Malgré l'affront aux Etats-Unis, le FMI persiste et signe : le yuan n'est plus sous-évalué

Le FMI considère désormais que le yuan "n'est plus sous évalué". Une prise de position symbolique à visée pragmatique en faveur de la Chine, alors que Washington continue de fustiger un yuan trop faible, qui nuirait à l'économie américaine.
Jean-Yves Paillé
Si cette nouvelle position du FMI se confirme, Pékin se verra confortée et encouragée dans ses ambitions de développer l'usage du yuan à l'étranger.

Publié le 05/05/2015 à 10:40. Mis à jour le 27/05/2015 à 09:33.

C'est une petite révolution. Après une décennie à juger dans ses rapports la monnaie chinoise "sous évaluée", le Fonds monétaire international (FMI) a revu sa position sur le yuan (ou renminbi).

"L'appréciation effective et substantielle du renminbi (autre nom du yuan) a ramené son taux de change à un niveau qui n'est plus sous-évalué", a indiqué, mardi 26 mai, l'institution dans un rapport sur la deuxième économie mondiale.

Et de rappeller: "La sous-évaluation du renminbi a été dans le passé un facteur majeur d'importants déséquilibres."

Le Wall Street Journal (WSJ) expliquait le 3 mai que l'institution devrait mentionner dans ses prochains rapports sur la Chine que la devise chinoise évolue à sa "juste valeur". L'année dernière encore, le FMI la jugeait modérément sous-évaluée, de 5 à 10%.

 Un yuan toujours trop bas pour les Etats-Unis

Si Washington a souligné récemment les progrès réalisés avec une appréciation de 30% depuis 2010 de la monnaie chinoise, les Etats-Unis continuent à estimer que la monnaie chinoise est largement sous-évaluée et qu'un yuan faible favorise outrageusement les exportations chinoises.

Comme l'explique le Wall Street Journal, "les trois dernières administrations présidentielles ont insisté sur le fait que l'expansion économique chinoise se fait au détriment de la croissance et de l'emploi américain."

Cette prise de position a avant tout une valeur symbolique puisque le FMI ne peut imposer ses desiderata. Mais, comme "une bonne partie des récriminations américaines contre la Chine étaient basées sur sa distorsion de la concurrence, la décision du FMI va mettre une pression sur les Etats-Unis pour les pousser à une acceptation globale. Et ce, même si Barack Obama ne devrait pas revenir sur son discours martelant que la dévaluation du yuan est exagérée. Cela va également bloquer certains recours contre la sous-évaluation du yuan", juge Jean-Vincent Brisset, directeur de recherche à l'Iris, spécialiste de la Chine et en géopolitique.

Un nouveau camouflet pour les Etats-Unis

C'est un nouveau camouflet pour les Etats-Unis. Déjà, la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, avait salué fin mars à Pékin la création de la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures (AIIB) lancée à l'initiative de la Chine. Les Etats-Unis voient d'un mauvais œil l'ombre que l'AIIB pourrait faire à la Banque mondiale, traditionnellement dirigée par un Américain et à la Banque asiatique de développement (BAD), qui a toujours un Japonais à sa tête.

Par ailleurs, il y a quelques mois, les Etats-Unis avaient subi un autre revers face à la Chine.  L'Organisation mondiale du commerce avait jugé que les mesures antidumping des Etats-Unis sur de nombreux produits chinois, dont l'acier, les pneus et les panneaux solaires, étaient incompatibles avec ses règles..

Un choix "pragmatique" pour le FMI

La décision du FMI pourrait bien être motivée par le soutien à une économie chinoise de moins en moins fringante, estime Jean-Vincent Brisset:

"L'économie chinoise traverse une passe difficile. Elle subit l'inflation, les prix de ses exportations augmentent fortement, et le coût du travail qualifié grimpe plus vite que la production. Or, si l'économie chinoise ralentit, cela va se répercuter sur toutes les économies. Il y a donc un aspect pragmatique dans ce soutien du FMI à l'économie chinoise."

La Chine serait encouragée à développer le yuan à l'étranger

Par ailleurs, si cette nouvelle position du FMI se confirme, Pékin se verra confortée et encouragée dans ses ambitions de développer l'usage du yuan à l'étranger. Pour le moment, la devise chinoise est la 5e monnaie la plus utilisée dans les paiements internationaux.

En outre, le gouvernement chinois souhaite notamment que le renminbi soit intégré parmi les monnaies de réserve du FMI même si sa convertibilité et ses marges de fluctuation restent encore extrêmement contrôlées, analyse le Wall Street Journal.

Graphique: La valeur du yuan par rapport au dollar sur les 20 dernières années (source: WSJ)

Yuan Dollar

Jean-Yves Paillé
Commentaires 12
à écrit le 27/05/2015 à 15:56
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En énonçant ces conditions pour accéder au statut de devise internationale, on voit bien que le yuan chinois est à des années-lumière d’un début de réalisation, sans même parler de son inconvertibilité (mais qui peut changer rapidement). On ne voit p...

le 27/05/2015 à 18:37
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Très bonne analyse, félicitations.

le 27/05/2015 à 19:33
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@ Ricardo: bene, tout à fait en acord avec vous.

à écrit le 27/05/2015 à 14:59
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Le yuan est considérablement sous-évalué.Il est scandaleux qu'il soit accepté à ce bas niveau par les autres nations car il présente un effet prédateur. Cependant les chinois devront revoir leur position car les échanges commerciaux que nous acceptio...

à écrit le 27/05/2015 à 12:13
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C'est le dollar qui se trouve sous-évalué car il est devenu une monnaie de singe. Le yuan s'arrime solidement à l'or, ainsi que le rouble; on verra demain parmi les divises qui sera qui .

à écrit le 05/05/2015 à 21:18
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LA POSITION DU F M I EST BIZARE ? TOUS LE MONDE ECONOMIQUE SAIT QUE LE YAN ET SOUS DEVALUER PART RAPPORT A SONT EVOLUTION ET A SONT ERICHISSEMENT QUI VAS TRES VITE AUX DEPEND DES ECONOMIES EUROPEENE ET OCIDENTALE ? POUR QUI TRAVAILLE LE F M I ???

à écrit le 05/05/2015 à 13:05
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Ce discours convenu sur le déclin des USA et du USD est un refrain qui date de 20 ans au moins. Les USA restent le pivot du monde par leur avance technologique considérable, leur devise refuge international indéboulonnable, leur stabilité politique, ...

le 05/05/2015 à 14:06
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FAUX. L'économie américaine ni le dollar ont été tellement à péril qu'aujourd'hui. Vous me semblez mal informé et surtout désactualisé. Et si au lieu de ne regarder que NY Times, Washington Post, CNN et BBC vous alliez faire un petit tour du coté d'a...

le 05/05/2015 à 18:54
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@ Mac2 : Ce n'est que pour vous que l'économie américaine se porte bien. Aucun économiste lucide de votre pays parierait que le dollar existera encore en tant que divise internationale après 2018. Après une contraction notamment en février, le défici...

à écrit le 05/05/2015 à 12:19
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Le propre des hauteurs, c’est qu’on n’en peut revenir que par une chute. Les US ont du mal à admettre leur déclassement en cours. Cet aveuglement les rend très dangereux, et d’abord pour leur propres alliés, qu’ils vont tenter d’entraîner dans leur d...

à écrit le 05/05/2015 à 12:13
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Il y a toujours un équilibre qui s’installe mais celui qui vient verra – grâce aux “élites” européennes allantistes toujours serviles – l’Europe en marge du nouveau centre asiatique, sans aucune influence, sans rien à en espérer, au lieu d’en devenir...

à écrit le 05/05/2015 à 11:48
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Et oui, avec sa politique monétaire la Chine maintient sont économie concurrentiel, mais bon s'est les USA qui joue a ce jeu depuis toujours , maintenant la Chine joue aussi dans la cours des grands, elle a aussi les milliards de la dette américaine ...

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