Plafonnement du prix du gaz : l'UE se donne quelques jours pour trouver un impossible consensus

Sans grande surprise, les Vingt-Sept ne sont pas parvenus à s'entendre sur le niveau à partir duquel un mécanisme de plafonnement du prix du gaz se déclencherait. Cette épineuse question est reportée au lundi 19 décembre prochain, lors d'un énième conseil extraordinaire.
Juliette Raynal
(Crédits : DADO RUVIC)

Des discussions « longues »« intenses »« difficiles »... Ce mardi 13 décembre, les ministres européens de l'Énergie se sont rencontrés une énième fois pour tenter de se mettre d'accord sur un plafonnement du prix du gaz. En vain. « Nous ne sommes pas parvenus au consensus », a reconnu vers 20h00 Jozef Síkela, le ministre de l'Industrie tchèque, lors d'une conférence de presse, initialement programmée à la mi-journée.

La question du prix à partir duquel le mécanisme de correction de marché se déclenche sera de nouveau discutée le 19 décembre prochain à l'occasion d'un autre conseil extraordinaire des ministres de l'Energie.

Trouver l'impossible consensus avant Noël

« J'espère que la République Tchèque va parvenir à décrocher cet accord avant Noël. Ce serait un très beau cadeau », a déclaré à la même conférence de presse Kadri Simson, la commissaire européenne à l'Énergie.

Les ministres se rencontraient ce jour pour tenter de s'accorder sur un mécanisme de correction du marché du gaz, dont la volatilité est très importante depuis l'invasion russe de l'Ukraine. Mais l'exercice s'annonçait particulièrement périlleux tant les désaccords entre les Etats membres autour de la proposition de la Commission européenne sur ce sujet sont importants.

Le 24 novembre dernier, la Commission européenne a proposé de plafonner le Title Transfert Facility (TTF), un hub virtuel majeur où les expéditeurs et les clients négocient les approvisionnements en gaz sur le Vieux Continent. Toutefois, selon la proposition de l'exécutif européen, cet outil ne pourrait être activé qu'à deux conditions cumulatives : si le prix sur le TTF dépasse 275 euros le mégawattheure (MWh) pendant deux semaines consécutives. Et, si la différence entre le prix du TTF et le prix mondial du GNL est égale ou supérieure à 58 euros.  Des conditions quasiment impossibles à atteindre.

« Bon nombre d'experts étaient unanimes pour dire que ce mécanisme ne pouvait pas être déclenché », témoigne Phuc-Vinh Nguyen, chercheur sur les politiques énergétiques française et européenne à l'Institut Jacques Delors. « Même au plus fort de la crise, fin août 2022, lorsque Vladimir Poutine faisait son chantage sur les turbines, le prix n'est pas resté au-dessus de 275 euros pendant deux semaines », souligne-t-il.

Un risque accru en 2023

Une partie des Etats (France, Espagne, Pologne, Grèce...) avaient fustigé une « mauvaise blague » et réclamé d'assouplir fortement les conditions requises. A l'opposé, plusieurs Etats membres, l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Autriche en tête, exigeaient des «garde-fous » drastiques afin d'éviter que le mécanisme menace les approvisionnements gaziers de l'Europe.

Autrement dit, ces pays estiment qu'il vaut mieux payer un gaz très cher plutôt que de ne pas en avoir du tout alors que les rapports alertant sur le risque d'une pénurie de gaz pour l'hiver 2023-2024 se multiplient.

D'après, l'Agence internationale de l'Energie (AIE), l'Union européenne risque de faire face à un déficit potentiel de près de 30 milliards de mètres cubes de gaz naturel, en 2023, soit plus de 6,5% de sa consommation totale en 2021. Un "grave écart" entre l'offre et la demande, qui pourrait se produire si les importations par pipeline depuis la Russie tombent à zéro en 2023, et que la demande de gaz naturel liquéfié (GNL) par la Chine rebondit au niveau de 2021.

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« L'objectif d'aujourd'hui consistait donc à trouver un compromis dans lequel les conditions de ce mécanisme soient suffisamment restreintes pour éviter qu'il ne se déclenche n'importe quand, ni trop restrictives pour qu'il puisse être activé », rappelle Phuc-Vinh Nguyen.

Selon l'expert, les négociations visaient notamment à abaisser le niveau du déclenchement du plafonnement à un prix proche de 220 euros le mégawattheures et de baisser la durée pendant laquelle ce prix devait se maintenir autour d'une période de cinq jours.

Deux autres textes en suspens

Cette impasse dans laquelle se trouve les Vingt-Sept met en suspend deux autres textes majeurs. Le premier vise à accélérer le déploiement des énergies renouvelables en simplifiant les démarches administratives tandis que le second concerne les achats groupés de gaz. Une approche qui pourrait se révéler précieuse sur un marché du GNL extrêmement tendu. L'adoption de ces deux textes est, en effet, subordonnée à l'obtention d'un consensus sur le plafonnement du prix du TTF. « C'est un moyen de mettre une pression politique sur les pays qui ont des positions très extrêmes sur ce sujet », analyse Phuc-Vinh Nguyen. En quelque sorte, de forcer les Etats membres à trouver un compromis.

« Nous sommes tout près d'aboutir. Tout peut se résoudre dans les prochains jours », a voulu rassurer le ministre tchèque de l'Industrie. "Nous avons besoin d'un peu plus de temps", a-t-il encore ajouté, tout en soulignant les avancées réalisées. Les Etats membres se sont, en effet, accordés sur le fait que les contrats de gré à gré ne seraient pas concernés par ce mécanisme de plafonnement, sur des outils permettant de désactiver le dispositif et sur la volonté d'étendre ce plafonnement à d'autres marchés que le TTF. « 90% du texte est stabilisé », a fait valoir de son côté Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition écologique, affirmant que la France « a joué un rôle de médiateur ».

Les six jours qui séparent les ministres européens de leur prochaine réunion feront-ils la différence ? Parviendront-ils à trouver un consensus alors que les divergences relèvent bien plus de questions politiques que d'aspects purement techniques ? Un coup d'accélérateur pourrait être donné par les chefs d'Etat et de gouvernement qui doivent se réunir jeudi et vendredi.

Juliette Raynal

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Commentaires 3
à écrit le 14/12/2022 à 7:40
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Ce sont les gens chagrins comme Citoyen Indigne niais base électorale de Meluche qui constituent une bonne boussole inversée des évolutions souhaitables et réalisables de l'économie

à écrit le 14/12/2022 à 7:04
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La commission européenne toujours aussi nulle. Le prix du gaz est une résultante du ratio offre demande ,il y a une pénurie en Europe donc le prix est élevé, aux USA il y a abondance donc le prix est bas ce n'est pourtant pas difficile à comprendre...

le 14/12/2022 à 13:07
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moi je comprend que l'europe ne sert a rien a part a certain pays de speculer sur les defaut des autres nation et la encore il y a plusieur jeu quand c(est l'allemagne qui est en faute tous vinne au secourt quand c'est un autre qui lache tous l'enfo...

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