Grèce : les options de la BCE

Lundi 6 juillet, la BCE va se réunir pour examiner la demande de relèvement du plafond des liquidités d'urgence de la Grèce. Une réunion cruciale. Revue des options.
La BCE devra décider lundi de l'avenir de la Grèce

Le « non » grec, franc, clair et massif pose désormais un problème d'envergure à la BCE. Lundi 6 juillet, le conseil des gouverneurs de l'institution de Francfort va se réunir pour examiner une nouvelle fois la demande de la Banque de Grèce déposée ce dimanche de relever le plafond de la liquidité d'urgence mis à la disposition des banques helléniques dans le cadre du programme ELA.  Or, de cette décision dépend très concrètement l'avenir de la Grèce dans la zone euro. Quelles sont les options possibles ?

Première option (la plus probable) : ne rien faire

La première option est que la BCE considère qu'il n'y a pas de changement. C'est l'option qui est jugé la plus crédible ce soir. La possibilité d'un accord reste la même qu'avant le « non », les négociations continuent et la BCE tient à en attendre l'issue. Elle maintient donc l'accès à l'ELA à son niveau actuel. Rien de changé, donc. Mais en réalité, le processus de sortie de la Grèce de la zone euro a déjà commencé avec le gel du niveau de l'ELA la semaine passée. Progressivement, la Grèce se détache de l'euro. Les transactions électroniques sont interrompues et, ce dimanche soir, Yanis Varoufakis, le ministre grec des Finances a annoncé l'émission de titres de créances de l'Etat ayant valeur monétaire (les « IOU »), qui ne sont rien moins qu'une monnaie parallèle. Autrement dit, un gel de l'ELA continue le processus de divorce entre la Grèce et la zone euro.

Deuxième option (possible) : augmenter les décotes sur les collatéraux

Mais le Conseil des Gouverneurs de la BCE peut considérer qu'il reste un espoir d'accord compte tenu de la réunion de l'Eurogroupe et des dirigeants de la zone euro mardi 7 juillet, mais aussi des déclarations d'Alexis Tsipras appelant à des discussions. Comme cet espoir n'est pas certain, cependant, il peut estimer que la valeur des titres déposés par les banques grecques en garantie (collatéraux) pour obtenir les crédits de l'ELA (rappelons que cet argent n'est pas « donné » aux banques) est dégradée puisque le risque de défaut grec est plus élevé. Une grande partie de ces titres sont en effet soit des titres de l'Etat grec, soit des titres garantis par l'Etat grec.

En conséquence, le CG de la BCE rejettera alors la demande de la Banque de Grèce et durcira les conditions pour avoir accès aux liquidités de l'ELA en abaissant la décote appliquée pour le calcul de la valeur des collatéraux. Dans ce cas, la capacité d'emprunt des banques grecques va se réduire. Compte tenu de l'état des banques grecques, cette décision conduirait encore à un durcissement de la situation sur le terrain, sans doute avec de nouvelles restrictions pour les retraits et des relations financières encore plus difficile entre la Grèce et le reste du monde. Dans ce cas, la BCE n'expulse pas la Grèce de la zone euro, mais elle met la pression davantage sur le gouvernement grec et les Européens pour trouver une solution rapidement. Mais elle prendra le risque d'un « Graccident » si le manque de liquidité conduit à une détérioration de la situation intenable.

Troisième option (peu probable) : couper l'ELA

La troisième option de la BCE serait que le Conseil des Gouverneurs considère que ce « non » réduit à néant toute possibilité d'accord. Il suivrait donc l'avis du vice-chancelier allemand Sigmar Gabriel qui considérait dimanche soir « qu'Alexis Tsipras a détruit les derniers espoirs d'entente. » Dans ce cas, le défaut est inévitable et les collatéraux des banques grecques ne valent plus rien. L'ELA ne peut donc plus être poursuivie. Les banques grecques se retrouvent alors immédiatement en état de faillite, incapable de fonctionner. Athènes devra alors réagir vite. Il est possible de renflouer les banques avec les dépôts, mais c'est très douloureux socialement et cela ne règle pas le problème de liquidité des banques. La Grèce devrait sans doute nationaliser les banques, mais là encore, il faudra régler le problème de la liquidité. L'émission d'une nouvelle monnaie deviendrait incontournable. La BCE aura expulsé de facto le pays de la zone euro. C'est une option peu vraisemblable compte tenu des négociations encore en cours. Surtout, couper l'ELA nécessite une majorité des deux tiers au Conseil, ce qui est sans doute difficile à obtenir.

Quatrième option (peu probable) : relever le plafond de l'ELA

La dernière option est celle où le Conseil des Gouverneurs considère que le « non » a renforcé la possibilité d'un accord et donne satisfaction aux demandes de la Banque de Grèce. Dans ce cas, les banques grecques pourraient rouvrir rapidement, mais les restrictions aux guichets pourraient rester en place pour éviter une hémorragie des dépôts. Ce serait le scénario le plus favorable à la Grèce et qui écarterait tout risque de Grexit dans l'immédiat. Mais c'est aussi le moins probable compte tenu des réactions au « non » entendu en Allemagne. La BCE ne peut prendre une telle décision avant les réunions de mardi.

Comment éviter le Grexit ?

On le voit, la possibilité d'une sortie de la Grèce de la zone euro reste très élevée. L'option la plus favorable serait celle d'un gel de l'ELA lundi 6 juillet, d'une ébauche d'accord le lendemain et, mercredi, d'un relèvement du plafond de l'ELA par la BCE. Mais le jeu politique européen n'étant pas si simple, la situation peut à tout moment déraper. D'autant, on l'aura compris, que la Grèce glisse progressivement vers la sortie de l'UEM. Surtout, il n'est pas à exclure que les 18 décident de provoquer l'expulsion de la Grèce en ruinant toute possibilité d'accord. Déjà, ce dimanche soir, Jeroen Dijsselbloem, président de l'Eurogroupe a jugé « regrettable » le résultat du référendum. Si aucun accord n'est possible, la situation de la BCE deviendra intenable. Elle ne pourra plus guère utiliser l'ELA. Mais elle est tenue - on l'oublie souvent - par les traités à assurer la « stabilité monétaire de la zone euro. » Or, la Grèce est encore dans la zone euro et couper l'ELA pour expulser la Grèce pourrait mettre en cause cette stabilité. La BCE est désormais en première ligne, mais elle est face à une impasse.

Commentaires 23
à écrit le 07/07/2015 à 16:28
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La Grèce a une longue histoire de négociations à couteaux tirés avec l'Europe pour se faire attribuer des avantages exorbitants. Le problème, c'est que ce n'est plus tenable. L'accepter, c'est ouvrir la porte à des revendications irréalistes dans bea...

à écrit le 06/07/2015 à 22:26
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Fin de partie pour l union européenne ..Se tient a Oufa le 8.9 et 10 juillet la réunion des BRICS ou sera discutée l adhesion de la Grèce Tsipras a eu un entretient téléphonique avec Poutine sur la question et cela permettrais a la Grèce de profiter ...

à écrit le 06/07/2015 à 18:51
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La Grèce a une longue histoire de négociations à couteaux tirés avec l'Europe pour se faire attribuer des avantages exorbitants. Le problème, c'est que ce n'est plus tenable. L'accepter, c'est ouvrir la porte à des revendications irréalistes dans bea...

à écrit le 06/07/2015 à 10:33
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Godin ne craint pas de se contredire lui même. Apres nous avoir annoncé a chaque article que tsipras est en position de force, que varoufakis es tun génie de la négociation, que le réferendum permettrait un accord en 24h pour rester dans la zone Euro...

à écrit le 06/07/2015 à 9:34
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Bravo Monsieur Yánis Varoufákis vous êtes un grand homme... Gagnant avec un NON massif et vous partez la tête haute pour servir la cause de votre peuple ; les minables de France et d’Europe, même perdants, ils restent... Vous partez, sans cravate, ...

à écrit le 06/07/2015 à 8:59
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Quelles options ? Les Grecs ont démocratiquement choisi. Il faut donc maintenant qu'ils assument les conséquences de leur choix On doit tenir d'urgence un référendum pour savoir si les Européens veulent continuer à payer pour les Grecs !!!!

le 06/07/2015 à 23:10
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Impossible, le référendum est inconstitutionnel en Allemagne, qui craint trop l'effet plébiscitaire qui pourrait tenter un autocrate.

à écrit le 06/07/2015 à 8:47
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Les grecs veulent que leur économie à être perfusée par les contribuables européens mais refusent en bloc certaines réformes notamment la levée de l'impôt et refusent également de changer leur mode de consommation basé sur l'argent liquide et la non ...

à écrit le 06/07/2015 à 8:45
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La BCE ne fait pas de politique: elle n'a pas vocation à financer les états, ce qu'elle fait depuis quelques jours, via le financement des banques grecques, qui elle financent l'état.. tout au mieux, maintien du programme ELA en l'état, ce qui laisse...

à écrit le 06/07/2015 à 7:39
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La solution ne peut être que politique et c'est au sommet européen de prendre la décision de sauver ou non la zone euro. Une conférence européenne de la dette comme le propose JL Mélenchon est loin d'être une hérésie. Expulser de facto la Grèce revie...

le 06/07/2015 à 8:19
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il n'y a aucune idéologie seulement le fait que les grecs ont dit NON à toute aide !!!! alors bye bye !!!! ne pas oublier que les européens vont devoir payer encore plus pour le peuple le plus fonctionnaires de toute l'Europe !!! marre de payer po...

le 06/07/2015 à 23:21
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Le problème est financier (insolvabilité grecque sur sa dette souveraine). S'il n'y avait que ça ce serait soluble. Le problème est l'absence de compétitivité économique de la Grèce. Autrement dit imaginons que les créanciers et prêteurs (c'est à dir...

à écrit le 06/07/2015 à 7:37
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Bonjour romaric. Pour nous eclairer: pourriez vous developper dans un prochain article le fonctionnement et les marges de manoeuvre de la bce par rapport a ses obligations. Hors jeu politique bien sur. Merci

le 06/07/2015 à 10:40
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La BCE a interdiction de financer directement un Etat. Ses financements aux banques sont dépendant de la solvabilité des dites banques, lesquelles doivent donner des garanties à la BCE (en general de la dette public grecque qu'elles détiennent... et ...

à écrit le 06/07/2015 à 2:32
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On peut parier que la premiere option sera priviligiee. L'option de la decôte signiefierait que la BCE est prêt a prendre ses pertes. Connaissant l'arrogance et le conservatisme de Monsieur Draghi et de son institution, je doute qu'il n'est pas encor...

le 06/07/2015 à 8:21
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mais il n'y a aucune arrogance ni conservatisme : les dirigeants des pays doivent prendre en compte que les dettes des grecs ne seront jamais remboursées il faudra donc augmenter les impôts !!!! et nous nous considérons que nous avons déjà assez pay...

le 06/07/2015 à 23:15
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Finalement c'est l'option 2 qui est la bonne, ce qui veut dire que la BCE resserre le noeud coulant mais sans achever (encore) la Grèce. ce sera pour dans quelques jours. Reste que l'émission d'assignats annoncée ('IOU ) c'est bel et bien le début de...

à écrit le 06/07/2015 à 1:43
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J'adore la Grèce et les grecs mais les ruses qui consistent à ne pas crépir sa maison pour ne pas payer d'impôts, je dis stop. Ils ont voté Non... donc qu'ils aillent se faire ...chez les grecs. On va pas continuer à payer a fonds perdus sinon on v...

le 06/07/2015 à 2:29
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Luc, il faut vous réveillé, ce que vous mentionné sur les maisons n'existe plus depuis un bon moment

le 06/07/2015 à 7:33
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Cahuzac un gauchiste? On en apprend tous les jours.

à écrit le 06/07/2015 à 0:38
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Ce ne serait pas la première fois que la BCE, ou d'autres institutions européennes, prendraient des libertés avec leurs propres règles de fonctionnement. Une sortie de l'UEM de la Grèce, provoquée par la BCE, serait selon certains analystes le meille...

le 06/07/2015 à 8:18
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"à moyen terme" : je dirais, plutôt, à court terme. Car, à moyen terme, une fois la Grèce sortie de l'UEM, se posera la question de la viabilité existentielle de l'Euro en tant que monnaie UNIQUE d'une "union" qui ne sera jamais fédérale (le grand rê...

le 06/07/2015 à 10:45
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@Laurent-GNVC: Stigliez et Krugman, bien a l'abris dans leurs bureaux New Yorkais pensent que le grexit reglerait tout par un coup de baguette magique. Pourtant, Varoufakis lui même (le nouveau héros de la gauche radical) a démonté completement le...

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