Les fèves bloquées en Côte d'Ivoire avivent les tensions sur le cacao

Les cours du cacao ont touché un record depuis 32 ans à New York. La suspension prolongée des exportations ivoiriennes déséquilibre le marché.
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Derrière les murs des entrepôts portuaires de San Pedro, principal port d'exportation de Côte d'Ivoire, repose un trésor. Entre 200.000 et 300.000 tonnes de cacao, interdites d'exportation depuis le 23 janvier dernier par le président élu Alassane Ouattara. Au prix actuel, soit 3.652 dollars la tonne, ces fèves représentent un pactole : près de 800 millions de dollars. Le président sortant Laurent Gbagbo, dont les partisans ont déclenché une nouvelle vague de violence mercredi à Abidjan, lorgnerait sur cet or végétal. « Les stocks de San Pedro s'avèrent à double tranchant aujourd'hui » estime un spécialiste. Les exportations avaient été interrompues afin de couper les ressources du président sortant, qui récupère une taxe de 50 % sur le cacao. Si Laurent Gbagbo mettait la main sur ces réserves, la crise ivoirienne, face à laquelle une nouvelle tentative de médiation des pays africains a de nouveau échoué mercredi, en serait aggravée. Une perspective stressante pour les acheteurs. Le cacao de San Pedro fait déjà défaut au marché international. Selon l'ICCO, l'offre de la matière première devait présenter un léger surplus cette année, un peu plus de 200.000 tonnes. Soit exactement le montant bloqué en Côte d'Ivoire. Sans ces stocks, le marché est forcément tendu. Les cours du cacao ont touché à New York un plus-haut depuis 32 ans cette semaine, alors que le marché apprenait la poursuite du blocus des sacs de fèves dans leur pays de production, et ce jusqu'au 10 mars prochain minimum. Et le redoublement des violences pourrait ralentir le commerce souterrain. « Les sacs de cacao partent directement de brousse vers le Togo, le Liberia et la Sierra Leone, ce qui explique que les stocks officiels de l'Intercontinental Exchange progressent » assure Eric Sivry, responsable des options sur marchés agricoles chez Marex.

Fonds spéculatifs sur l'ICE

Malgré un approvisionnement en apparence correct, les cours du cacao sur l'ICE, aux États-Unis, affichent une progression exponentielle par rapport au marché londonien du Nyse Liffe. Soit un gain de 15 % depuis le début du blocus, alors que, dans le même temps, le prix du cacao à Londres a progressé de 10 %. Une différence qui s'expliquerait par l'arrivée de fonds spéculatifs sur l'ICE, attirés par la situation politique hasardeuse qui a fait exploser la volatilité. En un mois, « le prix de l'assurance sur les options de cacao a grimpé de façon considérable, parce qu'on a aucune certitude sur leur évolution future », assure le spécialiste. Si le cacao frôle aujourd'hui des sommets, il pourrait en retomber brusquement en cas de résolution du conflit. La mise sur le marché potentielle des réserves de San Pedro pourrait alors faire perdre 500 dollars à la tonne de cacao.

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