La rigueur et l’humanité

Les Journées de l'économie organisées chaque année à Lyon, dont Acteurs de l'Economie et La Tribune sont partenaires, se déroulent cette année du 14 au 16 novembre. L'occasion pour Sylvie Goulard, députée européenne, de dénoncer la folle dépense publique française, quand tous les pays européens se sont mis au pas de la rigueur...
Sylvie Goulard, députée européenne, trouve encore la France très gourmande avec la dépense publique...

La vertu de l'Europe, si décriée en ce moment, est de nous obliger à réviser nos certitudes nationales, à nous "décentrer" pour tenir compte du point de vue des autres. C'est sans doute pourquoi elle gêne ceux qui se croient détenteurs de vérités absolues.

Les Allemands ont raison d'insister pour que nous cessions de vivre au-dessus de nos moyens, surtout quand les dettes ne financent pas des investissements productifs mais des dépenses de fonctionnement, notamment d'innombrables collectivités locales, et des prestations sociales dont les coûts ne sont pas maîtrisés. La Cour des comptes française ne dit pas autre chose.  

"L'éducation nationale n'est pas à la hauteur"

Dans ce contexte, défendre la dépense publique à tous crins, au nom de la "croissance", revient à flouer nos propres enfants. Elle aboutit aussi à nier la réalité : la France est championne de la dépense publique sans toujours être celle des performances. 

Une bonne gestion peut faire la différence. L'OCDE démontre, au fil de ses études, que l'éducation nationale, par exemple, ou la formation professionnelle ne sont pas à la hauteur de celles de plusieurs pays occidentaux. Il y a certes, outre-Rhin, des personnes démunies et des infrastructures vieillissantes mais l'Allemagne fait souvent aussi bien, ou mieux, avec moins. Des pays comme la Finlande ou l'Autriche réussissent mieux que nous.

 

"La rigueur n'est pas une fin en soi"

Il est assez incroyable que les Français, réputés cartésiens, se défient de la rigueur. Si la classe politique faisait preuve de plus de rigueur intellectuelle, elle réaliserait à quel point nos partenaires européens ont fait de douloureux efforts - la Pologne, depuis la fin du communisme, ou les pays du Sud, comme le Portugal, l'Espagne, depuis le début de la crise. La France fait preuve d'une auto-complaisance qui commence à se retourner contre elle. 

Au Sud, les Portugais ou les Espagnols n'ont pas moins raison de rappeler que les politiques de redressement des comptes publics et de réformes structurelles frappent durement les citoyens modestes. En France, en Italie, les fermetures d'entreprises créent de grandes zones de désespoir. La rigueur, l'assainissement ne sauraient être une fin en soi.

"Dans le contexte actuel, la stabilité monétaire n'a aucun sens"

En tout cas, les risques d'instabilité politique, souvent rejetés au second plan en Allemagne, devraient être infiniment plus pris au sérieux. La stabilité monétaire (Geldwertstabilität), dans une mer de populisme et de désarroi, n'a guère de sens. La montée de la contestation semble justifier le rejet des réformes. Ce serait une erreur, tout comme d'entrer dans la facilité du "ras le bol". 

Les solutions simplistes consistant à prôner la sortie de l'euro ou la fermeture des frontières sont des leurres. Mais ne pas entendre la souffrance des Européens serait irresponsable. C'est dans la recherche d'un équilibre délicat, sans cesse instable, entre les impératifs d'assainissement et ceux de la justice sociale, entre le Nord et le Sud, que l'Europe a un avenir.

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Commentaire 1
à écrit le 24/01/2014 à 14:45
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Dans cette tribune Sylvie Goulard passe très rapidement des constats à la conclusion. L'argumentation présume que les lecteurs ont une bonne connaissance et une compréhension de la diversité des points de vue dans les autres pays européens.

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