Comment expliquer la remontée du taux de marge des entreprises ?

Après avoir touché un plancher inédit en 2014, le taux de marge des entreprises remonte. Les mesures gouvernementales produisent leurs effets. La chute des cours du brut apporte également son écot. Mais l'investissement et l'emploi restent en berne. L'exécutif intensifie sa politique de l'offre.
Fabien Piliu
La dépréciation de l'euro apporte un peu d'air aux entreprises qui exportent vers le Grand large

Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) ne servirait à rien ? La remontée du taux de marge des entreprises enregistrée ne trouverait son origine que dans la chute des cours du brut ? Au-delà du jeu de mots, le titre de la dernière note de conjoncture - « Un peu de carburant pour la consommation et pour les marges -, publiée jeudi en soirée, pourrait le laisser penser.

Selon l'Insee, après avoir touché un plancher inédit en 2014, à 29,7% de la valeur ajoutée, le taux de marge remonte. Il devrait s'élever à 31,3% à la fin juin, , soit son plus haut niveau depuis le premier trimestre 2011. « Il se rapprocherait ainsi un peu de sa moyenne sur la période d'avant-crise, soit 32,7 % entre 1988 et 2007 », précise l'Insee.

Les effets du CICE

Que le gouvernement se rassure, ses efforts ne sont pas vains. Fortement décrié en raison de sa complexité supposée par certains économistes et chefs d'entreprises qui auraient préféré un simple allégement de charge à un crédit d'impôt, le CICE produit bel et bien ses effets, effets qui se conjuguent à ceux engendrés par les mesures contenues dans le Pacte de responsabilité entrées en vigueur le 1er janvier.

Les explications de l'Insee sont claires. " En premier lieu, les entreprises reçoivent plus de subventions sur la main-d'œuvre en raison de l'augmentation du taux du CICE, de 4 % à 6 %, ce qui contribuerait à augmenter le taux de marge des sociétés à hauteur de 0,6 point. En outre, les allégements de cotisations sociales patronales sont accrus dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité, ce qui contribuerait à rehausser le taux de marge de 0,4 point ", explique l'Institut.

Aux effets de ces mesures gouvernementales, symboles de la politique de l'offre entamée début 2014, s'ajoutent ceux découlant de la baisse des prix des matières premières et en particulier du baril de brut qui améliore les termes de l'échange pour les entreprises françaises. Il s'élevait en moyenne à 100 dollars en 2014. Il oscille actuellement aux alentours de 55 dollars... Au total, cette chute du prix du baril aurait relevé de 0,3 point le taux de marge des entreprises qui, selon l'Insee, profiterait également d'une augmentation de la productivité du travail et de la quasi-stagnation des salaires au deuxième trimestre.

Pas de créations d'emplois à la clé

Cette remontée du taux de marge est une bonne nouvelle. C'est incontestable. Mais elle ne se traduit pas encore en investissements nouveaux et en créations d'emplois, trop d'entreprises, et en particulier de TPE et de PME souffrant de tensions de trésorerie et d'une absence de visibilité de leurs carnets de commande. La crise de 2008-2009 a fait trop de dégâts dans le tissu productif. L'inertie est aujourd'hui de mise. Michel Sapin, le ministre des Finances en est bien conscient.

"Il faut aujourd'hui que les entreprises retrouvent leur marge car sans cela, elles ne pourront pas embaucher. Mais j'y crois. Les marges retrouvent peu à peu un élan. Il faut que ces marges se transforment en embauche. Tout le monde doit prendre sa part de responsabilité. Les entreprises sont en capacité d'investir, il faut désormais qu'elles le fassent. Il faut qu'elles retrouvent cette confiance qui passe par la constance de notre politique. La première chose à faire est de tenir le cap. On sait où on va. Le pire serait le zig zag. Le monde économique a besoin de confiance et de constance ", a-t-il expliqué vendredi sur l'antenne de RTL, annonçant dans la foulée de nouveaux gestes du gouvernement dans le domaine fiscal. Selon l'Insee, l'investissement dans le secteur manufacturier, qui a déjà reculé de 0,7% et de 0,1 en 2013 et 2014, continuerait actuellement à baisser. Il devrait céder 0,6% au premier semestre, particulièrement dans la construction.

" Au 1er janvier au niveau des cotisations, de l'Urssaf, tout a baissé. Que chacun regarde les faits, sur le Smic, il n'y a plus de cotisations. Début 2015, pour l'ensemble des entreprises, c'est 12 milliards d'allègement de charges grâce au CICE. Et nous persisterons dans cette voie ", a poursuivi le ministre.

L'exécutif est sur les rangs pour relancer l'investissement

En attendant que soit lancé le plan d'investissement européen porté par Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, on sait déjà que le CICE sera transformé en un allégement de charges classique à la fin du quinquennat, en 2017. " Toutes les entreprises qui décideront d'accélérer leurs projets, d'aller plus vite pour investir, se verront accorder un dispositif fiscal qui améliorera leur trésorerie et la rentabilité de l'opération ", a déclaré ce vendredi François Hollande devant les salariés et les dirigeants de la Forge de Trie-Château (Oise). Pour relancer l'investissement des collectivités territoriales, ce qui permettrait de stimuler un secteur du BTP en berne, le chef de l'Etat a également annoncé un remboursement anticipé de la TVA. Mercredi, lors du Conseil des ministres, ce sera au tour de Manuel Valls de faire des annonces pour relancer l'investissement. Il n'y aura plus qu'à attendre la réaction des chefs d'entreprises.

Fabien Piliu
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