Loi immigration : LR n'acceptera « ni marchandage ni saucissonnage »

Par latribune.fr  |   |  790  mots
(Crédits : © LUDOVIC MARIN/AFP)
La majorité présidentielle doit « faire preuve de courage » en adoptant la version renforcée par le Sénat du projet de loi sur l'immigration, a averti Bruno Retailleau, président des sénateurs Les Républicains (LR). Emmanuel Macron appelle quant à lui à un « compromis intelligent au service de l'intérêt général ».

« Nous n'accepterons ni marchandage ni saucissonnage », a-t-il souligné lors d'une interview accordée au Figaro vendredi, à quelques jours de la commission mixte paritaire où sept députés et autant de sénateurs chercheront à trouver un compromis sur un texte commun.

En attendant, des négociations intenses sont en cours entre le gouvernement et la droite. Retailleau affirme que la droite veut savoir si la majorité présidentielle aura le courage d'accepter, malgré ses désaccords internes, le texte tel qu'approuvé par les sénateurs.

Les sénateurs ont notamment supprimé l'Aide médicale d'État (AME) pour les sans-papiers, transformée en Aide médicale d'urgence. Sur ce point, Retailleau suggère que le sujet soit traité dans un autre texte « en tout début d'année ».

Un autre point de friction concerne la durée de résidence requise pour bénéficier des allocations familiales, que la droite veut fixer à cinq ans.

« La marge de négociation pourrait être de différencier les étrangers travaillant et cotisant de ceux ne travaillant pas et ne cotisant pas », précise-t-il.

Cependant, LR refuse catégoriquement d'accepter une mesure de régularisation des travailleurs sans papiers dans les métiers en tension moins restrictive que celle votée par les sénateurs.

« Ce serait une prime à la fraude et un appel d'air que nous n'accepterons pas », prévient Retailleau.

Parmi d'autres exigences de la droite, il mentionne également « le rétablissement du délit de séjour irrégulier » et exclut toute facilitation de l'accès au marché du travail pour certains demandeurs d'asile.

Il explique également que, lors des négociations actuelles, « une bonne partie de nos échanges a porté sur le code de la nationalité », que la droite souhaite durcir malgré la réticence de la majorité.

Sans tous ces points abordés dans l'interview, Retailleau estime que « le texte du Sénat est dénaturé et que, par conséquent, il ne pourra y avoir d'accord ».

Macron appelle à un « compromis intelligent »

Emmanuel Macron a appelé vendredi à un « compromis intelligent » sur la loi immigration « au service de l'intérêt général », précisant qu'il tirerait « les conséquences » du résultat des négociations en cours avec l'opposition de droite au Parlement.

"Ce ne serait pas sérieux de traiter un texte sensible au 49.3 alors que les oppositions ont tout fait pour qu'il n'y ait pas de débat", a dit le chef de l'Etat depuis Bruxelles en référence à l'article de la Constitution permettant d'imposer un projet de loi sans vote, qu'il a utilisé pour les retraites mais exclu pour l'immigration.

Le gouvernement a essuyé lundi un lourd échec à l'Assemblée nationale quand les oppositions coalisées ont rejeté l'examen de son texte sur l'immigration avant même le début des débats. Emmanuel Macron a décidé de s'en remettre à une commission mixte paritaire qui réunira lundi des députés et des sénateurs de tous bords pour tenter de trouver un compromis, sur la base du texte adopté en première lecture par le Sénat, qui l'a nettement durci.

« Moi je suis pour le résultat et le pragmatisme », a dit le président, sans entrer dans le détail de ses préférences en vue de la négociation serrée en cours avec le parti Les Républicains, sur fond de tensions au sein même du camp macroniste.

« Notre pays a besoin d'améliorer ses règles pour mieux lutter contre l'immigration illégale, les trafiquants, contre ceux qui profitent de la misère du monde et qui affaiblissent notre système en mettant trop de pression sur lui. »

Il a aussi étrillé publiquement, comme il l'avait déjà fait devant ses troupes, « l'immense responsabilité qu'ont prise deux forces historiques de gouvernement... Je dis historiques parce qu'elles ont décidé de ne plus l'être » notamment « en faisant le choix de voter avec La France insoumise et le Rassemblement national ». Il visait les Républicains et le Parti socialiste.

« Ça a été un jeu d'obstruction et de refus de dialogue que les Français ne peuvent pas comprendre. Moi, je ne comprends pas non plus. Parce qu'on peut être d'accord ou pas d'accord, mais je trouve que c'est bizarre de ne pas dialoguer », a insisté Emmanuel Macron.

Interrogé sur la responsabilité de sa Première ministre Elisabeth Borne et de son ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, il a relevé que ce dernier n'avait « jamais ménagé sa peine » et que la cheffe du gouvernement avait « su engager des discussions avec sa majorité, mais aussi avec les forces d'opposition qui étaient prêtes à revenir pour trouver un dialogue et un compromis ».

(avec agences)