Covid-19 : 13,3 millions de demandes de chômage partiel, les jeunes en première ligne

Le dernier bilan établi par le ministère du Travail montre une explosion des demandes de chômage partiel pendant la période de confinement. Le redémarrage de l'activité devrait permettre de ralentir le nombre de dossiers déposés chaque semaine auprès de l'administration. En revanche, la plupart des économistes s'attendent à une hausse du chômage dans les semaines à venir, particulièrement chez les jeunes.
Grégoire Normand
(Crédits : Reuters)

Les chiffres du marché du travail donnent le tournis. Selon un dernier bilan rendu public par la direction statistique du ministère du Travail mercredi 10 juin, plus de 13,3 millions de salariés ont fait l'objet d'une demande de chômage partiel entre le 1er mars et le 8 juin 2020. Au total, plus de 1,05 million d'entreprises ont déposé des demandes auprès des services du ministère. Ce qui représente environ 5 milliards d'heures chômées demandées. Et beaucoup d'entreprises pourraient encore avoir recours à ce mécanisme dans les semaines à venir. En effet, l'économie française risque de souffrir cette année. Selon les dernières projections de la Banque de France, le produit brut pourrait reculer de 10,3% en 2020, avant de rebondir à 6,9% en 2021 et 3,9% en 2022. Lors d'un point presse mercredi 10 juin, l'économiste de BNP-Paribas Hélène Baudchon a dégradé ses prévisions:

"Le scénario le plus probable est une reprise de la croissance en U. Après la chute au premier semestre, la reprise doit avoir lieu au second semestre mais on ne devrait pas revenir à la normale avant un moment. Il y aura d'abord un rebond mécanique. Le creux du U signifie le caractère progressif de la reprise. Le retour à la normale ne se ferait pas avant 2022."

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Le tertiaire, le commerce et la construction en première ligne

Tous les secteurs n'ont pas été frappés de la même façon pendant les huit semaines de confinement. Parmi les branches étudiées, les activités spécialisées, scientifiques et techniques, les services administratifs et de soutien arrivent en tête des dossiers déposés (16%) avec le commerce (16%). Arrivent ensuite la construction (11%), et l'hébergement-restauration (9%). La plupart des entreprises de ces secteurs ont fait l'objet de fermetures administratives drastiques pendant le pic du confinement.

À l'opposé, certains secteurs, souvent jugés comme essentiels, ont été épargnés pendant cette mise sous cloche de l'économie tricolore. Dans l'énergie, les entreprises de cokéfaction et de raffinage n'ont quasiment pas demandé d'activité partielle auprès de l'administration. Dans l'agriculture également, la proportion de demandes est proche de zéro.

Les petites entreprises dans le rouge

Là encore, il existe de fortes disparités selon la taille des entreprises. Selon les données communiquées par le ministère de la rue de Grenelle, les petits établissements regroupent la majorité des démarches effectuées pour le chômage partiel. Ainsi, 31% des salariés ayant fait l'objet d'une demande de chômage partiel travaillent dans une entreprise de 20 salariés. À l'opposé, 21% des salariés ayant fait l'objet d'un dossier travaillent dans des entreprises de plus de 1.000 salariés.

Sans surprise, l'Ile-de-France concentre la majorité des demandes (25%). Viennent ensuite la région Auvergne-Rhône-Alpes (12,5%), la Nouvelle-Aquitaine (7,7%) et l'Occitanie (7,5%). À l'inverse, la Corse (0,4%), le Centre-Val-de-Loire (3,2%), et la Bourgogne-Franche-Comté figurent en bas de tableau.

Un chômage en hausse à venir

La levée progressive des mesures de confinement depuis le mois de mai, le durcissement des mesures de chômage partiel depuis le premier juin, et le lent rebond de l'activité économique risquent de provoquer une hausse du chômage. Déjà, de grands groupes comme Renault ont annoncé des fermetures de sites industriels dans les semaines à venir et des vagues de suppressions de postes. Dans leurs dernières prévisions, les économistes de la Banque de France s'attendent à une forte hausse du chômage à 10,1% en 2020, 11,7% en 2021 et un recul à 10,4% en 2022.

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Effondrement de l'emploi intérimaire (-41% sur un an)

Les derniers chiffres de l'intérim illustrent l'ampleur du choc économique. Selon les derniers chiffres de la Dares publiés ce jeudi 11 juin, l'emploi intérimaire a reculé de 40% au premier trimestre, soit une baisse de 318.000 postes en trois mois.

"La baisse concerne tous les secteurs, mais elle est plus forte dans la construction (-60,5 % après -2,6 %) et l'industrie (-40,7 % après -2,1 %) que dans le tertiaire (-31,0 % après +2,1 %). Sur un an, tous secteurs confondus, l'intérim chute de 41,0 %", soulignent les statisticiens.

Comme souvent, les intérimaires, les personnes en contrat à durée limitée, les saisonniers servent de variables d'ajustement en cas de fortes baisses d'activité. Si le repli de l'économie se prolonge dans les mois à venir, des milliers de postes stables pourraient être supprimés à leur tour avec des conséquences désastreuses sur le marché du travail.

Les jeunes, premières victimes

Les jeunes et les étudiants qui vont entrer sur le marché du travail dans les prochaines semaines risquent de se retrouver au chômage si la conjoncture ne s'améliore pas rapidement. Lors d'une réunion au ministère du Travail avec les partenaires sociaux en début de semaine, les membres du cabinet de la ministre du Travail Muriel Pénicaud ont planché sur le cas des jeunes à partir d'un document réalisé par les services de l'Insee et de de la Dares. Selon ce travail communiqué par l'entourage du ministre aux journalistes, la situation des jeunes est particulièrement alarmante. Le nombre de demandeurs d'emploi de moins de 25 ans en catégorie A a bondi de 40% pendant la période de confinement.

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Du côté de l'apprentissage, le tableau dressé par les statisticiens est très sombre avec des perspectives pessimistes pour les entrées en apprentissage dans un grand nombre de secteurs. A titre d'exemple, les embauches d'apprentis pourraient baisser de 35% en 2020 dans la fabrication de matériel de transport. Ces premiers indicateurs témoignent déjà des possibles répercussions à long terme sur les jeunes actifs. Si le gouvernement a déjà présenté un plan de soutien à l'apprentissage il y a quelques jours, les jeunes pourraient payer un lourd tribut lors de cette crise. Parmi les principaux chantier à venir, Emmanuel Macron a demandé à Muriel Pénicaud de plancher sur un plan de soutien spécifique aux jeunes.

> Lire aussi : La crise du Covid-19 accouchera-t-elle d'une génération sacrifiée ?

Grégoire Normand
Commentaires 2
à écrit le 12/06/2020 à 17:09
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PSA Groupe Peugeot supprime les intérimaires français sur ses sites français pour les remplacer par les espagnols et polonais. Le BTP et les constructeurs de maisons individuelles n'embauchent que des turques, polonais, roumains... comme dans l'agric...

à écrit le 12/06/2020 à 9:55
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Hé ben, déjà que nos jeunes vomissent le travail tel que l'ont généré nos mégas riches financiers, ça va pas commencer à ne pas être simple. DE ce fait ils vont encore faire venir en masse des crèves la faim d'europe de l'est, on est pas près de ...

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