Faut-il éteindre son portable pendant les vacances ?

Les études se suivent et se ressemblent pour délivrer une seule et même info : nous sommes accros à nos portables. Rien de nouveau sous ce soleil de juillet. Si ce n'est qu'il faut désormais se préoccuper de notre niveau de dépendance qui peut prendre des allures de névrose. Les vacances, c'est peut-être le bon moment pour ne plus décrocher...son téléphone ?
Profiter de l'été et du soleil sans le portable collé à l'oreille !

Avec 85% des Français équipés d'un téléphone portable et un taux d'équipement de 106,5% en carte SIM, nous faisons figure de « suréquipés ». L'addiction au portable devient une névrose moderne. Elle porte même un nom : la "nomophobie », raccourci pour "no mobile phobia" (la phobie de l'absence de mobile), apparu au Royaume-Uni en 2008. Etudes à l'appui, deux tiers des utilisateurs seraient fortement angoissés à l'idée d'égarer leur « doudou à toutouches ». Une étude britannique relève que les femmes s'avéreraient plus nomophobes (70%) que les hommes (61%), sachant que les 18-24 ans seraient les plus sérieusement atteints avec un total de 77%, devant les 25-34 ans (68%).

Extension du domaine de nos vies

Addiction qui s'amplifie à mesure que ces petits engins se rendent indispensables dans notre vie courante : fonctions GPS, achats de loisirs, vérification d'une info, et bien sûr connexion H24 avec sa bande d'amis, son(a) amoureux(se), ses enfants et les « amis de Facebook ». Des liens qui favorisent une consultation permanente, sans compter bien entendu la sphère professionnelle avec les mails qui augmentent les temps de connexion.
D'après un sondage en ligne de la société Mingle, 22 % des Français avouent qu'il leur est "impossible" de passer plus d'une journée sans leur téléphone portable. Et deux tiers préfèrent perdre clefs ou carte bleue que leur portable. Et pour cause : c'est une extension du domaine de leur vie. D'où ce terrible dilemme : faut-il cacher son portable au fond de sa valise durant ses vacances ? Dommage car on risque de louper l'apéro chez Marcel, le tour en bateau avec Jef, ou la soirée chez Régine.

Après tout, est-ce si grave d'avoir son portable tout le temps avec soi ? Comme dans toute addiction, ce qui pose problème c'est le phénomène de dépendance et des stratégies que l'on fabrique pour se fournir "sa dose"... Souffrir de ne pas avoir son portable à portée de main, au même titre qu'un fumeur ses cigarettes ou, un alcoolique profiter d'un repas sans alcool. Signe qui ne trompe pas : vous êtes atteint si vous constatez que vous vérifiez sans cesse où se trouve votre portable, que vous ne passez pas une heure sans vérifier son écran, ou que vous êtes terriblement angoissé dès lors que vous ne le trouvez plus.
Donc avant de débrancher sauvagement pendant les vacances au risque de vous les gâcher, le premier pas consiste comme dans toute dépendance à prendre conscience de votre « nomophobie ». Lancez donc le sujet à table et comme les fumeurs racontez-vous vos petites déviances. Aux Etats-Unis, Joseph Tecce, professeur de psychologie au Boston College, a étudié ce phénomène de dépendance. Selon lui, si vous essayez d'exercer un contrôle sur l'utilisation de votre portable et n'y parvenez pas, vous en êtes dépendant. « Les personnes qui utilisent leur portable chaque fois qu'elles se sentent mal à l'aise ou anxieuses face à un problème dépendent trop de leur appareil. Un tel comportement réduit éventuellement l'autonomie et l'estime de soi. Comme c'est le cas pour la plupart des expériences gratifiantes, la dépendance lourde au téléphone portable pour obtenir soutien, conseils ou réconfort réduit certes à court terme le niveau d'anxiété, mais peut s'avérer nuisible à long terme » explique ce chercheur dans un article de Courrier International paru en 2006. Dans ce même article, le journal rapporte aussi l'expérience avant-gardiste du professeur Sergio Chaparro qui, dans le cadre d'un cours sur les technologies de l'information à l'université Rutgers, dans le New Jersey, avait demandé à ses élèves de délaisser leur téléphone portable pendant trois jours. Résultat: seuls 3 étudiants sur 220 avaient réussi à aller jusqu'au bout de l'expérience.

Se mettre aux abonnés absents

Deuxième étape, une fois repéré son taux de nomophobie : se créer une discipline. L'art de débrancher, cela se cultive. Mieux habiter sa journée, sa nuit, doit rester une démarche personnelle. Chacun doit avoir à coeur de découvrir son seuil de tolérance. Il s'agit donc d'y réfléchir. De déterminer sa zone de confort, celle dans laquelle on peut respirer intérieurement. Signe des temps? Certains commencent à développer leurs propres stratégies. B.A.BA selon Isabelle, cadre sup dans un grand groupe : avoir deux portables, un pro et un perso. En week-end et en vacances, ne jamais (ou très peu et à heure fixe) allumer le pro. Idem pour le BlackBerry. Le laisser au fond d'un tiroir pendant deux jours. « Sinon cauchemars assurés, avoue-t-elle. Je me mets à penser en boucle à tel ou tel dossier et je ne dors plus.». Florence, partie cette semaine comme beaucoup en vacances, a pris la décision d'éteindre son portable en le gardant avec elle, et en l'allumant seulement une fois par jour ou en cas de besoin. S'il manque le Nutella au retour du supermarché...tant pis pour les ados. Eux aussi ils sont en cure de désintox. Le professeur Michel Lejoyeux, chef de service de psychiatrie et d'addictologie à l'hôpital Bichat et à Maison Blanche, avance la piste de « thérapie par concurrence ».... Et suggère de prendre du plaisir d'une autre manière pendant les vacances. Car un temps excessif passé à discuter au téléphone peut aussi entraîner un état constant de distraction, qui supprime une composante clé du bonheur, à savoir le plaisir que procure la capacité de s'abandonner complètement à une activité en excluant tout le reste.
En se mettant (partiellement) aux abonnés absents, on apprend donc à gérer le stress. A faire le tri. On met en ?uvre une bonne gestion de ses débordements permanents. Et on retrouve le pouvoir dire de non. Le truc, c'est peut-être d'activer chez nous, comme chez nos ados, le mode « rebelle »...c'est-à-dire le plaisir de dire NON. Non, je, tu, il, nous sommes injoignables. Partis pêcher, crapahuter, nager. Pourquoi pas, un grand jeu familial de l'été ? Celui de la déconnexion ? Exactement comme avec le tabac où on se demande « t'en es à combien aujourd'hui » ?  Nous n'avons qu'à nous fixer ensemble, des horaires, et du temps de connexion avec petit à petit un arrêt en fuseau. Ou plus radical : on coupe tout et on en parle...ensemble...de ce que cela nous fait, comment ça nous démange et ça nous gratouille...Bref on joue au Docteur Knock, une référence que les moins de vingt ans ne connaissent sûrement pas...raison de plus. Histoire aussi de montrer à nos enfants, ces « nouveaux Bovary » qui s'imaginent vivre une vie plus exaltante via leurs écrans, que dans la vraie vie...on rit aussi !

 


 

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Commentaires 7
à écrit le 26/07/2012 à 13:30
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Les sujets de société sur l évolution de nos m?urs et la destination ou nous voulons aller et toute aussi importante que les mécanismes financiers qui nous surpassent. L économie doit être au service de la société, la première valeur c est bien nous...

le 26/07/2012 à 21:09
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"Se faire analyser ne peu procurer que du bien" : ça dépend de la profondeur de l'exploration. L'économie est d'abord le fait des individus avant d'être au service de qui que ce soit. Et surtout, si l'économie est moribonde, elle ne servira personne....

le 30/07/2012 à 9:14
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Votre commentaire ne veut rien dire, si l économie est le fait d individus elle fait partie du fonctionnement de la société et si elle est moribonde raison de plus pour se pencher sur les mécanismes qui l animent avec une vision à dimension humaine,...

à écrit le 25/07/2012 à 20:37
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On avait le choix entre ça, l'article sur le régime de l'été pour être belle sur la plage et l'horoscope des vacances... Ben voilà, le choix est fait. La Tribune file un mauvais coton, on dirait

le 25/07/2012 à 21:21
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@quel article: personnellement, j'aurai préféré une fille en bikini qu'un type en costume les pieds dans la flotte :-)

à écrit le 25/07/2012 à 17:59
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peuple assite va se reveiller tout seul en octobre!!!

à écrit le 25/07/2012 à 17:13
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Heureusement qu'il y a plein de conseils gentils et bien intentionnés pour nous dire comment il faut vivre, téléphoner, manger, bouger, baiser, sinon on ne saurait pas.

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