Coronavirus : l'hôpital de campagne à Mulhouse sera prêt ce lundi

Par Olivier Mirguet, à Mulhouse  |   |  744  mots
"On a réalisé une grosse opération logistique avec la conception, la validation, l'acheminement et le déploiement dans des délais contraints : 24 heures pour être désignés, 24 heures pour être acheminés, 48 heures pour être déployés", calcule le chef d'escadron Nicolas, chef des opérations du RMED de La Valbonne. (Crédits : Olivier Mirguet)
REPORTAGE. Le service de santé des armées va mettre en service son élément militaire de réanimation, conçu et construit en cinq jours sur le parking du centre hospitalier régional de Mulhouse. Ses 30 lits de réanimation vont délester ceux de l'hôpital civil, saturé.

Le parking du centre hospitalier Emile Muller a pris des allures de camp militaire, ce week-end à Mulhouse. Afin de délester les services de réanimation saturés en pleine crise du coronavirus, les militaires du Régiment Médical (RMED) de La Valbonne ont installé des tentes qui abriteront 30 lits de réanimation. Les tentes de cet élément militaire de réanimation, conçu dans un format inédit, couvrent une emprise de 1.000 m2.

"En temps normal, nos hôpitaux de campagne accueillent des blessés de guerre et des blessés chirurgicaux. Le défi consiste à adapter nos structures à des patients atteints du Covid, qui nécessitent une prise en charge respiratoire. Nous montons une structure ad-hoc, comparable au centre de traitement des soignants qu'on a envoyé en Guinée à Conakry en 2015 lors de la crise d'Ebola", explique le médecin principal Antoine, directeur des opérations pour le montage de la structure à Mulhouse.

Dimanche après-midi, sous les tentes au plafond bas, les équipes étaient encore occupées à installer des lits, des matelas, des équipements électriques, dans un ballet de tire-palettes et de chariots élévateurs. Lundi matin, les tentes seront prêtes avec leurs équipements médicaux (eau, oxygène, chauffage). Il reviendra aux médecins militaires de valider le concept, sous la responsabilité du médecin général Jacques Escarment. Ce général de deuxième section, rappelé pour cette mission, a été directeur de l'hôpital Desgenettes à Lyon. Il est anesthésiste réanimateur de formation. Les premiers patients seront accueillis en début ou en milieu de semaine.

"Configuration particulière"

Critiqué pour son délai de mise en action depuis l'annonce le 16 mars par Emmanuel Macron de l'installation de cet hôpital militaire, le service de santé des armées se justifie en insistant sur la "configuration particulière" à Mulhouse. "On a réalisé une grosse opération logistique avec la conception, la validation, l'acheminement et le déploiement dans des délais contraints : 24 heures pour être désignés, 24 heures pour être acheminés, 48 heures pour être déployés", calcule le chef d'escadron Nicolas, chef des opérations du RMED de La Valbonne.

La chaîne de ravitaillement médical des armées se situe sur trois sites principaux à Orléans, Vitry-le-François et à Marseille. "On a pris ce qu'on avait, qui sert à traiter les blessés de guerre. Très rapidement, on a choisi une structure sous tente parce qu'il fallait aller vite. On a récupéré du matériel, de l'éclairage, de l'oxygène, des ventilateurs, des pousse-seringues qu'on a sur des étagères, et qui sont prêts à partir en opération. On a réfléchi au format des équipes, on les a sélectionnées et projetées ici", résume le chef d'escadron Nicolas. "Habituellement, en opérations extérieures, notre ennemi n'est pas le Covid", poursuit le commandant Antoine qui précise : "On a mis 5 jours pour développer ce module. Récemment, pour mettre au point notre nouvelle antenne chirurgicale, on avait pris deux ans".

L'hôpital de campagne de Mulhouse sera armé par une centaine de personnels militaires dont 10 médecins et 60 à 70 soignants. Deux infirmières hygiénistes ayant travaillé en 2015 sur Ebola, rompues à la mise en place de mesures pour éviter la contamination des soignants, vont assurer des formations à l'hygiène. La métropole compte huit hôpitaux militaires à Saint-Mandé (spécialisé dans les maladies infectieuses), à Clamart, Brest, Toulon et Marseille, ainsi qu'à Lyon, Metz et Bordeaux en format "civilo-militaire". "Nos soignants sont partis d'hôpitaux où il y a aussi des patients avec du Covid", relève le commandant Antoine.

"La situation va rester difficile"

L'hôpital militaire va s'intégrer dans le parcours de soins des patients de la région de Mulhouse. "La situation va rester difficile malgré ce renfort", prévoit déjà Christophe Lannelongue, directeur régional de l'Agence régionale de santé (ARS) du Grand-Est. L'hôpital de Mulhouse a organisé la semaine dernière une série de transferts de patients vers les hôpitaux militaires de Toulon et Marseille, puis vers Bordeaux à bord d'un Airbus A330 médicalisé de l'armée de l'air. Les hôpitaux du Bade-Wurtemberg, de la Sarre et de Rhénanie-Palatinat ont offert leurs services pour l'accueil de patients français. Dimanche soir, selon l'ARS, le flux de patients en réanimation avait augmenté de 38 % en 24 heures.