Retards de paiement : la Banque de France a dégradé la note de plus de cent entreprises en 2022

Par latribune.fr  |   |  740  mots
Pour le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, « l'allongement des délais de paiement aux PME et TPE de la part de certaines entreprises de plus grande taille n'est évidemment pas acceptable ». (Crédits : Reuters)
La Banque de France a commencé en 2022 à abaisser la note de crédit de certaines entreprises affichant des retards de paiement indus. Si elle a joué la prévention, elle devrait être plus sévère en 2023 en triplant le nombre d'entreprises contrôlées.

La Banque de France durcit le ton contre les entreprises qui ne respectent pas les délais de paiement, mais tâche de ne pas être trop sévère après une année 2022 considérée comme « une année de sensibilisation pour les entreprises ».

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Ainsi les sociétés ciblées par l'institution « étaient des filiales d'entreprises intermédiaires (ETI) ou de grandes entreprises en excellente santé financière », soit 1.680 entités. « A la fin de la campagne de cotation 2022, la cote de près de 10% d'entre elles a été dégradée d'un cran par rapport à une situation sans délais de règlement excessifs », ce qui fait environ 150 entreprises qui ont vu leur cote baisser.

Les grands groupes, dont les délais de paiement dépassent la limite légale de 60 jours sont restés en 2021 très supérieurs à ceux des PME, ont été épargnés s'ils avaient fait diminuer ces retards, a expliqué à l'AFP Emilie Quema, directrice des entreprises à la Banque de France. Par ailleurs, « à partir du moment où l'entreprise est capable de justifier pourquoi elle a des délais élevés, on ne la dégrade pas ».

Le nombre d'entreprises examinées triplé en 2023

Devant la commission des Finances du Sénat, le 11 janvier, le gouverneur de la Banque de France avait annoncé que le nombre d'entreprises examinées serait triplé en 2023. « L'allongement des délais de paiement aux PME et TPE de la part de certaines entreprises de plus grande taille n'est évidemment pas acceptable. Selon nos estimations, ce sont 16 milliards d'euros de trésorerie qui seraient indûment captés par ces grandes entreprises », avait déclaré François Villeroy de Galhau à cette occasion.

Pour l'année 2022, les chiffres de 2022 n'étant pas encore connus, la Banque de France a constaté une réduction des délais de paiement. Selon le bulletin publié lundi, « les grandes entreprises devront poursuivre la tendance initiée en 2021 afin d'effacer la progression particulièrement forte de leurs délais fournisseurs constatée en 2020 avec le choc lié à la crise sanitaire de la Covid‑19 ». Le délai moyen restait quand même en 2021 de 70,7 jours pour les grands groupes, contre 47,9 jours pour les PME.

Thierry Millon, directeur des études au cabinet Altares, expliquait en mars dernier à La Tribune que « chaque jour de retard coûte des milliards d'euros dans les échanges inter-entreprises ».

29,7 millions d'euros d'amende en 2021 infligés par Bercy pour des manquements en matière de délais de paiement

La DGCCRF (Répression des fraudes) avait annoncé en août dernier une augmentation au premier semestre 2022 du nombre d'amendes administratives pour non-respect des délais de paiement, mais pour un montant cumulé en baisse.

Au pire de la pandémie, Bercy avait mis en place une cellule spéciale de crise dédiée à ce sujet brûlant pour éviter des effets en cascade dans les secteurs les plus secoués par les effets de la pandémie. Sous la houlette du médiateur des entreprises et celui des crédits, cette équipe avait tapé du poing sur la table pour rappeler les règles de bonne conduite en matière de délai de paiement, à savoir le respect des 60 jours à compter de la date d'émission de la facture dans le secteur privé.

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Pour tenter de mettre fin à certaines dérives, les enquêteurs de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) ont infligé 29,7 millions d'euros d'amende en 2021 pour des manquements en matière de délais de paiement. À titre de comparaison, pour ce même motif, les services de Bercy avaient infligé 9,4 millions d'euros d'amende en 2020, l'année de la pandémie.

Le secteur de la distribution faisait clairement partie des mauvaises élèves. Sur les 227 décisions de sanctions effectives en 2021, près de 10% concernent les enseignes de la grande distribution pour pratiques commerciales abusives. Le ministère de l'Economie pointait du doigt l'alliance à l'achat Incaa (4 millions d'euros d'amende) nouée entre Intermarché et Casino pour « avoir demandé à ses fournisseurs des budgets additionnels sans justification ni contrepartie ». Carrefour (1,75 millions d'euros d'amende) et Intermarché (2 millions d'euros) ont également été cités parmi les groupes fautifs.

(Avec AFP)