Retraites : le gouvernement retire provisoirement l'âge pivot

Par latribune.fr avec AFP  |   |  783  mots
La volonté de compromis affichée par le gouvernement sur l'âge pivot ne se traduira pas forcément par l'arrêt des perturbations dans les transports car la CGT, FO et Solidaires réclament toujours le retrait pur et simple du projet. (Crédits : Reuters)
Dans un courrier adressé samedi aux organisations syndicales et patronales, le Premier ministre Edouard Philippe indique être "disposé à retirer du projet de loi la mesure". La CFDT a salué la décision.

Le gouvernement est "disposé à retirer" provisoirement l'âge-pivot de 64 ans du projet de loi sur la réforme des retraites tout en conservant le principe d'un âge d'équilibre, a indiqué le Premier ministre Edouard Philippe dans un courrier adressé samedi aux organisations syndicales et patronales et dont l'AFP a obtenu copie.

"Pour démontrer ma confiance envers les partenaires sociaux, et ne pas préjuger de l'issue de leurs travaux concernant les mesures à prendre pour atteindre l'équilibre en 2027, je suis disposé à retirer du projet de loi la mesure de court terme que j'avais proposée, consistant à converger progressivement à partir de 2022 vers un âge d'équilibre de 64 ans en 2027", a écrit le chef du gouvernement dans sa lettre, au 38e jour de la mobilisation contre cette réforme.

L'accord remis à une "conférence de financement"

Ce retrait est sous conditions: le Premier ministre propose qu'une "conférence de financement" soit réunie avec les partenaires sociaux pour "proposer les mesures permettant d'atteindre l'équilibre financier en 2027". Faute d'accord de cette conférence d'ici "la fin du mois d'avril 2020", le gouvernement prendra par ordonnance les mesures nécessaires pour atteindre cet équilibre en 2027, indique la lettre.

"Je veux être parfaitement clair sur ce point: je prendrai mes responsabilités", a insisté le Premier ministre.

Le chef du gouvernement propose par ailleurs que cette conférence, réclamée par la CFDT, soit animée par Jean-Jacques Marette, ancien directeur général de l'Agirc-Arrco.

Une "volonté de compromis" selon la CFDT

En estimant dans un communiqué qu'elle "marque la volonté de compromis du gouvernement", la CFDT a salué la décision. La centrale de Laurent Berger, favorable à la retraite par points mais fermement opposée à un âge pivot à 64 ans assorti de bonus-malus, "va poursuivre les discussions dans le cadre proposé pour répondre aux interrogations qui demeurent sur le futur régime universel", écrit-elle. La CFDT, premier syndicat en France et favorable au système universel par points, avait fait une "ligne rouge" de cet âge pivot incitant les Français à partir à 64 ans en 2027 sous peine de se voir infliger un malus.

"Le retrait de l'âge pivot est une bonne chose qui permet de discuter sereinement de l'équilibre", a abondé le secrétaire général de l'Unsa, Laurent Escure. "Cela va permettre d'avancer sur le reste de la réforme, pour obtenir des compensations, des garanties, des avancées", a-t-il déclaré à l'AFP.

Le Medef s'est dit satisfait et prêt à participer "pleinement" à la conférence de financement des retraites pour "trouver les mesures d'âge justes".

Pour la CGT, "l'âge pivot est un leurre"

Mais pour le leader de la CGT Philippe Martinez, interrogé samedi en tête de la manifestation parisienne avant la publication du courrier du Premier ministre, "l'âge pivot est un leurre" qui "ne change rien à notre opposition à la réforme". Plus mesuré, son homologue de FO, Yves Veyrier, observait que "si on nous annonce un recul en tout ou partie sur l'âge pivot, ce sera le produit de la mobilisation".

La volonté de compromis affichée par le gouvernement sur l'âge pivot ne se traduira pas forcément par l'arrêt des perturbations dans les transports car la CGT, FO et Solidaires réclament toujours le retrait pur et simple du projet. Le Premier ministre avait en effet redit vendredi "la détermination du gouvernement" à présenter ce projet de système universel de retraite le 24 janvier en Conseil des ministres et de le soumettre à l'examen en séance publique à l'Assemblée nationale à compter du 17 février pour qu'il puisse être adopté avant l'été.

150.000 manifestants à Paris selon la CGT

Au 38e jour de mobilisation contre le projet de réforme, plusieurs dizaines de milliers de manifestants - 150.000 selon la CGT - défilaient samedi après-midi dans la capitale entre Nation et République. Tandis que selon le décompte du ministère de l'Intérieur, les manifestations contre la réforme des retraites ont mobilisé samedi 149.000 personnes dans toute la France, dont 21.000 à Paris.

Devant le cortège syndical bon enfant, plusieurs centaines de manifestants, dont certains masqués ou cagoulés, ont brisé des vitrines, saccagé une banque, incendié du mobilier urbain et jeté des projectiles en direction des forces de l'ordre, qui ont répliqué par des tirs de gaz lacrymogène. La police faisait part de sept interpellations à 17H30. D'autres manifestations avaient lieu partout en France.

L'intersyndicale, qui a appelé à poursuivre le mouvement avec une "journée de grève et de convergence interprofessionnelle" mardi, et des "initiatives déclinées sous toutes les formes" mercredi et jeudi, doit se réunir samedi après la manifestation.