Pandémie : des pertes colossales en 2020, un PIB français à +7,1% en 2021

Le Covid et les mesures pour endiguer la propagation du virus ont entraîner une perte de revenus de l'ordre de 191 milliards d'euros en 2020 selon l'OFCE. Pour 2021, les économistes anticipent un rebond de la croissance d'environ 7,1% si la situation sanitaire s'améliore et que la campagne de vaccination se déroule dans de bonnes conditions.
Grégoire Normand
La propagation du virus sur l'ensemble du territoire et les mesures sanitaires ont entraîné des pertes faramineuses absorbées en grande partie par la collectivité.
La propagation du virus sur l'ensemble du territoire et les mesures sanitaires ont entraîné des pertes faramineuses absorbées en grande partie par la collectivité. (Crédits : Benoit Tessier)

La pandémie a entraîné un effondrement brutal de l'économie. Selon la dernière évaluation de l'observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) rendue publique le 11 décembre, les pertes de revenus sont estimées à 191 milliards d'euros sur l'ensemble de l'année 2020. "Le bilan est à la hauteur de la crise. Les pertes sont de l'ordre de 200 milliards. Les administrations publiques vont absorber deux tiers du choc et un tiers est à la charge des agents privés comme les entreprises et les ménages" a expliqué l'économiste Mathieu Plane lors d'un point presse. Les différentes vagues d'épidémie, la pénurie de masques et de médicaments au printemps et la saturation des hôpitaux ont obligé l'exécutif a mettre en oeuvre un arsenal important de mesures d'urgence économiques et sociales. En dépit de ces filets de sécurité, le produit intérieur brut devrait plonger de 9,5% en 2020 avant de rebondir à 7,1% en 2021. "C'est une crise inédite depuis la Seconde guerre mondiale. La plus grave que la France ait connu est celle des subprimes avec une récession d'environ -3%. C'est donc une crise trois fois plus importante que la dernière récession", a-t-il poursuivi.

125 milliards d'euros absorbés par les administrations publiques

La propagation du virus sur l'ensemble du territoire et les mesures sanitaires ont entraîné des pertes faramineuses absorbées en grande partie par la collectivité. Sur les 191 milliards d'euros, 125 milliards ont été encaissés par les administrations publiques. Les entreprises devraient environ absorber 60 milliards et les ménages et entrepreneurs individuels devraient encaisser une perte d'environ 8 milliards, soit 4% du total.

Le prolongement des premières mesures d'urgence décidées au printemps et le renforcement de certains dispositifs comme le fonds de solidarité pour le dernier trimestre ont sérieusement accru la part des pertes de revenus compensées par les administrations publiques. "Les coûts fixes non absorbés comme les bâtiments sont importants Le gouvernement a fait un pas avec le fonds de solidarité pour absorber ces pertes. 85% des pertes ont été absorbées par les administrations publiques au cours du dernier trimestre. La France n'est pas très loin du "quoi qu'il en coûte" a ajouté Mathieu Plane.

Une montagne d'épargne, surtout pour les plus hauts revenus

La mise sous cloche de l'économie et la fermeture de nombreux établissements ont accéléré les sommes épargnées par les ménages français. Selon les simulations du centre de recherches rattaché à Science-Po Paris, 89 milliards d'euros auraient été accumulés sur l'ensemble de l'année 2020. "Le taux d'épargne des ménages est hors du commun à 21,2% en 2020. Avec la chute de la consommation, l'épargne a bondi de 90 milliards d'euros. C'est un surplus. Cette épargne n'est pas distribuée de la même façon. Cela dépend de la catégorie sociale. Elle est plutôt concentrée sur les hauts revenus" a indiqué l'économiste. Le constat du chercheur corrobore une précédente étude du conseil d'analyse économique (CAE) menée par l'économiste de la London School Economic (LSE) Camille Landais qui rappelait que cette épargne se concentrait sur les 20% des plus hauts revenus.

> Lire aussi : La consommation à nouveau menacée, l'épargne au sommet pour les plus aisés

En effet, beaucoup de ménages situés dans les catégories à bas revenus ont été bien plus exposés que les classes moyennes supérieures et les catégories aisées depuis le printemps. Les secteurs qui font appel à ce type de main d'oeuvre ont souvent été obligés de fermer leurs portes et de mettre leurs salariés au chômage partiel ou de réduire leur coût en se séparant de leurs intérimaires, leurs saisonniers ou leurs CDD. A l'inverse, une grande partie des cadres a pu continué à travailler à distance et ont ainsi préservé leurs revenus. Au moment de la reprise de l'économie, la question de la consommation pour les ménages modestes va être cruciale. En effet, si ceux qui ont la plus forte propension à consommer se retrouvent en détresse financière, l'économie tricolore pourrait avoir des difficultés à redémarrer compte tenu du poids de la demande domestique dans le PIB.

> Lire aussi : Pour sortir de la crise, Terra Nova propose un "chèque vert" pour les plus modestes

Un rebond de la croissance de 7,1% en 2021

La pandémie a donné le vertige aux économistes depuis le printemps. La plupart ont dû revoir leurs méthodes et prendre en compte des données en temps réel pour mesurer l'ampleur de cette crise inédite. "La prévision économique est très dépendante des mesures prophylactiques. Pour 2021, l'exercice a été rendu difficile avec les dernières annonces du Premier ministre jeudi 10 décembre. Notre prévision suppose qu'il n'y ait pas de troisième confinement. On suppose que l'on a une gestion de la crise sanitaire liée à la vaccination progressive de la population. Ce qui devrait alléger les mesures sanitaires. Le rebond est attendu à 7,1%. Le plan de relance n'a pas été revu. Hors plan de relance, le PIB serait environ à 6%. A fin 2021, la situation serait encore très dégradée avec un niveau inférieur de 1,4% à la fin 2019" a indiqué Mathieu Plane. Les annonces relatives au vaccin devraient en effet permettre au gouvernement d'assouplir les mesures d'endiguement. Il reste cependant de nombreuses interrogations sur le consentement de la population, l'efficacité du vaccin et son application en France.

Une reprise en ordre dispersé

La reprise de l'économie ne va pas concerner tous les secteurs de l'économie. "Les différences sont énormes selon les branches. Certains secteurs sont à l'arrêt et d'autres s'en sortent beaucoup mieux. L'aéronautique, les transports, l'hébergement-restauration et les services aux ménages risquent encore de souffrir l'année prochaine. Le redémarrage va en grande partie dépendre de ces secteurs" a expliqué le conjoncturiste.

La crise pourrait en effet laisser de profondes traces dans des secteurs très importants. Les chiffres du commerce extérieur déjà en berne avant la pandémie risquent à nouveau de plonger au regard des points forts de la France à l'export (l'aéronautique, le luxe). "Le déficit extérieur est un vrai problème. Les secteurs où la France se démarquent sont mis à mal notamment dans l'aéronautique, le tourisme. La balance courante se dégrade très vite. La France est très dépendante de l'aéronautique, de l'événementiel. Va-t-il y avoir un retour à la normale ou y aura-t-il des changements structurels ?" s'interroge Mathieu Plane. Pour Xavier Timbeau, directeur de l'OFCE,"la crise du tourisme et de l'aviation va durer plus d'une année. La crise frappe de plein fouet les domaines de spécialisation de la France. C'est peut être un argument pour que la France accélère sa transition énergétique."

Un chômage à 10,6% fin 2021

Sur le front de l'emploi, les indicateurs ne sont pas au beau fixe. Au total, 880.000 emplois auraient disparu au cours de cette année. L'emploi salarié paie un lourd tribut avec 790.000 postes en moins. Les services seraient lourdement affectés avec près de 584.000 postes en moins. Viennent ensuite l'industrie (148.000) et la construction (-54.000). Dans l'emploi salarié, les destructions de postes sont estimées à 90.000. "S'il n'y avait pas eu les mesures d'urgence comme le chômage partiel, il y aurait eu 2,5 millions d'emplois détruits. Le chômage partiel a permis de préserver plus d'1,6 million d'emplois" relève Mathieu Plane. Le chômage grimperait à 9,5% de la population active à la fin du quatrième trimestre 2020 contre 7,9% à la fin du premier trimestre de cette année. "En 2021, il y aura assez peu de créations d'emplois en net. La reprise d'activité devrait permettre de créer 1,6 million d'emploi mais le chômage partiel va diminuer. La sortie du chômage partiel devrait coûter 1,4 million d'emplois."

Grégoire Normand
Commentaires 14
à écrit le 14/12/2020 à 17:31
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En parlant de pandémie : Italie : "L'incertitude persistante quant à l'efficacité thérapeutique de l'hydroxychloroquine, admise par la même Aifa (Agence italienne du médicaments) comme justification d'une évaluation plus poussée dans le cadre d...

le 15/12/2020 à 7:45
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Les allemands ont aussi utilisé massivement hydroxychloroquine de mars à juin, 2 millions de tablettes avec le Luxembourg jusqu' à ce que l' UE demande à Merkel que ce "grand pays devait faire un effort en montrant la voie"".

à écrit le 14/12/2020 à 17:18
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Rappelons que ce n'est pas la pandémie qui a causé la baisse de la création de richesse mais la décision du gouvernement de limiter les conditions de l'activité économique; dans le passé, il y a eu des épidémies tout aussi violentes, mais avons-nous ...

à écrit le 14/12/2020 à 17:17
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C'est de la voyance?

à écrit le 14/12/2020 à 17:07
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Réponse de Gédéon très darwinienne teintée de malthusianisme et de néolibéralisme .Un excellent cocktail ....que les vieux et ceux atteints bien souvent contre leur gré de maladies "comorbides" meurent ,autant de retraites à ne pas honorer et une séc...

à écrit le 14/12/2020 à 16:31
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Un ministre a bien déclaré une année difficile mais nous avons tenu , hélas sans aucun résultat avant le chaos

à écrit le 14/12/2020 à 16:28
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Grosso-modo, pour tenir ses engagements en termes de réduction d'émissions de gaz à effet de serre, l'Humanité doit accepter et apprendre à vivre avec, d'un point de vue de la réduction d'activité économique, un épisode de covid par an, pendant les v...

à écrit le 14/12/2020 à 13:37
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La propagation de quoi, d'un virus qui fait 0,5 % de décès dans une population de personnes quasi exclusivement âgée ou atteintes de facteurs de comorbidités ? Les Allemands, avec trois fois moins de décès que la France, semblent bien ...

le 14/12/2020 à 16:06
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Terrifiant., explosif . Ils vont encore nous dire, voilà encore un nouveau coup des russes qui veulent exploser l' UE ...

à écrit le 14/12/2020 à 13:19
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7,1% de croissance du PIB en 2021 par rapport à quelle référence? Il n'y a plus que de la propagande. On est revenu à l''époque de Vichy.

à écrit le 14/12/2020 à 12:09
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la perte est de 12% du coup le rebond supposé (encore faut t'il que toutes les spéculations se passent sans incidents) donc le résus est de moins -5%? A mon avis nous y serons loin!

à écrit le 14/12/2020 à 11:15
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Les Administrations Publiques vont devoir se serrer la ceinture. La bonne logique néolibérale les verra remplacées par le privé. Du Macronisme "pur jus". Vite, un Macronexit.

à écrit le 14/12/2020 à 8:42
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"un PIB français à +7,1% en 2021" Et tout le monde vivra vivra heureux dans le fabuleux pays imaginaire ! Si si c'est sûr cette fois ci...

à écrit le 14/12/2020 à 8:30
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7% sans la vague de faillite a venir, 2% quand on constatera la vague de faillites

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