La guerre est morte, vive la guerre !

Par Philippe Cahen  |   |  399  mots
Pour Petro Porochenko, président d'Ukraine, le pays ne fait pas face à une guerre civile.
La Guerre de 1914-1918, le débarquement de Juin 1944 : l'Europe commémore cette année deux des plus grands massacres de populations militaires et civiles de l'histoire de l'humanité. Ils se sont déroulés dans la première moitié du XXe siècle. Depuis, le monde se pacifie. La croissance économique y contribue largement. Les bruits de bottes ne sont cependant jamais loin.

Le rapprochement de l'Ukraine, de la Moldavie, de la Géorgie avec l'Union européenne crée des tensions vives avec la Russie. L'expansion chinoise en mer de Chine en crée d'autres avec le Japon, le Vietnam.

L'ampleur des échanges économiques, des échanges humains, est un frein à l'action irréversible. On peut admirer certaines retenues en Ukraine. La théorie d'Élie Berman veut qu'un faible revenu par tête et la présence de montagnes soient des indicateurs prédictifs de conflits, comme en Syrie et en Irak, en Afghanistan et au Pakistan. Il y a cependant deux types de « guerres » qui se développent.

La première est la guerre économique. La condamnation de BNP Paribas à près de 9 milliards de dollars pour violation de l'embargo économique américain, notamment contre le Soudan, est reconnue comme un signal fort.

Le blocage par la Chine de l'alliance commerciale des trois géants européens du transport maritime (Maersk, MSC, CMA CGM) sur 29 lignes, malgré l'accord de Bruxelles et de Washington, est aussi reconnu comme tel. Cette guerre économique est accompagnée d'une guerre naturelle du renseignement numérique.

On est dans l'affirmation des pôles économiques mondiaux qui ne font que se renforcer. De telles décisions seront de plus en plus nombreuses, malgré l'internationalisation des entreprises. C'est la règle du jeu admise.

La deuxième guerre qui se développe est une guerre d'identité. C'est la plus sournoise, la plus dangereuse. L'identité est le sujet le plus impalpable qui soit. Elle peut être régionale, religieuse, sociale. En Corse, le FLNC a « déposé les armes », sans abandonner « la marche vers la souveraineté ».

L'identité religieuse - souvent musulmane - a pour objectif la prise de pouvoir, la déstabilisation d'États. C'est une revendication à l'inverse des courants majoritaires du monde, qui veut une stabilisation des frontières. Les « soldats » de cette revendication se forment dans les pays faibles aussi bien que dans les démocraties.

Cette guerre terrorise. Sa lutte est faite d'infiltration, de suivi électronique et d'attaques nécessairement « discrètes ». C'est dans ce monde que se situe l'avenir de l'économie de la défense, du nanodrone à l'ultra-big data. Et comme le veut l'Histoire, l'économie civile en profitera.

Je repars en plongée.

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L'ouvrage le plus récent de Philippe Cahen :
Les Secrets de la prospective par les signaux faibles, Éditions Kawa, 2013.