Signaler
Gouvernement incomparable, qui a su s'affranchir sans complexe de toute obligation d'intelligence! La "parité hommes-femmes" est parfaitement contraire à l'égalité des droits entre l'homme et la femme, mais cette position parfaitement illogique ne d...

le 27/01/2014 à 4:53
Signaler
Vous avez entièrement raison, c'est un problème fondamental et incontournable.

à écrit le 26/01/2014 à 21:26
Signaler
Parité ok! Mais aussi finit la galanterie envers les femmes! Pourquoi laisser sa place à une femme dans les transports publics, pourquoi ouvrir la porte à une femme, pourquoi descendre les escaliers devant une femme ou monter avant, pourquoi aider un...

à écrit le 26/01/2014 à 20:57
Signaler
Et on veut aussi la parité entre les grands et les petits, les gros et les maigres, les blancs, les jaunes, les noirs et les autres, les diabétiques et les non diabétiques, etc............. Elle ferait mieux de se battre sur le vrai sujet, à savoir q...

à écrit le 26/01/2014 à 20:16
Signaler
Il faudra un jour dire clairement que ce sont des malades qui nous gouvernent, ou des gens sans foi ni loi : en tout cas ce ne sont pas des individus emprunt du rôle qui est le leur, ils agissent en président d’association sociétale et manipulent l'o...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.