La contrainte du hamster et du couteau suisse

Chaque semaine, découvrez les chroniques sur la vie au bureau réalisée par Sophie Peters. Anecdotes, conseils, expériences : pour sourire mais aussi mieux se sentir dans son job.

 

Êtes-vous plutôt hamster ou couteau suisse ? Ma question vous étonne ? Je vous explique : depuis plusieurs mois, lorsque je partage avec des femmes ou des hommes des confidences sur leur vie professionnelle, mais aussi privée, cela finit invariablement par l'une de ces deux images. Dans un sourire fatigué teinté d'anxiété la première raconte : « Je me sens comme un hamster qui pédale dans sa petite roue. Je n'en vois pas la fin et je me demande quand tout cela va s'arrêter. » La seconde est un peu plus positive mais tourne vite à l'amertume : « Je suis un couteau suisse, je fais tout y compris ce qu'il y a de plus ingrat. De toute façon je n'ai pas le choix. » Contrainte. Voilà où nous en sommes.

 

Heureux et rassurés d'avoir encore un job, on se dit tous qu'il faut rester dans la course, augmenter la rigueur de notre gestion, sous peine d'être « précarisé ». On a le sentiment qu'il faut « se défoncer » toujours plus. Etre liés en permanence avec nos engins « intelligents », nous sommes devenus de vastes étendues sans frontières intérieures. Tous pris dans un faisceau inextricable d'informations à ingurgiter et de décisions à prendre, rêvant de nous en échapper. Savez-vous que la dernière tendance en matière de tourisme, ce sont les « voyages intérieurs » ? C'est dire notre besoin infini de nous retrouver. Car à force d'être trop centrés sur l'action nous avons perdu notre capacité d'introspection et ce faisant, les données de notre système de référence.

 

 

 

 

Sortir de la contrainte

 

 

 

 

Ce à quoi nous croyons vraiment, ce qui nous forge comme sujet. Savoir à un moment s'arrêter, faire un « break », est désormais essentiel. Revenir sur notre vie pour identifier les moments clés, réfléchir aux transformations qu'ils ont induites en nous, et mesurer en quoi ils ont durablement influencé notre propre construction. Voilà la meilleure façon de savoir à quoi nous croyons vraiment, de trouver notre sens et d'utiliser au mieux nos atouts. Sans se laisser mener par les éléments extérieurs. Sortir de la contrainte, c'est sortir de la position d'objet. Mais, pour être sujet, il nous faut un projet personnel. Au-delà de ce qui nous est proposé, de ce que nous avons choisi, que voulons-nous ? Rien n'est futile en la matière.

 

Le projet oriente et nous aide à savoir où nous tourner. Il diminue la peur. Se laisser porter par les autres et par les événements ne nous rend pas heureux. D'autant que la fuite en avant dans l'activisme professionnel constitue souvent notre meilleur alibi pour se procurer l'illusion d'avoir donné un sens à sa vie quand d'autres repères ont disparu (éclatement de la famille, déceptions sentimentales, difficultés relationnelles). Or être dépendant de notre environnement est le plus fort générateur de stress. C'est même physiologique, le c?ur accélère et le corps se met sous tension. Pour sortir du sentiment d'impuissance (celui du hamster) ou de celui de se croire indispensable (le couteau suisse), il faut se mettre au service de son objectif (être sujet) et non se brancher en permanence sur l'extérieur (un objet dans le projet des autres). Mais attention ! Le hamster tombe vite en dépression quand il ne peut plus pédaler. Quant au couteau suisse, il faut le manier avec précaution sous peine de se blesser. L'un comme l'autre, soyez prudent. Allez-y doucement, en vous respectant. Commencez peut-être par vous programmer un petit « voyage intérieur » dans les prochains jours.
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