Gilets jaunes : la "loi anti-casseurs" de Castaner déjà décriée comme "liberticide"

Par latribune.fr  |   |  535  mots
(Crédits : Gonzalo Fuentes)
Selon le Premier ministre, cette proposition, élaborée en réponse aux violences ayant émaillé les manifestations des "Gilets jaunes", "vise à prévenir les violences lors des manifestations et à sanctionner leurs auteurs". Ce texte, qui prévoit aussi la création d’un fichier de personnes interdites de manifestations, le député UDI Charles de Courson l'a jugé pour sa part “probablement anticonstitutionnel”, “contraire à tous nos engagements internationaux” et “dangereux pour les libertés publiques”.

Le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, a défendu mardi devant la commission des Lois de l'Assemblée la proposition de loi "anti-casseurs" en préparation, dont certaines dispositions sont considérées comme liberticides par leurs détracteurs.

Relancée début janvier par le Premier ministre, Edouard Philippe, en réponse aux violences ayant émaillé les manifestations des "Gilets jaunes", le texte "visant à prévenir les violences lors des manifestations et à sanctionner leurs auteurs" se base sur un projet du sénateur Les Républicains Bruno Retailleau adoptée en octobre.

"Il est important que nous puissions doter notre ordre public des meilleurs moyens de sa défense. Parce qu'il n'y a pas dans un pays comme le nôtre de libertés sans ordre public", a argumenté Christophe Castaner devant la commission.

En réponse aux questions de députés parfois sceptiques sur le bien-fondé de la proposition de loi "anti-casseurs", Christophe Castaner a défendu un texte "qui vise à protéger les manifestants".

Interdictions administratives et périmètre de fouilles

L'article 1, relatif à l'instauration d'un périmètre de sécurité autour des lieux de manifestation, "a pour but de procéder à des fouilles de personnes et, le cas échéant, à la saisie d'armes, c'est le seul objectif", a dit le ministre.

Également controversé, l'article 2 sur l'interdiction administrative de manifester entend s'inspirer des mesures visant à empêcher les hooligans d'accéder aux stades de football.

Une loi contre "150 à 200 personnes maximum"

"Une condamnation définitive, aujourd'hui, cela peut prendre plusieurs années", a dit Christophe Castaner. "S'appuyer sur le temps judiciaire, c'est faire en sorte que ceux que l'on voit casser le samedi puissent le samedi suivant être à nouveau devant les mêmes forces de l'ordre."

Il s'agit, a-t-il ajouté, "non pas d'interdire à tout va" mais de "prendre en compte la centaine, 150, 200 personnes maximum qui aujourd'hui portent ces violences, incitent aux violences, tapent systématiquement sur les forces de l'ordre."

"Probablement anticonstitutionnel", selon Charles de Courson

L'ex-magistrate devenue députée MoDem Laurence Vichnievsky a proposé un amendement pour "mieux encadrer" cet article que le député UDI Charles de Courson a jugé pour sa part "probablement anticonstitutionnel", "contraire à tous nos engagements internationaux" et "dangereux pour les libertés publiques".

Le texte prévoit aussi la création d'un fichier de personnes interdites de manifestations, mais un fichier, promet le Premier ministre, dont les fiches seront effacées après le temps d'interdiction de manifester.

"La fiche que nous souhaitons créer n'existera dans les fichiers que durant le temps de l'interdiction, pas au-delà. Il n'est pas possible de croiser les fichiers", a expliqué Christophe Castaner.

Interdiction de dissimuler son visage

Autre disposition de la proposition de loi : l'introduction d'un délit de dissimulation du visage lors d'une manifestation sur la voie publique. Un amendement LREM prévoit de préciser le champ de la sanction dans ce domaine.

Le député LREM Sacha Houlié a évoqué pour sa part un amendement visant à "évaluer annuellement" la mise en oeuvre du contenu des trois premiers articles du texte. Christophe Castaner a jugé "cette temporalité un peu excessive".

La proposition de loi doit être examinée la semaine prochaine dans l'hémicycle.