Catalogne : la majorité indépendantiste se réconcilie pour accélérer la sécession

La gauche radicale indépendantiste, la CUP, a annoncé qu'elle voterait la confiance au gouvernement catalan. L'objectif est d'avancer vers la sécession, même au prix de l'unilatéralité. Les conditions du choc avec Madrid se renforcent.
Le parlement catalan dispose à nouveau d'une majorité.

Alors que l'Espagne reste toujours incapable de trouver une majorité, la majorité parlementaire indépendantiste catalane retrouve son unité. Lundi 5 septembre, le parti de gauche radicale indépendantiste CUP a ainsi annoncé qu'il votera, le 28 septembre prochain, la confiance au gouvernement régional dirigé par Carles Puigdemont. Ce dernier avait décidé de poser la question de confiance après la décision de la CUP, début juin, de ne pas voter le budget présenté par le gouvernement. Finalement, donc, la Catalogne évite une crise gouvernementale et de nouvelles élections.

Rapprochement au sein du camp indépendantiste

En réalité, la crise ouverte par le rejet du budget régional a permis de relancer le processus de séparation avec l'Espagne, qui est le seul point commun entre les deux membres de la coalition indépendantistes, Junts Pel Sí (qui regroupe l'essentiel des forces séparatistes) et la CUP. Cette dernière a ainsi annoncé vouloir soutenir le gouvernement « parce que nous partageons les mêmes objectifs ». La CUP a donc fini par faire le choix entre ses priorités : l'indépendance d'abord, l'exigence sociale ensuite.

Cette décision est aussi le fruit d'un certain rapprochement idéologique entre les deux formations. Au cours de l'été, notamment après l'échec de Podemos - seule force espagnole défendant l'idée d'un référendum d'autodétermination en Catalogne -  aux élections législatives nationales du 23 juin, une grande partie des forces indépendantistes se sont ralliées à l'idée qu'un accord avec Madrid était devenu impossible et qu'il fallait avancer seul par des actes unilatéraux.

Cette position, la CUP l'a longtemps défendue seule. Le 29 juillet dernier, Junts Pel Sí a lié les actes à la parole en approuvant un texte affirmant la nécessité du recours à l'unilatéralité dans le processus d'indépendance. Ce texte avait alors été défendu par Carles Puigdemont, alors même que le Tribunal Constitutionnel espagnol avait interdit une telle discussion. Certes, depuis, Carles Puigdemont ne s'est pas engagé à recourir, comme le souhaite la CUP, à un référendum unilatéral d'indépendance (RUI) avant la fin de la législature, mais l'option est ouverte et la crise gouvernementale débouchera sur une accélération du processus de séparation avec une nouvelle « feuille de route ». C'est assez pour convaincre la CUP.

L'opposition remontée

Même s'il faudra encore discuter des détails du futur budget catalan, cette inversion des priorités de la CUP, si elle dure, marque donc la détermination des Indépendantistes à avancer. La course vers le choc entre la légalité espagnole et la nouvelle légalité catalane semble donc inévitable. De fait, l'opposition unioniste ne s'y trompe pas. Le chef de file du Parti populaire (droite unioniste) en Catalogne, Xavier Albiol estime que le RUI est « acquis ».

Mais, en dépit de l'actuel blocage politique espagnol, la réaction de Madrid devrait être celle qu'il mène depuis des années : la judiciarisation du processus de sécession. Dans un entretien à La Tribune, Carlos Carrizosa, député de Ciudadanos (centre-droit unioniste) au parlement catalan affirme qu'un référendum « serait en dehors de la légalité », ce serait un « coup d'Etat contre la démocratie ». Selon lui, la judiciarisation du processus indépendantiste est indispensable pour que les « Catalans séduits par les idées indépendantistes prennent conscience que cela mène à une impasse ». Xavier Albiol affirme, lui, que le gouvernement catalan va devoir faire face à un « mur » de la part de l'Etat espagnol.

L'enjeu de la mobilisation

Face à ce choc qui vient, la solution résidera dans l'opinion publique et la capacité des deux camps à mobiliser. Carlos Carrizosa annonce ainsi que les unionistes entendent renforcer cette mobilisation unioniste qui est souvent bien plus faible que celle des indépendantistes qui, pour lui, sont portés par la « force de l'utopie ».

Parallèlement, dimanche 11 septembre, jour de la fête nationale catalane, la Diada, aura lieu la traditionnelle mobilisation pro-indépendantiste pour la cinquième année consécutive. Selon les associations indépendantistes elles-mêmes, la mobilisation devrait être inférieure cette année à celle des années précédentes. « Les gens sont un peu las de ce type de mobilisation », reconnaît Adriá Alsina Leal, responsable de la communication de l'Assemblée nationale catalane (ANC), un des organisateurs. Mais, pour lui, cet échec relatif attendu ne signifie pas un recul des idées indépendantistes dans l'opinion catalane, simplement, affirme-t-il, un « besoin d'actes plutôt que de spectacle ». De fait, les derniers sondages montrent une progression nette de l'indépendance dans l'opinion cet été.

Catalyseur ?

Le catalyseur de la tension qui s'accumule entre Madrid et Barcelone pourrait alors être la destitution de Carme Forcadell, la présidente du parlement catalan, accusée par le Tribunal Constitutionnel d'avoir fait voter le texte sur l'unilatéralité le 27 juillet dernier. Si cette destitution est confirmée, la majorité indépendantiste devra choisir entre l'acceptation de l'ordre constitutionnel espagnol, et donc le renoncement à l'indépendance par des voies unilatérales, ou la rupture franche en refusant la destitution de Carme Forcadell.

Ce pourrait alors être l'occasion d'une mobilisation des troupes plus « utile » que les grands spectacles du 11 septembre, devenu répétitifs. L'accord entre Carles Puigdemont et la CUP de ce début septembre plaide pour un durcissement de la position indépendantiste. En réalité, progressivement, le durcissement se produit des deux côtés, rendant toute solution négociée à la crise catalane de moins en moins probable.

Commentaires 23
à écrit le 09/09/2016 à 9:15
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J'ai vraiment la flême de démentir chaque affirmation négative sur la Catalogne. C'est fatigant. Je préfère vous transmettre quelques petits éléments d'information. Pourquoi les Catalans foncent-ils soudain (depuis 2009-10) vers l'indépendance?...

le 09/09/2016 à 16:27
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Merci pour cette perle d'agit-prop, c'est un plaisir de vous répondre, vu l'impossibilité dans laquelle vous vous retrouverez pour prouver ce que vous avancez. Contrairement à vous, nationalistes, je conforte mes arguments en partant de liens vers ...

le 09/09/2016 à 16:37
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"Nous souhaitons le mieux pour l'Espagne et sommes prêts à continuer à la soutenir" on aiment l'Espagne, on aiment les Espagnols mais on veut plus vivre dans leur pays ? Légère contradiction la non ? Dans un couple quand on se séparent c'est qu'on s...

le 09/09/2016 à 19:38
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Cher CED, À titre personnel, et je suis sud-catalan, je n'aime pas plus l'Espagne que toute autre région européenne. D'ailleurs, c'est un peu difficile d'aimer l'Espagne ou pas, car parlerait-on de la Castille, l'Andalousie, les Asturies, la Galic...

à écrit le 08/09/2016 à 17:57
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@ Timbaler del Bruc : il existe une autre solution à l'indépendance c'est le fédéralisme, il faut une refonte de la Constitution Espagnole, reconnaître dedans que l'Espagne est un état plurinationale, que les différentes nationalités apportent une ri...

le 08/09/2016 à 18:49
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Nous en avons déjà parlé. Notre désaccord est patent. La seule possibilité de fonder une fédération est que la Catalogne devienne indépendante et qu'ensuite elle discute avec l'Espagne d'égal à égal. Il n'y a AUCUN exemple où la catalogne ait pu ...

à écrit le 08/09/2016 à 10:34
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merci Rajoy d'avoir fait abolir le statut de 2006, l'Espagne serait pas à deux doigts de perdre la Catalogne si ce statut avait été maintenue, je vois pas ce qui pourrait désormais empêcher l'indépendance de la Catalogne désormais. Je vois que Timbal...

le 08/09/2016 à 13:25
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@N.L. En fait je cherche à obtenir les arguments de ceux qui sont contre. Pas facile, hein. On n'a droit qu'à des insultes ou du mépris. Parfois un petit éclair avec "sécession = récession". Ça en jette, ça rime, mais ça ne vas pas loin. Et c'est sur...

à écrit le 07/09/2016 à 16:20
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Romaric reprends à la virgule prêt, la rhétorique, comme d'ailleurs la sémantique, utilisée par les médias nationalistes. Vicent Partal, le directeur du site nationaliste "Vilaweb" va être ravi, il va citer à nouveau Romaric, comme le journaliste fr...

le 07/09/2016 à 18:21
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Une fois de plus Cardo étale sa satisfaction de voir les difficultés qui se dressent sur le chemin de la Catalogne vers la liberté. C'est normal puisqu'il est contre. Un nouvel élément: il n'aime plus les sondages. Ça c'est nouveau pour quelqu'un qui...

à écrit le 07/09/2016 à 10:33
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Le morcellement de l Europe est un signe de sa crise a la fois identitaire et économique ou les populistes de tout poils triomphe a cause de la faiblesse européenne et de l immigration sauvage qui renforce la recherche des racines culturelles et le b...

à écrit le 07/09/2016 à 10:16
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La sécession contre la récession.

le 07/09/2016 à 16:50
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Dans le cas catalan, s'il y a sécession il y aura récession.

le 07/09/2016 à 18:35
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Mais oui mais oui... Je trouve que je me fais coller par de plus en plus par des messages de troll, c'est beau de n'avoir rien à faire les gars, mais arrêtez de demander aux autres de bosser comme des chiens pour être payés que dalle, merci.

le 07/09/2016 à 18:40
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Mais oui mais oui... Je trouve que les trolls, voir le troll me colle de plus en plus, c'est bien beau les gars de n'avoir rien d'autre à faire mais dans ce cas arrêtez de demander aux autres de bosser comme des chiens pour être payés que dalle, ...

le 07/09/2016 à 20:23
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Pour avoir mis les pieds en Catalogne, l'idée de sécession s'est établi quand la récession post 2008 fit des ravages. De quoi donc parlez vous?

à écrit le 07/09/2016 à 9:35
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L'Espagne est un pays démocratique très décentralisé et où les régions (dont la Catalogne) jouissent d'une très réelle et importante autonomie (ce n'est pas la France jacobine au millefeuille administratif et aux collectivités impuissantes, et dont l...

le 07/09/2016 à 12:15
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Ce commentaire est à la limite de l'escroquerie. Décentralisé, un pays qui a réduit à néant les principales mesures du statut d'autonomie ? Où on annule la loi sur la pauvreté énergétique qui voulait aider les plus démunis en interdisant les coupure...

le 07/09/2016 à 13:05
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Si on parle de décentralisation, je ne crois pas qu'il soit judicieux de prendre l'Espagne comme exemple (pas plus que la France d'ailleurs). Il me semble qu'on ne peut pas considérer comme décentralisé un pays qui annule la loi catalane sur la pau...

le 07/09/2016 à 13:29
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Pardon pour ce doublon. Comme LT a tardé à publier mon commentaire, j'ai cru que celui-ci avait été censuré et je l'ai refait, en moins agressif. Je prie le modérateur d'en effacer un, celui qu'il voudra. Merci.

le 07/09/2016 à 16:57
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Les lois catalanes annulées entraient-elles dans le cadre du statut de l'autonomie ? Vous parlez de la loi énergétique, la loi catalane prévoyait-elle quel organisme se substituait, pour le paiement des factures impayées aux consommateurs et selon qu...

le 07/09/2016 à 17:15
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Les bombardements du pouvoir central sur la Catalogne de 1936 à 1939 (entrainant des milliers de morts, avec d’importante destruction à Barcelone, Lleida, Granollers, Tarragone, Reus et Figuera) ; reste dans les mémoires, et surtout ceux des indépend...

le 07/09/2016 à 20:30
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@ bruno_bd. La loi prévoyait que la Generalitat créérait un fonds destiné à aider les familles démunies sous forme de prêt sans intérêt. je n'ai pas d'info sur la quantité, ni sur l'ampérage. Alors je veux bien que le pouvoir trouve à redire sur les ...

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