Privilège fiscal pour les gérants de fonds de FCPR

Par Pascal Boulard  |   |  551  mots
Les gérants de fonds communs de placement à risques bénéficient du régime des plus-values pour certains revenus liés à leur performance financière. Ils sont bien mieux logés que les dirigeants des sociétés qu'ils ont financées.

Depuis le 28 mars 2002, une instruction de la Direction Générale des Impôts a précisé le régime d?imposition des certains revenus perçus par les gérants de fonds communs de placement à risques (FCPR) et des sociétés de capital risque (SCR). Il s?agit des actions dites de « carried interest » perçues par les gestionnaires de fonds pour les intéresser à la performance des investissements réalisés par les entreprises de leur portefeuille.

Rappelons que le métier d?une équipe de gestion de fonds se résume en trois parties : 1) trouver des fonds auprès d?investisseurs institutionnels (pour le bien-être financier des gérants, c?est la partie la plus importante) ; 2) trouver des dossiers à financer, notamment des sociétés familiales pouvant être rachetées par un Leverage buy-out (LBO, rachat par effet de levier), ou des filiales de grands groupes devant sortir d?un périmètre de consolidation ; 3) trouver les cadres capable de bien gérer la société financée, c'est-à-dire assurer les investissements et le service de la dette dans le cas d?un LBO.

Ces derniers sont également intéressés à la performance de leur gestion. Ils peuvent, s?ils le désirent, acheter des bons de souscription d?action pour souscrire à une augmentation de capital réservée à un prix fixé à l?avance. Généralement, ils empruntent une partie ou tout l?argent nécessaire. Cela représente un à deux ans de salaire.

Si tout se passe bien, si la société a réalisé de bonnes performances, elle sera vendue à un prix supérieur. Dans ces conditions, les cadres qui ont acheté des BSA (bons de souscription d'actions) peuvent les exercer et gagner beaucoup d?argent. Ils seront imposés selon le régime des plus-values (16% plus CSG, CRDS et 2% social). Dans le cas inverse, si la société ne performe pas, voire fait faillite, les cadres ne pourront pas exercer les BSA. Ils auront perdu leur somme de départ.

Qu?en est-il du coté des gérants du fonds ? Ils perçoivent donc des actions de « carried interest », qui peuvent représenter jusqu?à 20% de la plus-value réalisée par le fonds. A la différence des dirigeants de la société, il les perçoivent gratuitement et ne sont donc pas en risque. Si le fonds performe, ils gagnent beaucoup d?argent. A l'inverse, ils ne touchent rien mais ils ne perdront pas d?argent non plus.

En 2002, la Direction Générale des Impôts a été fort généreuse avec ces gérants. En effet, on peut assimiler les sommes perçues par le « carried interest » comme une prime sur le salaire, certes exceptionnelle, et non comme une plus-value. Le taux marginal aurait alors été appliqué.

Précisons que cet arrangement a été conclu sans que le parlement ait pu se pencher sur le dossier. Dans son blog personnel, Jean Arthuis, sénateur de la Mayenne, s?en offusque. « Ce régime dérogatoire, institué sans débat législatif, résulte d?une simple instruction, explique-t-il. C?est le « bouclier fiscal socialiste » au service de la spéculation. Convenons qu?il n?a certainement pas freiné les excès. Etrange conception de l?équité fiscale »