L'Allemagne, l'Espagne et le Portugal soutiennent le projet d'un gazoduc reliant le sud à l'Europe centrale

Par latribune.fr  |   |  614  mots
Le chancelier allemand Olaf Scholz. (Crédits : Reuters)
Le chancelier allemand défend l'idée d'un gazoduc reliant la péninsule ibérique aux pays de l'Europe centrale, un projet qui enthousiasme Madrid et Lisbonne. Celui-ci pourrait être rapidement opérationnel à condition que la France l'approuve. Pour le moment, le gouvernement français reste silencieux, ayant déjà par le passé abandonné un tel projet d'infrastructure.

L'Europe de l'énergie accélère poussée par la nécessité de mettre un terme à sa trop grande dépendance à la Russie mise en évidence avec le conflit en Ukraine. Aussi les gouvernements espagnol et portugais ont accueilli vendredi avec enthousiasme les déclarations du chancelier allemand Olaf Scholz en faveur de la mise en place d'un gazoduc reliant la péninsule ibérique à l'Europe centrale.

Ce gazoduc est "une priorité" pour le Portugal et la prise de position du chancelier allemand jeudi "renforce la pression sur les institutions européennes" pour faire avancer ce dossier, a déclaré le Premier ministre portugais Antonio Costa devant la presse.

"Le Portugal peut jouer un rôle important" afin de contribuer à rendre l'Europe "autonome sur le plan énergétique" vis-à-vis de la Russie, a souligné Antonio Costa, dont le pays dispose à Sines (sud) d'un important port en eaux profondes doté d'un terminal gazier.

La nécessité d'un interconnexion européenne

Pour sa part, la ministre espagnole de la Transition écologique, Teresa Ribera, a déclaré, dans une interview à la Télévision nationale (TVE), que l'Espagne était prête à avancer très vite pour la construction d'un tel gazoduc, prônant "une plus grande implication des institutions communautaires" et "des gouvernements des États membres".

Olaf Scholz avait estimé jeudi que l'Europe manquait "dramatiquement" d'une interconnexion entre la péninsule ibérique et l'Europe centrale, passant par la France, qui contribuerait "à soulager et détendre la situation de l'approvisionnement" de gaz.

Teresa Ribera a indiqué pur sa part qu'à court terme, en "deux mois, trois mois", l'Espagne pourrait "fournir entre 2 et 2,5% du gaz qui peut être consommé dans l'ensemble de l'UE" en ajoutant "un compresseur supplémentaire" sur les deux petits gazoducs qui relient l'Espagne à la France à travers le pays basque (nord-ouest de l'Espagne). Mais, a-t-elle ajouté, "la principale condition est que la France soit en mesure d'acheminer ce gaz vers le centre de l'Europe".

Manque de soutien de la France

Il s'agirait toutefois de petits volumes, qui ne suffiraient pas à satisfaire les besoins des pays de l'UE. Aussi la ministre espagnole a-t-elle de nouveau mis en avant la solution d'un gazoduc "à travers les Pyrénées catalanes".

Un projet de gazoduc entre la Catalogne et le sud-est de la France, baptisé MidCat, avait été lancé en 2013, avant d'être abandonné faute d'accord sur son financement et de réel soutien de la France.

Selon le Premier ministre portugais, Paris s'y est opposé en raison de son "impact environnemental". Teresa Ribera a estimé, quant à elle, que l'abandon de ce projet était dû au fait qu'il n'était "pas viable économiquement dans un contexte où le gaz russe était beaucoup moins cher que le gaz naturel liquéfié".

Selon elle, Enagas, le propriétaire et gestionnaire du réseau gazier espagnol, estime à "approximativement huit à neuf mois" le temps nécessaire pour qu'un tel gazoduc soit opérationnel côté espagnol, mais a souligné qu'il serait "fondamental de travailler de concert avec la France".

De source proche du dossier, on indiquait à l'AFP, sous couvert de l'anonymat, que le projet MidCat "n'existait plus, c'est-à-dire qu'il était paralysé". Le projet évoqué par Teresa Ribera "serait un projet différent", notamment parce qu'il prévoirait également "le transport d'hydrogène", ajoutait-on de même source. Compte-tenu des infrastructures déjà construites en Catalogne avant l'abandon de MidCat, "il resterait environ 100 km" pour joindre la frontière française, a précisé cette source, confirmant que cela prendrait "huit ou neuf mois à partir du début de la construction".

Enagas a déjà indiqué qu'elle envisageait d'investir 370 millions d'euros dans ce projet en cas de feu vert de l'UE.