Pour ce G20, Macron craint un sommet "inutile", un ring réservé à Trump et Xi Jinping

Par latribune.fr  |   |  778  mots
(Crédits : Reuters)
Le président français s'est livré dans une interview au quotidien argentin La Nacion, à une sévère critique du G20, ce sommet mondial qui réunit, chaque année depuis 1999, les ministres, chefs des banques centrales et chefs d'État de dix-neuf pays plus l'Union européenne et qui va débuter demain vendredi à Buenos Aires.

Arrivé mercredi soir à Buenos Aires avec son épouse, Emmanuel Macron effectue jeudi une visite officielle dans la capitale argentine où il rencontrera son homologue Mauricio Macri, avant de participer à un G20 qui s'annonce particulièrement tendu.

C'est la première visite du président français en Amérique du sud, dans un pays sur lequel la France compte pour soutenir ses positions. Elle précède un G20 qui s'annonce aux antipodes du multilatéralisme renforcé dont il s'est fait le champion.

Ce sommet devrait en effet être dominé par des affrontements bilatéraux : guerre commerciale États-Unis-Chine, menaces du président américain de taxer les voitures européennes et tensions américano-russes après l'arraisonnement par Moscou de navires ukrainiens.

Les tweets de Trump, le 11-Novembre, ont laissé des traces

Vendredi et samedi, en marge du G20, Emmanuel Macron aura quelques rencontres bilatérales, notamment avec les présidents chinois Xi Jinping et russe Vladimir Poutine. Mais pas avec Donald Trump, qui a en revanche prévu des rendez-vous avec d'autres de ses pairs, dont Angela Merkel, selon le programme de la Maison Blanche.

Jusqu'ici, les deux hommes se sont toujours vus en tête-à-tête dans de tels sommets. Mais l'Américain a publié lors de sa visite en France le 11 novembre plusieurs tweets hostiles à son "ami", critiquant son projet d'armée européenne, sa faible popularité et le fort niveau du chômage en France.

Le président français s'est livré dans une interview, ce jeudi, au quotidien argentin La Nacion, à une sévère critique du G20, ce sommet mondial qui réunit, chaque année depuis 1999, les ministres, chefs des banques centrales et chefs d'État de dix-neuf pays plus l'Union européenne et qui va débuter demain vendredi à Buenos Aires.

"La réforme du système multilatéral, la lutte contre les inégalités, la promotion d'un agenda international ambitieux pour protéger la biodiversité et lutter contre le dérèglement climatique sont autant de sujets sur lesquels la France et l'Amérique latine parlent d'une même voix", a déclaré le chef de l'Etat au journal argentin La Nacion jeudi.

Mais précisait-il :

"Le risque est celui d'un tête-à-tête entre la Chine et les Etats-Unis et d'une guerre commerciale destructrice pour tous", a averti le président français.

Climat et commerce: promesse de blocage et de délitement

Sur le climat et le commerce, "ce qu'on risque, c'est le blocage des forums multilatéraux comme le G20", a-t-il ajouté.

"Sur le commerce, le risque est celui d'un délitement de l'OMC (Organisation mondiale du commerce), qui malgré ses défauts est la plus grande plateforme de régulation du commerce mondial", a-t-il plaidé, en rappelant que la France et l'UE proposent une réforme de l'OMC. "Si nous ne montrons pas des avancées concrètes, nos réunions internationales deviennent inutiles et même contreproductives", a-t-il estimé.

Sur le climat, "nous devons utiliser ce forum pour montrer l'ambition de tous ceux qui veulent non seulement préserver l'accord de Paris, mais aussi aller plus loin, en précisant ou renforçant leurs engagements climatiques", a-t-il souhaité alors que s'ouvre dimanche en Pologne le sommet de la COP24.

Sans oublier le Brésil qui ne veut plus organiser la COP25

Mauvaise nouvelle pour ces réunions annuelles de l'ONU sur le climat, le Brésil, où vient d'être élu le climatosceptique Jair Bolsonaro, a annoncé mercredi qu'il renonçait à organiser la COP25 en 2019.

Emmanuel Macron a par ailleurs rappelé que la France était "favorable à un accord commercial mutuellement bénéfique entre l'Union européenne et le Mercosur", le marché commun qui réunit Brésil, Argentine, Paraguay et Uruguay, et avec qui l'UE négocie depuis près de 20 ans.

La question de la filière bovine française

Mais en raison de "sensibilités agricoles", en particulier sur la filière bovine française, "nous ne sommes pas encore en situation de conclure", a souligné le président français, alors que le nouveau président brésilien Jair Bolsonaro menace de quitter le bloc régional.

Quant à la politique de Donald Trump, il a reconnu qu'"il est vrai que certaines décisions récentes des Etats-Unis se sont faites au détriment des intérêts de leurs alliés".

"C'est justement dans ces temps de crise qu'il faut défendre nos valeurs communes qui reposent sur le modèle multilatéral et la coopération". "C'est aussi mon ambition pour la présidence française du G7 en 2019", a conclu le chef de l'Etat.