Municipales 2014 : à Marseille, l'économie est au coeur des débats

Jusqu'aux élections municipales de mars prochain, La Tribune analysera les enjeux du scrutin dans les dix principales villes françaises. Septième volet : Marseille. Maire sortant et sénateur, Jean-Claude Gaudin, 74 ans, brigue un quatrième mandat alors que la cité phocéenne cherche de nouveaux relais de croissance.
Le sénateur et maire sortant UMP de Marseille, Jean-Claude Gaudin, en campagne pour sa réelection. À 74 ans, conseiller municipal depuis quarante-neuf ans et maire depuis dix-huit ans, il n'a aucune envie de décrocher. / DR

N'en déplaise à l'actuel locataire de la « Maison Blanche » (surnom donné par certains à la mairie centrale marseillaise), hormis Paris, peu de villes bénéficient d'une couverture médiatique comme Marseille. Les médias parisiens viennent régulièrement en pèlerinage pour s'encanailler. Sur le Vieux-Port, il y en a pour tous les goûts du chaos : criminalité, clientélisme, corruption, impunité des élus, opacité des règles du jeu... Pourtant, sous ses abords agités, c'est l'histoire d'une immuable perpétuation politique. En soixante ans, Marseille n'a connu que trois maires.

Et comme une ombre tutélaire, Gaston Defferre, élu en 1953, reste un marqueur politique. Y compris pour Jean-Claude Gaudin, l'homme qui a « finalement trouvé sa place » à l'ombre du Centre national des indépendants et paysans (CNIP) en pactisant avec le mentor socialiste qui cherchait alors à s'affranchir du PCF et de l'influente CGT. Depuis 1995, date à laquelle il a raflé la mairie à la gauche, l'ancien professeur d'histoire du lycée Saint-Joseph-les-Maristes est indéboulonnable. Mais cette fois, les élections municipales (huit secteurs avec chacun deux arrondissements) s'annoncent d'autant plus âpres que la troisième agglomération française fait partie des rares grandes villes qui échappent à la gauche.

Et si la divine surprise venait de Marseille ?, se plaisent à penser les caciques socialistes, ragaillardis par les sondages, qui bégayent à la virgule près, en donnant le socialiste Patrick Mennucci vainqueur au second tour avec 41% des voix contre 40% pour le maire sortant UMP et 19% pour le FN. Et ce, en dépit d'une famille socialiste divisée en raison de l'inextinguible affaire Guérini (le président socialiste du Conseil général plusieurs fois mis en examen) et de primaires sous tension.

Une chose est certaine : l'économie est au coeur du débat. Et c'est donc Patrick Mennucci, l'actuel maire socialiste du 1er secteur de Marseille, avec lequel Jean-Claude Gaudin ferraille depuis six ans sur les bancs municipaux, qui a donné le tempo en lançant sa campagne par la présentation du volet économique de son programme. Pris de court, le maire redevenu candidat, qui se figeait sur son bilan, a été contraint de changer de stratégie. Ce qui n'a pas échappé aux milieux patronaux qui savourent le moment, eux qui tentent de forcer les portes à tous les étages pour influencer la gouvernance.

Euroméditerranée, le quartier du renouveau

« Ma satisfaction est d'autant plus vive que beaucoup de thèmes inscrits dans notre recueil de propositions "Faire gagner Marseille-Provence, c'est possible" ont été repris par les deux candidats », se délecte Jean-Luc Chauvin, président de l'UPE 13, le Medef départemental.

« Que les candidats aient un programme économique est déjà en soi une satisfaction », abonde Jacques Pfister, le président de la CCI Marseille-Provence et artisan de la Capitale européenne de la Culture, qui laisse élégamment l'édile s'attribuer le succès : « Dix millions de visiteurs », « plus d'1 million de croisiéristes », et la réalisation d'équipements structurants, comptabilise le maire et sénateur. Il ne veut pas « s'égarer dans une avalanche de chiffres », mais... quand même : « Depuis 1995, 40.000 emplois privés et 20.000 entreprises ont été créés. La transformation structurelle de l'économie est largement engagée grâce à Euroméditerranée qui a attiré des investisseurs nationaux et internationaux. » Grande opération de rénovation urbaine portant sur 480 ha le long de la façade portuaire, l'équivalent marseillais de La Défense aurait généré 8500 emplois nets. Et de citer l'hôtelier multinational Intercontinental, le japonais Toyoko Inn qui a choisi sa ville comme première implantation en Europe, la foncière britannique Hammerson qui y a investi plus de 400 millions d'euros dans la réalisation d'un centre ludocommercial avec 2000 emplois à la clé (et non 8000 comme l'affirme le maire).

Colistiers d'influence : un "mercato" encore ouvert

Selon l'Insee, il manquerait à la métropole 62.000 emplois privés. Selon l'OCDE, l'aire métropolitaine serait parmi les plus inégalitaires de France en matière de revenus, d'accès à l'emploi (taux de chômage des 15-29 ans de 20,8%) et d'éducation (24% de non-diplômés). Des inégalités amplifiées par des transports publics inefficients. Dans une agglomération de plus de 1,5 million d'habitants, qui n'a que deux lignes de métro et deux lignes de tramway et où le taux d'utilisation de la voiture est plus élevé qu'à Los Angeles, le dossier est clivant.

« Les projets seront finalisés dans les meilleurs délais : les études techniques seront effectuées d'ici deux ans pour les prolongements du métro. Le tramway du Nord au Sud sera une priorité », détaille Roland Blum, meilleur atout économique de l'équipe actuelle pour sa maîtrise indiscutable des dossiers.

Le tout main dans la main avec la communauté urbaine, où l'équipe sortante espère emporter la majorité des sièges.

Quoi qu'il en soit, les Marseillais(es) vont avoir bien du mal à choisir tant les programmes se ressemblent à s'y méprendre (lire encadré). Qu'est ce qui fera la différence ?

« Leurs relais dans le monde économique », affirme l'ancien directeur de la communication d'une instance patronale.

Depuis quelques jours, c'est le « mercato ». Les deux candidats annoncent tour à tour le ralliement, ici, d'un scientifique reconnu, là, d'un nageur de haut niveau. Patrick Mennucci a emporté un premier set en faisant appel pour rédiger ses propositions aux meilleurs spécialistes de la place, ceux dont le patronat s'est « entiché » depuis quelques années pour produire des prospectives sur le devenir de Marseille.* Le maire sortant a promis une équipe municipale renouvelée à un tiers, en s'ouvrant notamment à la société civile (on sait qu'il a « dragué » des têtes d'affiche « entreprise »). Mais, prisonnier de sa loyauté, l'homme « ne le fera pas brutalement ». En clair, il ne licenciera pas mais attend les démissions.

* Le médiateur du gouvernement Yves Cousquer, le consultant Jean-Bernard de Cérou et l'astrophysicien Jacques Boulesteix.

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Troublant mimétisme !

Outre quelques kilos en trop et la gouaille, les deux principaux candidats présentent des programmes en calque. L'actuel maire a même cru se reconnaître dans le programme de son adversaire :

« Une restructuration a été engagée ces dernières années autour de cinq pôles : l'économie productive, la connaissance, les transports, la logistique, le tourisme. Voilà au moins un point sur lequel mon concurrent est d'accord avec moi puisqu'il reprend cette classification. »

Quand Patrick Mennucci propose de développer « un pôle d'ingénierie marine et sous-marine comprenant une grande école internationale de plongée », Jean-Claude Gaudin évoque, lui, « un technopôle de la mer avec un centre international de plongée ».

Pour redynamiser le port en perte de vitesse, ils préconisent les mêmes remèdes : réalisation d'un terminal de transport combiné, développement de la réparation navale, des croisières et de la logistique. Ils prônent aussi tous deux le jeu collectif :

« Un Conseil économique sera institué, composé de représentants consulaires, patronaux et syndicaux et de chefs d'entreprise », explique l'équipe Gaudin. Chez Patrick Mennucci, cela s'appelle un « conseil d'orientation économique ».

« Un guichet unique d'accueil des entreprises et des investisseurs sera créé », s'engage le maire sortant.

L'opposition promet « un guichet unique municipal ». Le marketing territorial est également entré dans le vocabulaire des deux listes. Quoi qu'il en soit, avec une dette de 1,8 milliard d'euros, les marges de manoeuvre financière seront faibles, prévient l'Institut Montaigne. D'autant qu'elle sera encore obérée en 2014 de 103 millions d'euros avec la livraison du stade Vélodrome, dans lequel la ville a mis 42,5 millions d'euros.

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Commentaires 11
à écrit le 01/03/2014 à 16:32
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ah! boudiou! vé! le maire devrait passer la main avant de faire "fanny"!il nous rabat les esgourdes mais il est cuit de chez cuit, place aux moussis", aux plus jeunes, à ceux qui se boulèguent le tafanari !

le 02/03/2014 à 20:10
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Dites nous le "avé l'assen" hé!hé!hé!

à écrit le 01/03/2014 à 16:27
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Mr J.CJGaudin devrait prendre une retraite bien méritée! il est "has been " !

à écrit le 26/02/2014 à 20:48
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Qu'est-ce qu'il y connait , lui , à l'économie...pff !!!

à écrit le 26/02/2014 à 19:21
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Comment des marseillais qui veulent cg=changer l'image de leur ville se coltinent encore un M. Gaudin ou M. Menucci des hommes du passé. Marseille une ville qui n' a plus sa place dans un monde qui bouge. J'ai eu une partie de mon bureau dans Marseil...

le 01/03/2014 à 16:28
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Marseille , ville "culturelle", voyons ! ha!ha!

à écrit le 26/02/2014 à 13:54
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içi ,dans " notre belle ville de Marseille" (comme dit Mr Gaudin) ,c'est le laxisme l'idéologie dominante de Mr gaudin: -Pas de controle des déchets jetés sur la voie publique ; Urbanisme à la petite semaine et passes droits, pas de controle des liv...

le 02/03/2014 à 20:34
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c'est carrément le souk , quoi !

le 03/03/2014 à 11:16
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on est loin de notre Marseille d'antan.......mais dirons ceux qui ne connaissent pas la nostalgie : faut avancer! ça sert à rien de regarder en arrière! " avancer, on veut bien mais quand on voit l'état" de cette belle ville, on peut se demander pour...

à écrit le 26/02/2014 à 13:06
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Mr Gaudin il faut savoir passer la main Il y a plein de maison de retraite sur marseille je vous l accorde elles sont pas terrible elles font peur même ..!!! C'est parceque vous leur avez pas donnée assez d argent.... Trop de "magouille" trop de pass...

le 26/02/2014 à 13:33
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Pas des casques bleus... Mais des incorruptibles! Viens vite, Elliot Ness! :-)

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