Les entreprises taxées par Bercy voient rouge

Par Juliette Garnier avec Aymeric Auberger et Sharon Wajsbrot  |   |  677  mots
Copyright Reuters
Les soda, les boissons alcoolisées, le tabac et les parcs d'attractions contribueront aussi à l'effort collectif pour juguler le déficit public. Pour certaines entreprises, la nouvelle n'est pas de bonne augure.

La colère monte chez les entreprises victimes des décisions de François Fillon. La France veut créer une taxe sur les boissons sucrées. L'idée n'est pas nouvelle. Mais elle fait grand bruit.  La mesure - elle ne concernera que les boissons fabriqués avec du sucre, par opposition aux versions light - devrait apporter 100 millions d'euros à l'Etat en 2012. Le gouvernement marierait ainsi régime d'austérité et lutte contre l'obésité.

Ce n'est pas le premier pays européen à taxer la mal-bouffe. Le Danemark fait de même sur les boissons sucrées depuis 1999. La Finlande, la Belgique, la Roumanie et les Pays-Bas lui ont emboîté le pas. Mais, en France, au lendemain de l'annonce de François Fillon, les multinationales du soda feignent la surprise. Hugues Pietrini, patron de Orangina-Schweppes, qualifie la nouvelle de «uppercut», a-t-il déclaré jeudi sur Europe 1. Et Coca-Cola et Pepsi se disent abasourdis. Pourquoi tant de bruit ? Selon les calculs de l'Association nationale des industries alimentaires (Ania), cette taxe devrait surenchérir de 4 centimes environ la bouteille de 1,5 litre de cola. «Cette taxe aura un très faible impact sur les ventes», estime déjà un distributeur. Il n'empêche. «C'est une mesure injuste, stigmatisante et sans fondement», s'emballe l'Ania. En fait, les multinationales de l'agro-alimentaire s'inquiètent que la taxe Coca ne fasse école.

A qui le tour ? La France pourrait aussi s'inspirer de la taxe sur les confiseries que le Danemark a aussi adoptée ou de celle dite du Hamburger applicable en Hongrie sur les produits gras, salés, sucrés ou caféinés dès septembre. Tous les industriels craignent que l'assiette de cette taxe ne s'élargisse au nom de la santé publique tricolore. A l'instar du régime des alcools forts dont la fiscalité va augmenter et des cigarettes dont les prix vont augmenter de 6% en 2011 et 2012. «L'argument de la santé publique est un faux d'argument, qui facilite la communication du gouvernement», persifle Jean-Pierre Lacarrière, président de la Fédération française des spiritueux. Les cigarettiers et débitants de tabac dénoncent eux les risques de voir le seul marché parallèle en profiter. «20% de la consommation totale de tabac en France en est issu, contre 3% en 2003», chiffre Pascal Montredon, président de la Confédération des buralistes. Aujourd'hui une cigarette fumée sur cinq en France provient du marché parallèle. «Les Marlboro sont à moins de 6 euros, elles vont passer à 6,20 euros, on va passer un seuil psychologique. », annonce British American Tobacco qui se félicite de n'être pas le seul secteur concerné pour une fois : « On taxe aussi les boissons sucrées. La malbouffe a un coût quatre fois supérieur au tabac pour la société ».

Mais les boissons ne sont pas les seules à être visées.

Les parcs de loisirs devront acquitter une TVA de 19,6%, contre 5,5% auparavant, une hausse qui devrait rapporter 90 millions d'euros dans les caisses de l'Etat. Ils l'ont appris hier soir, en regardant le Premier ministre présenter ses mesures sur TF1. "Nous n'avons fait l'objet d'aucune consultation au préalable" déplore la compagnie des Alpes, qui exploite le parc Astérix et le Futuroscope. Le syndicat national des espaces de loisirs, d'attractions et culturels (Snelac) fustige la mesure de Bercy qu'il qualifie d' "injuste" et de " discriminatoire". "C'est inédit qu'on demande à un secteur de prendre 14 points d'un coup", affirme la compagnie des Alpes. Le secteur semble pris de cours. Disneyland demande à Bercy de revoir sa copie. "La santé financière fragile de l'entreprise ne permet pas de subir un tel choc et aura pour conséquence un risque pour l'emploi, "a annoncé jeudi le syndicat UNSA du parc Disneyland Paris dans un communiqué. Vendu 57 euros, le ticket d'entrée au parc de Disneyland Paris pourrait augmenter de 8 euros si la hausse de la TVA était répercutée dans sa totalité. Mais avant que la hausse de la TVA entre en vigueur, le gouvernement devra affronter les professionnels du secteur indignés.