Les administrateurs en charge du siège européen de Lehman Brothers courent toujours après les milliards perdus. L'incroyable sac de noeuds provoqué par la faillite prendra encore des années à démêler. Près de 500 personnes - en grande partie d'anciens courtiers - y travaillent à temps plein à Londres.

Contrairement à une faillite normale, qui nécessite essentiellement de compenser les créditeurs, l'implosion de Lehman Brothers a créé deux problèmes supplémentaires. D'une part, 140.000 transactions financières ont été instantanément gelées, et n'ont pas pu aboutir. Et encore ce nombre ne concerne-t-il que le siège européen de Lehman Brothers, à Londres. Les résoudre sera très long.

D'autre part, près de 20 milliards de dollars d'actifs, qui appartenaient à des institutions tierces mais étaient aux mains de Lehman au moment de la faillite, ont également été gelés.

Poursuites internationales

Souvent, ces sommes étaient en transit via des filiales étrangères de la banque et y demeurent encore aujourd'hui. Pour les récupérer, Lehman Brothers Londres mène des poursuites judiciaires internationales tous azimuts : elle poursuit par exemple l'ancienne branche allemande, pour récupérer 1 milliard de dollars. Elle poursuit aussi son ancienne maison mère à New York, qu'elle accuse d'avoir rapatrié d'énormes sommes juste avant la faillite. La complexité des négociations s'est illustrée en juin. À cette date, les administrateurs de Lehman Europe ont fait un grand pas en avant dans la récupération de l'argent appartenant à des tiers.

Citigroup a accepté de remettre à Lehman Europe 2,5 milliards de dollars qui étaient bloqués depuis presque trois ans. En échange, les deux groupes ont tiré un trait sur toute poursuite judiciaire l'un contre l'autre. Mais cet accord aura nécessité de mobiliser une armée d'avocats et de banquiers pendant plusieurs années. Cela porte le total de l'argent récupéré par les administrateurs à 15 milliards de dollars. Si ce montant représente les trois quarts de l'argent bloqué. Il reste beaucoup de travail. Il y a deux ans les administrateurs affirmaient à « La Tribune » que la résolution de la faillite prendrait une décennie. Tout indique que c'était une sous-estimation. Lehman Brothers fonctionnait à la vitesse éclair des marchés, son détricotage avance à la vitesse d'escargot de la justice.