Comment BNP Paribas va tenter de tirer les leçons de son amende record

La banque française a accusé une perte nette de 4,32 milliards d’euros, au deuxième trimestre. La conséquence de l’amende record de près de 9 milliards de dollars (6,6 milliards d’euros) qui lui avait été infligée par la justice américaine, le 30 juin.
Christine Lejoux
La banque va augmenter de 500 personnes les effectifs de son département conformité, au cours des deux ou trois prochaines années. REUTERS.

Les comptes trimestriels de BNP Paribas dans le rouge ? Cela n'était plus arrivé depuis la fin 2008, quand la banque française, comme ses concurrentes, avait accusé le choc de la faillite de Lehman Brothers. La perte nette de 4,32 milliards d'euros publiée par BNP Paribas jeudi 31 juillet, au titre du deuxième trimestre 2014, est, là encore, d'origine américaine. Elle résulte de l'amende record de 8,97 milliards de dollars (6,6 milliards d'euros) infligée le 30 juin par la justice américaine au groupe français, accusé d'avoir réalisé des transactions en dollar avec des pays soumis à un embargo économique des Etats-Unis, comme l'Iran et le Soudan.

 Le paiement de cette amende, la plus importante qu'une banque étrangère ait jamais eu à acquitter outre-Atlantique, a en effet nécessité de passer une charge exceptionnelle de 5,75 milliards d'euros dans les comptes du deuxième trimestre, en plus des 798 millions déjà provisionnés dans ceux des trois derniers mois de 2013. A quoi s'ajoute une autre charge exceptionnelle de 200 millions d'euros, liée à la mise en place des mesures exigées par les autorités américaines, comme la centralisation - au sein de la succursale de New York - du traitement et du contrôle de toutes les transactions en dollar effectuées par les différentes entités de BNP Paribas, quels que soient leur métier et leur implantation géographique.

 Une augmentation de 500 personnes des effectifs dédiés à la conformité

 Au-delà de ces mesures réclamées par la justice américaine, la banque, qui avait fait son mea culpa devant cette dernière fin juin, va revoir de fond en comble - ou presque - ses procédures de contrôle interne. D'abord, les fonctions juridiques et de conformité seront intégrées verticalement, afin de renforcer le contrôle. Ensuite, un comité de supervision et de contrôle sera créé à l'échelle du groupe. Présidé par Jean-Laurent Bonnafé lui-même, directeur général de BNP Paribas, il réunira deux fois par mois les responsables des fonctions juridiques, de conformité et des risques, ainsi que l'Inspecteur Général de la banque, afin de veiller à la coordination des différentes actions de supervision et de contrôle.

Un comité d'éthique sera également créé, qui aura notamment pour mission d'orienter et de suivre les politiques relatives aux secteurs d'activité et pays sensibles. Il comprendra des personnes extérieures à BNP Paribas, dont les noms pourraient être communiqués dans les prochaines semaines. Enfin, les effectifs dédiés à la conformité à l'échelle mondiale, passés de 1.100 personnes environ en 2009 à quelque 1.600 en 2013, augmenteront "dans le même ordre de grandeur" dans les deux à trois prochaines années, a indiqué Jean-Laurent Bonnafé.

 Jean Clamon, responsable de la conformité depuis 2008, va partir

 Toujours au chapitre des effectifs, Jean-Clamon, qui était responsable de la conformité pour l'ensemble du groupe BNP Paribas depuis 2008, "quittera ses fonctions à la rentrée", a précisé Jean-Laurent Bonnafé. Tout en affirmant qu'il s'agissait "simplement d'un départ en retraite." C'est Eric Martin, jusqu'alors Inspecteur Général du groupe, qui succèdera à Jean Clamon. A noter que BNP Paribas s'appuiera sur un cabinet de conseil international, qui n'a pas encore été choisi, dans le cadre de cette revue de ses procédures de contrôle interne.

Autre recherche en cours, celle de la banque qui devra se substituer à BNP Paribas dans le cadre d'opérations de compensation en dollar - principalement liées à des financements sur les marchés du pétrole et du gaz - que la banque n'aura plus le droit d'effectuer durant un an, à partir du 1er janvier 2015, dans le cadre de la sanction américaine. Une suspension qui pourrait coûter "quelques dizaines de millions d'euros" à BNP Paribas, selon Jean-Laurent Bonnafé. Qui précise que la banque chargée de se substituer à BNP Paribas ne sera pas française, compte tenu de la lourdeur des infrastructures nécessaires pour mener à bien ces opérations de compensation en dollar.

 Un impact négatif de 100 points de base sur le ratio de solvabilité

 L'amende record de BNP Paribas et son plaider-coupable ont-ils déjà fait perdre des clients à la banque ? Cette dernière affirme que non, et en veut pour preuve un bénéfice net (hors éléments exceptionnels) en hausse de 23,2% au deuxième trimestre, à 1,92 milliard d'euros, tiré par le regain de tonus des activités de banque de financement et d'investissement. Ce qui permet à BNP Paribas d'afficher un ratio de solvabilité [fonds propres "durs" rapportés aux crédits consentis ; Ndlr] de 10%, supérieur au minimum de 9% requis par la nouvelle réglementation de Bâle III. Et ce, malgré l'impact négatif de 100 points de base lié à l'amende, que le groupe a déjà intégralement réglée grâce à ses 244 milliards d'euros de réserves de liquidités.

 "Du point de vue de l'organisation, nous pensons que les principales leçons de l'affaire américaine ont été tirées", estime Jean-Laurent Bonnafé. Pour autant, "sur le plan moral, on ne peut pas minimiser cette sanction (américaine). C'est un événement dont il faudra se souvenir longtemps", ajoute le directeur général de BNP Paribas. D'autant plus que le groupe n'en a peut-être pas terminé avec les litiges : "Un certain nombre de dossiers sont ouverts pour l'ensemble de l'industrie financière, notamment celui (de la manipulation) du marché des changes", reconnaît Jean-Laurent Bonnafé. Mais d'ajouter : "Nous ne pensons pas figurer parmi les banques les plus à risque."

Christine Lejoux

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Commentaires 31
à écrit le 04/08/2014 à 16:06
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Allez les banquiers de la BNP,ils vous faut leur en piquer le double,a ces racketteurs d'etat

à écrit le 02/08/2014 à 17:01
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Le non respect des règles imposées par les États Unis pour des transactions en dollars est une faute .... Ok! Mais comment peut on accepter sans rien dire que la justice américaines s'octroie le droit de condamner une banque étrangère qui n'a pas ...

à écrit le 02/08/2014 à 0:16
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Les juges français sont très gentils et les procureurs bien dressés : aucune enquête, vraiment rien du côté français pour comprendre le mécanisme des opérations illégales de la BNP menées pendant des années globalisant tout de même 200 milliards de d...

à écrit le 02/08/2014 à 0:01
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Les juges français sont très gentils et les procureurs bien dressés : aucune enquête, vraiment rien du côté français pour comprendre le mécanisme des opérations illégales de la BNP menées pendant des années globalisant tout de même 200 milliards de d...

à écrit le 01/08/2014 à 21:50
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J'aurais préféré qu'on nous parle de la vrai leçon : dé-dollarisation des transactions et pas des mesurettes qui seront mises en place jusqu'à la prochaine réorganisation;

à écrit le 01/08/2014 à 21:20
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La leçon à tirer ? Les Américains nous veulent du bien...

à écrit le 01/08/2014 à 14:45
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Un kerviel - 4mrds 5 ans de prison un Bnp - 9 Mrds un départ à la retraite. Elle est belle la vie

à écrit le 01/08/2014 à 14:22
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Pour qu'une banque de détail n'aie pas de problèmes de banques de marché, il faudrait peut-être qu'elle se résigne à ne pas faire de marché. Et à ne pas être ce machin chou-chèvre franchouillard qui s'appelle une banque universelle. Et qui va se fran...

à écrit le 01/08/2014 à 13:39
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Cela va permettre aux U.S. de racheter Alstom pour pas un centime..... Elle est pas belle la vie, Ce gouvernement est vraiment un Charlot.... N'en déplaisent à certains.

à écrit le 01/08/2014 à 12:44
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Ben la leçon est claire et vaut pour bien plus que la BNP. Il faut essayer de s'extraire du systeme dollar autant que faire se peut.

le 01/08/2014 à 21:27
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+1

à écrit le 01/08/2014 à 12:40
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Tirer les leçons, c'est apprendre une autre façon de ruser pour ne pas se faire prendre ?

à écrit le 01/08/2014 à 11:09
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Toutes les banques et les directeurs sont des escrocs, il faut immédiatement faire le ménage, nationaliser, virer les instruits de directeurs.... Indirectement, l'état va encore payer. Les banques organisent le délit fiscal et l'évasion.... Ap...

à écrit le 01/08/2014 à 10:34
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article peut étudié en profondeur, O K pôur le résultat comptable qui va en prendre un coup... ensuite comme c'est une sanction une amende n'est pas déductible du résultat fiscal donc la BNP devrait aussi sortir 1,8 d'impot sur les sociétés ce qui va...

à écrit le 01/08/2014 à 9:26
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Un litige encore encours avec la BNP : Escroquerie en bande organisée #affaireapollonia . Le préjudice totale avec toutes les banques françaises impliquées est de 1 milliard €.

à écrit le 01/08/2014 à 7:17
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Arrêter de fricoter avec les us ce serait déjà un début.

à écrit le 01/08/2014 à 0:59
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Les leçons de BNP ou de l'argentine c'est: 1/ ne jamais contracter ou s'endetter en monnaie étrangère ou contrat étranger. 2/ ne jamais douter de la rapacité des américains et leur solidarité entre eux.

le 01/08/2014 à 9:30
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Entièrement d'accord. Déjà pour commencer il faudrait réduire l'utilisation du dollar. Pourquoi les compagnies aériennes européennes continue d'acheter leurs Airbus en dollars? C'est absurde. De même on pourrait acheter notre pétrole et notre gaz en ...

à écrit le 31/07/2014 à 22:21
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Bah on socialise les pertes, comme les dettes du public 150 milliards non déclarés, y a qu'à demander une subvention! Coup de tampon colbertiste aux initiatives!

à écrit le 31/07/2014 à 21:06
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Dire que tous ces milliards vont engraisser l'hypocrisie des américains, ça me fait mal au coeur !

à écrit le 31/07/2014 à 20:11
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Personne ne l'a encore constaté mais c'est l'état français lui-même qui est perdant car le gros défcit de la banque est imputable aux bénéfices des exercices futurs. Donc elle ne paiera plus d'impôt sur les sociétés pendant logntemps ( manque à ...

le 31/07/2014 à 22:29
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Au delà des impôts c'est surtout une perte sèche pour le financement des bons du Trésor français car les banques françaises sont les premières à détenir de la dette publique française. Le racket tout azimut des banques organisé par les USA n'est en r...

le 31/07/2014 à 23:51
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Dans le droit français nul ne peut se prévaloir de ses turpides (la BNP a mis en oeuvre des circuits très particuliers en toute connaissance, délibérés, pour cacher ses opérations aux services américains). On ne peut déduire par exemple une amende de...

à écrit le 31/07/2014 à 19:13
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Bravo, la banque universelle ! : on se croit actionnaire d'une banque de détail, et on se réveille un beau matin actionnaire d'une banque de marché qui, forcément, à des coups durs.

à écrit le 31/07/2014 à 19:08
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c'est très simple : ne pas faire affaire en dollars !

à écrit le 31/07/2014 à 18:06
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C'est bien fait; à vouloir jouer au plus malin quitte à y laisser ses culottes !

le 31/07/2014 à 18:51
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C'est clair qu'il vaut mieux jouer les valets des USA... belle perspective d'avenir pour l'économie française!

à écrit le 31/07/2014 à 16:07
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Combien de clients bnp banque prive on perdus dans la capital investi depuis 2008 ?, perte de 45 %

le 31/07/2014 à 17:03
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en fait il y a pas que BNP, non qui a baissé depuis 2008? Et puis la premiere regle en bourse c'est d'investir de l'argent dont on a pas besoin car c'est plus risqué que le livret A. Changez de conseiller bancaire ;)

le 31/07/2014 à 17:11
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merci de votre commentaire, madame ayant vendu un bout de terrain bien sur la BNP privé nous est tombé dessus, on sait faire on est les meilleurs.... j'ai peur pour le petit capital quelle détient.....pour madame....je vais aller acheter de l'or...

le 31/07/2014 à 17:21
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@Retraite Et moi, aussi client de BNP banque privée: gain de 65% depuis fin juillet 2008. Moyenne de nous deux: +10%. -:) Ça ne sert à rien de généraliser à partir d'un ou deux cas particuliers. Voyez plutôt avec votre conseiller pourquoi votre r...

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