"Il y a une véritable pénurie de talents chez les managers"

S'appuyant sur les résultats d'une grande enquête (lien ci-dessous) menée par le Boston Consulting Group, Jean-Michel Caye, directeur associé de ce grand cabinet international, souligne dans un entretien à La Tribune, que les grandes entreprises ont de plus en plus de difficultés à trouver des patrons de qualité. D'autant que selon lui, "savoir gagner de l'argent" ne suffit plus.

La Tribune : Quels effets la crise financière et économique mondiale a-t-elle eu en matière de ressources humaines dans les entreprises ?
Jean-Michel Caye : Les entreprises ont dû s'adapter. Pour survivre, il faut réduire les coûts, et cela impacte notamment les effectifs. Mais certaines ont aussi développé une stratégie de flexibilité sur le temps de travail ou encore sur l'organisation interne ou en réseaux pour poursuivre leurs objectifs. IBM avait fait ce choix durant la crise de 1929, ce qui lui avait permis de conserver les compétences internes pour assurer son futur développement. Mais, ce que nous relevons dans notre étude, c'est l'impact qu'a eu la crise sur le moral, en particulier celui des cadres intermédiaires. En fait, la crise a agi comme un révélateur sur le malaise structurel de cette catégorie de personnels, qui souffre de sa position « entre le marteau et l'enclume ». N'étant pas suffisamment associée aux décisions, elle ne comprend pas toujours la stratégie de l'entreprise, et se retrouve de plus en plus dans une position d'exécutant, sans réel pouvoir, ce qui se reflète dans sa motivation et a un effet démultiplicateur potentiellement dévastateur.

A quoi est-ce dû ?
Ce phénomène est d'abord imputable à la course à la taille de nombreuses entreprises. Chez certaines, on a relevé plus de 12 niveaux de hiérarchie. Pour résoudre ce problème, il faut alléger les structures hiérarchiques et transformer les modes de fonctionnement dans le sens d'une plus grande association et responsabilisation du management intermédiaire.

Votre étude souligne aussi un autre phénomène, la difficulté à trouver des patrons de qualité pour les grandes entreprises ?
En effet, aujourd'hui diriger une grande entreprise internationale nécessite un profil qui inclut de nouvelles compétences, quelque soit le secteur. Auparavant, il suffisait de savoir gagner de l'argent. Aujourd'hui, lala gestion est devenue plus complexe. Il faut être capable de fixer un cap dans un monde devenu plus volatile, être diplomate auprès de parties prenantes de plus en plus nombreuses et intrusives, et s'adapter en permanence. De tels talents sont rares, et on note une véritable compétition entre les entreprises pour les garder. C'est désormais un avantage compétitif pour une grande entreprise que de s'organiser pour faire émerger en son sein ce type de profil plutôt que de devoir le chercher ailleurs.

Cela n'est-il valable que pour les hauts dirigeants ?
Non, il y a une véritable pénurie de talents chez les managers, en particulier dans les pays émergents comme l'Inde et la Chine où le « turnover » est élevé. Mais la France par exemple pourrait connaître ce problème entre 2020 et 2030, en raison de la faible croissance économique du pays qui pousse les talents à chercher ailleurs. En Allemagne, en revanche, le problème est déjà actuel mais davantage lié à la faiblesse de la démographie.

Quelles sont les solutions ?
Favoriser entre autres la mobilité des diplômés ou des cadres expérimentés de haut niveau, en ouvrant davantage les frontières comme le font déjà l'Australie, Singapour ou le Canada.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 4
à écrit le 29/04/2011 à 9:17
Signaler
Il y a en effet pénurie de talents car le recrutement des managers est un cercle fermé. En France, il ne suffit pas d'être compétent, il faut être fils de quelqu'un. Sinon, vous ne serez personne. Et le fils de quelqu'un peut être très mauvais, ce n'...

le 09/05/2011 à 11:08
Signaler
Comme vous avez raison! C'est bien les oligarques héréditaires (qu'on appelle "ELITE") qui vont conduire à la faillite de ce pays!

le 17/11/2011 à 18:27
Signaler
Exact On a tous l'image de MR Sarkozy qui nous a fais croire que son fils etait tellement "Bon" ... "L'opposition dénonce la nomination annoncée de Jean Sarkozy, fils du président âgé de 23 ans, à la tête du plus grand quartier d'affaires de ..."

à écrit le 18/01/2011 à 17:29
Signaler
Il y à 15 ans ,80% des dirigeants étaient autodidactes , MONNET un des pères de l'Europe (1950) l'était aussi, aujourd'hui ,sans l'ENA point de salut , pour quel résultat ?

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.